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COURONNE

Créanciers et débiteurs

Canada (Procureure générale) c. Banque nationale du Canada

A-626-02, A-627-02, A-628-02, A-629-02

2004 CAF 92, juge Noël, J.C.A.

5-3-04

22 p.

Montants détenus en fiducie--Il s'agit de quatre appels à l'encontre de décisions (Canada (Procureure générale) c. Banque nationale du Canada, 2002 DTC 7468 (C.F. 1re inst.); Canada (Procureure générale) c. Banque nationale du Canada, 2002 CTC 7477 (C.F. 1re inst.); Canada (Procureure générale) c. Caisse populaire Desjardins de Lebel-sur-Quévillon, 2002 DTC 7493 (C.F. 1re inst.)); Canada (Procureure générale) c. Caisse populaire d'Amos, 2002 DTC 7484 (C.F. 1re inst.)) rejetant les actions de l'appelante visant le recouvrement de déductions à la source déduites et non remises au motif que l'appelante avait omis de se conformer au droit provincial afin de donner effet au mécanisme de fiducie réputée créé en vertu des art. 227(4) et (4.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (LIR) et en vertu de l'art. 86(2.1) de la Loi sur l'assurance-emploi (LAE)--Ces dispositions stipulent que toute personne qui déduit ou retient un montant en vertu de ces lois est réputée le détenir en fiducie pour Sa Majesté--Les intimées ont saisi, pris en paiement ou obtenu par délaissement les biens mobiliers sur lesquels portait leur hypothèque mobilière et elles ont éventuellement reçu le produit de leur vente pour valoir sur leur créance--Suivant l'art. 227(4.1) de la LIR et l'art. 86(2.1) de la LAE, l'appelante a mis les intimées en demeure de verser au receveur général le produit découlant de la vente des biens assujettis à leur garantie jusqu'à concurrence des retenues à la source «effectuées mais non remises» par les débiteurs fiscaux--Les intimées ont ignoré ces mises en demeure et des procédures de recouvrement furent intentées et ultimement rejetées par le premier juge--Le premier juge a commis une erreur de droit en qualifiant les intimées d'acquéreurs de bonne foi, soustrayant ainsi les biens qu'elles ont pris en paiement, saisis ou obtenus par délaissement de la fiducie réputée--La C.S.C. a précisé dans l'arrêt Banque Royale du Canada c. Sparrow Electric Corp., [1997] 1 R.C.S. 411 que le législateur peut accorder priorité absolue à une fiducie réputée en ayant recours à un langage précis--La C.S.C. explique aussi, dans l'arrêt First Vancouver Finance c. M.R.N., [2002] 2 R.C.S. 720, que la fiducie réputée s'apparente à une charge flottante qui grève l'ensemble des éléments de l'actif du débiteur fiscal jusqu'à concurrence du montant en souffrance--Les Banques ou les Caisses dans les présentes affaires ne peuvent être assimilées à des tiers acquéreurs qui échapperaient aux dispositions de la fiducie réputée--Elles sont des créancières garanties de sorte que les biens sur lesquels elles ont fait valoir leur garantie sont demeurés assujettis à la fiducie réputée, et l'étaient toujours lors de leur vente--Est-ce que le droit provincial s'appliquait à titre supplétif au régime fédéral quant à la procédure à suivre par la Couronne pour faire valoir les droits qui lui sont échus selon l'art. 227(4.1) de la LIR et l'art. 86(2.1) de la LAE?--La possibilité que le droit provincial s'applique à titre supplétif est prévue aux art. 8.1 et 8.2 de la Loi d'interprétation--Pour recourir au droit d'une province en matière de propriété et droit civil en vue d'assurer l'application d'un texte de loi fédéral dans cette province, à titre supplétif, il faut qu'il soit nécessaire de recourir à ce droit et qu'aucune règle de droit fédéral ne s'y oppose--Or, les dispositions de la LIR et de la LAE portant sur les fiducies réputées sont complètes et explicites quant à leur effect sur les biens repris par les créanciers garantis suite à l'exercice de leur garantie--Le législateur n'est astreint à aucune méthode particulière dans l'élaboration des mesures de recouvrement--L'obligation positive incombant au créancier garanti de payer au receveur général le produit découlant du bien assujetti à la fiducie ne pourrait être plus claire--Le créancier garanti ne respectant pas son obligation légale de payer au receveur général le produit d'un bien assujetti à la fiducie réputée en priorité sur sa garantie, engage sa responsabilité personnelle et devient de ce fait redevable du montant impayé--Contrairement à ce que croyait le premier juge, le recours de l'appelante serait assujetti à un délai de prescription même si le droit civil ne n'appliquait pas car la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif s'applique--L'incertitude que peut créer le fait de permettre à Sa Majesté d'être payé en priorité est justifiée par le fait que les retenues à la source sont «au coeur» de la procédure de perception de l'impôt au Canada--La question de savoir si la notion de «droit de bénéficiaire» un concept de common law, peut-être utilisée au Québec par le législateur fédéral n'est pas pertinente--La tâche des tribunaux se limite à déceler l'intention du législateur et d'y donner effet--Le premier juge n'avait pas à décider si le «droit de bénéficiaire» de la Couronne avait préséance sur les droits des intimées selon le droit civil--Il n'avait qu'à constater le fait que les intimées avaient reçu le produit des biens assujettis à la fiducie réputée et donner effet à l'obligation qu'elles avaient de payer ce produit au receveur général en priorité sur leur garantie--Appels accueillis--Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1, art. 227--Loi sur l'assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23, art. 86(2.1)--Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, art. 8.1 (édicté par L.C. 2001, ch. 4, art. 8), 8.2 (édicté, idem)--Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, L.R.C. (1985), ch. C-50, art. 1 (mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 21).

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