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[2018] 2 R.C.F. F-4

Peuples autochtones

Terres

Appel de la décision (2016 CF 595) de la Cour fédérale (C.F.) rejetant le contrôle judiciaire de la décision rendue par l’intimé, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien (ministre), de consentir à la cession d’un acte formaliste bilatéral énonçant une servitude — L’intimée, Kinder Morgan, exploite un pipeline qui traverse la réserve de l’appelante — L’appelante et d’autres bandes touchent une indemnisation en contrepartie du droit de passage du pipeline — Le gouverneur en conseil a autorisé l’octroi du droit de passage en 1953 par la voie d’un décret — Le ministre a octroyé le droit de passage dans les réserves touchées dans un acte formaliste bilatéral en 1955 — Kinder Morgan a présenté à l’Office national de l’énergie une demande de certificat de commodité et de nécessité publiques pour prolonger le pipeline — Les appelants ont exprimé le souhait que le ministre profite de l’occasion que lui offrait la demande de consentement à la cession pour actualiser les modalités de l’acte formaliste bilatéral — Le ministre a invité toutes les bandes touchées à prendre part au processus d’actualisation de l’acte formaliste bilatéral — Les appelants ont estimé que le ministre avait refusé d’inclure leurs dispositions dans l’acte formaliste bilatéral et se sont retirés du processus — Le « modèle de modification » a par la suite été achevé et contenait de nouvelles modalités — L’utilisation et la mise en œuvre du modèle de modification était une question distincte de la décision du ministre concernant la demande de consentement à la cession des actes formalistes bilatéraux prévoyant une servitude — Les appelants et Kinder Morgan ont négocié un protocole d’entente sur l’édification des capacités afin d’établir un processus pour résoudre les problèmes hérités du passé et les problèmes liés à l’exploitation et pour énoncer un processus de mobilisation aux fins du prolongement proposé du pipeline — Le ministre a consenti à la cession dans une entente sur le consentement à la cession — La question dont la C.F. était saisie se rapportait à la portée de l’obligation fiduciaire du ministre envers les appelants et à la question de savoir s’il s’était acquitté de cette obligation de manière appropriée lorsqu’il a décidé s’il fallait consentir ou non à la cession d’un acte formaliste bilatéral prévoyant une servitude — La C.F. a suivi la démarche en deux étapes énoncée dans l’affaire Bande indienne d’Osoyoos c. Oliver (Ville), 2001 CSC 85, [2001] 3 R.C.S. 746 : 1) était-il dans l’intérêt public que la prise ou l’utilisation des terres de réserve ou de tout droit y afférent au sens de l’art. 35 de la Loi soient autorisées; (2) dans l’affirmative, la Couronne avait l’obligation de faire en sorte que cette prise ou utilisation des terres ne porte qu’une atteinte minimale au droit de la bande d’utiliser ses terres de réserve et d’en jouir — La C.F. a conclu que le ministre avait satisfait au critère et qu’il n’était pas tenu de rouvrir l’acte formaliste bilatéral — Les principales questions en litige portaient sur le contenu de l’obligation fiduciaire du ministre lorsqu’il décide d’accorder ou non son consentement à une cession, et si le ministre s’est acquitté raisonnablement de son obligation fiduciaire — La juge Dawson, J.C.A. (le juge Rennie, J.C.A.souscrivant à ses motifs) : La C.F. a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que la décision du ministre était raisonnable — Le ministre était tenu de prendre en considération l’intérêt supérieur actuel et permanent des appelants — Il devait agir comme une personne raisonnablement prudente gérant ses propres affaires tout en ne bafouant pas l’intérêt public dans l’exploitation continue du pipeline — Il devait porter une atteinte minimale au droit de la bande d’utiliser ses terres et d’en jouir — La mesure de l’atteinte devait être évaluée au regard de l’impact actuel et permanent du maintien des modalités initiales de la servitude sur le droit de Coldwater d’utiliser ses terres de réserve et d’en jouir — Le ministre dans la présente affaire n’a pas pris en considération les appréhensions des appelants concernant l’indemnisation et les modalités de l’acte formaliste bilatéral lorsqu’il a décidé d’accorder son consentement à la cession — Il a limité son examen à la capacité organisationnelle du cessionnaire d’appliquer les modalités de l’acte formaliste bilatéral initial créant une servitude — Le ministre avait l’obligation de prendre en considération l’intérêt supérieur des appelants et de faire en sorte que l’atteinte à leur utilisation et à leur jouissance des terres soit minimale, ce qui nécessitait la prise en considération de facteurs en sus de la capacité organisationnelle du cessionnaire proposé — Par suite du processus d’actualisation de l’acte formaliste bilatéral, le ministre savait que les modalités de l’acte formaliste bilatéral ne répondait plus aux préoccupations actuelles — Le ministre ne s’est pas demandé si la protection offerte aux appelants en vertu du modèle actualisé était suffisante — La décision du ministre a été infirmée et renvoyée pour nouvelle décision — Appel accueilli — Le juge Webb, J.C.A. (dissident) : Il était important de se concentrer sur l’impact particulier que le refus ou l’octroi du consentement dans la présente affaire a sur le droit des appelants d’utiliser leurs terres et d’en jouir — La seule question à laquelle le ministre devait répondre était celle de savoir si les droits d’une société membre d’un groupe de sociétés à une servitude devait être cédé à une autre société faisant partie du même groupe de sociétés — Il n’y avait aucune raison de conclure que la servitude cesserait d’exister si le ministre refusait de consentir à la cession — En conséquence, peu importe que le ministre consente ou non à la demande de cession de l’intérêt d’une société à une autre société membre du groupe de sociétés de Kinder Morgan, la servitude demeurait en place — L’utilisation des terres en question n’a pas changé; les appelants ont le droit d’utiliser les terres et d’en jouir, peu importe que le consentement soit accordé ou refusé — La décision du ministre d’approuver la cession de la servitude était raisonnable.

Bande indienne de Coldwater c. Canada (Affaires indiennes et développement du Nord) (A-214-16, 2017 CAF 199, juges Dawson et Webb, J.C.A., jugement en date du 26 septembre 2017, 37 p.)

 

 

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