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Bell Canada c. Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier

T-1414-96

juge Muldoon

17-3-98

36 p.

Demande en vue d'obtenir une ordonnance de certiorari annulant la décision par laquelle la CCDP a demandé la nomination d'un tribunal des droits de la personne (tribunal) pour mener une enquête sur les plaintes de disparité salariale déposées à l'encontre de la requérante, une ordonnance interdisant toute autre procédure de la part de la CCDP au sujet des plaintes en question ou un jugement déclaratoire portant que la requérante ne devrait pas être tenue de se défendre devant un tribunal à l'égard desdites plaintes-La principale question en litige en l'espèce porte sur l'interprétation de l'art. 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne: «Constitue un acte discriminatoire le fait pour l'employeur d'instaurer ou de pratiquer la disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établissement, des fonctions équivalentes»-Afin de prouver qu'une plainte est bien fondée, il est nécessaire de procéder par comparaison pour établir que les fonctions exécutées par la partie plaignante et celles qu'exerce un employé de l'autre sexe sont équivalentes, bien que cet employé reçoive un salaire supérieur pour exécuter ces fonctions dans le même établissement-La preuve de l'existence d'une pratique discriminatoire passe par une comparaison par paire (emploi à emploi)-Demande accueillie-Il semble que la CCDP ait déraillé et ait manifesté sa désapprobation vis-à-vis la Loi, surtout l'art. 11; elle paraissait décidée à imposer une modification, sinon en droit, du moins en fait (usurpant par le fait même le pouvoir législatif)-Par suite du rejet de plusieurs plaintes de disparité salariale visant à contester les taux de salaire qui avaient été négociés dans le cadre des conventions collectives, deux syndicats (le SCEP et l'ACET) et Bell ont conclu une entente concernant l'exécution d'une étude mixte sur les méthodes de rémunération décrites dans les conventions collectives que les parties avaient négociées à l'égard des unités de négociation représentées par les deux syndicats en question-Il s'agissait d'une étude de type «courbe à courbe» visant à décrire les tendances salariales et non d'une étude «emploi à emploi»-La CCDP a participé à l'étude mixte et était tenue de traiter les renseignements qu'elle obtenait de ce fait comme des données privilégiées et confidentielles-Cependant, elle a plus tard utilisé les renseignements afin d'établir le bien-fondé de «plaintes de discrimination indirecte» visant Bell-La Commission a même cherché à obtenir d'autres plaintes et a avisé les syndicats de déposer de nouvelles plaintes concernant des emplois non précisés apparemment exercés principalement par des hommes-D'autres plaintes ont également été modifiées suivant la suggestion de la CCDP de façon à remplacer les emplois utilisés comme postes repères par les «emplois à prédominance masculine dont les fonctions étaient équivalentes d'après l'étude mixte sur la parité salariale»-La Commission a déployé des efforts acharnés pour inciter les plaignants à reformuler leurs plaintes à titre de plaintes de discrimination «indirecte» et à y remplacer les postes repères par l'expression «tous les emplois à prédominance masculine»-La CCDP a décidé de renvoyer au tribunal certaines plaintes de disparité salariale déposées contre Bell-La Commission a commis une erreur de droit lorsqu'elle a omis de rejeter les plaintes qu'avaient déposées le SCEP, l'ACET et Femmes Action, étant donné que ces syndicats contestaient les salaires qu'ils avaient eux-mêmes négociés dans le cadre des négociations collectives avec Bell, et lorsqu'elle a omis de rejeter les plaintes malgré le fait qu'elles étaient toutes prescrites et qu'aucun motif valable n'existait pour ne pas tenir compte du délai de prescription, malgré l'absence totale d'éléments de preuve permettant de conclure que Bell avait pratiqué la disparité salariale pour des considérations fondées sur le sexe contrairement à l'art. 11 de la Loi, malgré le fait qu'elles renvoyaient à des employés de Bell qui travaillaient dans des établissements différents et qui étaient assujettis à des politiques différentes en ce qui a trait aux salaires et aux conditions d'emploi et malgré l'absence de précisions dont Bell avait besoin pour contester valablement lesdites plaintes, et lorsqu'elle a omis de rejeter la plainte déposée par le SCEP malgré les conclusions de non-discrimination auxquelles en était arrivée la Commission en 1984, 1985 et 1987 et malgré l'absence d'éléments de preuve indiquant un changement touchant l'écart entre les salaires versés pour les emplois à prédominance féminine et ceux des emplois à prédominance masculine chez les employés de Bell qui étaient représentés par le SCEP-Au lieu d'utiliser des postes repères comme facteurs de comparaison, la CCDP a adopté un nouveau concept fondé sur les emplois à prédominance masculine et les emplois à prédominance féminine, concept qui n'est pas autorisé par la Loi-Comment expliquer que des plaintes valables pourraient désormais être déposées au nom d'employées dont toutes les plaintes ont été rejetées au début des années 1980 et qui, depuis ce temps, ont reçu des augmentations de salaire proportionnelles supérieures à celles qui ont été versées aux employés de sexe masculin exerçant les emplois qui correspondaient aux postes repères utilisés lors du rejet desdites plaintes pendant les années 1980?-La CCDP a abusé de Bell et a profité d'elle-La comparaison avec des «catégories génériques d'emplois» n'était pas conforme à la Loi ou aux lignes directrices et il était illégal et inéquitable d'imposer ces conditions à Bell-Les syndicats qui consentent, dans les conventions collectives conclues avec la requérante, à des salaires inférieurs pour des emplois exercés par des femmes pourraient même être coupables de discrimination-Quant aux plaintes qui ne respectaient pas le délai de prescription, si la Commission ne prouve pas qu'elle estimait cette prorogation appropriée dans les circonstances, les plaintes ne pourront être tranchées, car cette prorogation au-delà du délai d'un an est interdite par la Loi-La CCDP a reçu et approuvé des plaintes qui visaient Bell et qui étaient mal formulées, malgré l'art. 11 de la Loi, et elle a agi de façon inéquitable envers Bell en désignant un tribunal chargé de statuer sur ces plaintes qui étaient prescrites et mal formulées-Décision annulée-Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6, art. 11.

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