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PÉNITENCIERS

McCoy c. Canada (Procureur général)

A-5-02

2003 CAF 118, juge Létourneau, J.C.A.

6-3-03

10 p.

Le juge de la Section de première instance (juge) s'est-il trompé lorsqu'il a avalisé la décision du Comité de discipline (Comité) par laquelle ce dernier trouvait l'appelant coupable d'avoir agi de manière irrespectueuse ou outrageante envers un agent du Service correctionnel du Canada (agent) au point de l'inciter à la violence?--La décision du Comité, entérinée par le juge, est illégale parce qu'au moins un des éléments constitutifs de l'infraction n'a pas été prouvé--L'actus reus de l'infraction contenue à l'art. 40g) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition consiste dans le fait de poser un geste qui n'est pas simplement irrespec-tueux, mais bien un geste qui est si irrespectueux qu'il va inciter la personne visée à faire usage de violence-- L'infraction requiert un degré marqué d'irrespect, une incitation à la violence et une relation causale entre l'irrespect et l'incitation: le geste doit être irrespectueux au point d'inciter une réaction violente, même si, dans les faits, la violence ne se matérialise pas--En l'espèce, le geste de l'appelant a pris la forme des propos suivants: «Tu me dois 15$ puis tu dois me les rendre»--En soi, ces propos n'ont rien de désobligeant ou, pour utiliser la définition du dictionnaire du mot «irrespectueux», ne sont pas nécessairement «impertinent», «insolent» ou «irrévérencieux»: Le Nouveau Petit Robert, 1993, p. 1359--Ces propos établissent l'existence d'une créance et l'obligation pour le débiteur de l'acquitter--D'ailleurs, l'agent n'a pas perçu les propos tels qu'ici formulés comme un manque de respect, mais plutôt comme une menace dans le contexte où ils furent prononcés, ce qu'a confirmé l'appelant, mais sans préciser de quelle sorte de menace il s'agissait--Le Comité a conclu à l'existence de menaces, vraisemblablement au sens de l'art. 40h), mais a trouvé l'appelant coupable de l'infraction sous l'art. 40g)--La Cour ne croit pas que le Comité et le juge aient fait l'équation qu'une menace équivaut nécessairement à un manque de respect envers la personne visée--La preuve n'établit pas que ce comportement était irrespectueux au point d'inciter l'agent à la violence--Durant le témoignage, l'agent, en aucun temps, n'a déclaré ou affirmé s'être senti victime d'un manque de respect--Le poursuivant avait le fardeau de prouver hors de tout doute raisonnable les éléments de l'infraction--Absence totale de preuve sur un élément essentiel de l'infraction--Il ne serait pas approprié d'inférer qu'une personne raisonnable se serait sentie victime d'un manque de respect et incitée à la violence lorsque la personne visée par les propos a témoigné et n'a pas déclaré ou n'a pas voulu affirmer sous serment que tel était le cas--Il serait injuste de combler les omissions et les carences de la preuve en spéculant sur ce qu'aurait été la perception d'une personne raisonnable--L'agent est un professionnel entraîné à transiger dans un milieu carcéral avec des détenus aux profils diversifiés et complexes--Il est entraîné à faire preuve de contrôle et de réserve face aux quolibets, à l'irrévérence, à la frustration et même à la menace--Son comportement révèle celui d'une personne qui ne s'est pas sentie incitée à la violence et qui a agi conformément aux normes en rédigeant un rapport d'infraction pour menace--Appel accueillie--Demande de contrôle judiciaire accueilli--Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20, art. 40g),h).

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