Fiches analytiques

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Beloit Canada Ltd. c. Valmet Oy

T-1003-76

juge Rouleau

12-5-94

35 p.

Renvoi concernant la restitution des bénéfices-La Cour d'appel a conclu que le brevet des demanderesses concernant une «presse» de machine à papier était valide et que la défenderesse l'avait contrefait en vendant quatre machines à papier contenant cette presse-Elle a statué que les demanderesses avaient droit, à leur choix, à des dommages-intérêts ou à la comptabilisation des profits-Les demanderesses ont choisi la comptabilisation des profits-En appel d'une ordonnance concernant certains aspects de l'interrogatoire préalable, la Cour d'appel a fait savoir que la demanderesse avait droit aux profits résultant de la contrefaçon par la défenderesse-Il s'agissait de savoir si les demanderesses avaient droit à la restitution de tous les bénéfices réalisés par la défenderesse par suite de la vente des quatre machines à papier ou uniquement à la restitution des bénéfices provenant de la vente des presses de contrefaçon-Selon les demanderesses, les ventes en litige étaient attribuables à la technique de la triple pince dont elles étaient propriétaires-Les demanderesses ont maintenu qu'étant donné que les machines avaient été vendues en tant qu'unités, il n'était pas possible de calculer les bénéfices se rapportant uniquement à la presse de contrefaçon et qu'elles avaient droit à tous les bénéfices que Valmet Oy avait réalisés par suite de la vente des machines complètes-La restitution des bénéfices a été établie par les tribunaux d'equity-Il s'agit d'une réparation discrétionnaire qui peut être accordée si les circonstances le justifient-Il existe peu d'affaires de brevet dans lesquelles la Cour a accordé cette réparation-Dans Consolboard Inc. c. MacMillan Bloedel (Saskatchewan) Ltd. (1978), 39 C.P.R. (2d) 191 (C.F. 1re inst.), oú la réparation a été refusée, la Cour a dit que la demanderesse qui a eu gain de cause ne pouvait pas, dans le cours normal des procédures ou en droit, choisir la méthode permettant de déterminer l'indemnisation-Étant donné que de nombreux facteurs militent contre l'octroi de la restitution des bénéfices, la question de savoir si la réparation doit être accordée relève du pouvoir discrétionnaire en equity de la Cour et doit être tranchée par le juge de première instance, qui est au courant de toutes le circonstances du litige-La réparation ne devrait pas être accordée simplement en raison du choix effectué par le demandeur-Comme il a été dit dans J.M. Voith GmbH c. Beloit Corp., [1993] 2 C.F. 515 (1re inst.), il ne s'agit pas de savoir si la restitution des bénéfices peut être demandée, mais si c'est la réparation appropriée-Ce n'est pas la réparation habituellement choisie par le breveté contre le contrefacteur car elle comporte une procédure longue et coûteuse dont le résultat final est rarement satisfaisant-Dans Siddell v. Vickers (1892), 9 R.P.C. 152 (C.A.), le lord juge Lindley a dit qu'étant donné que le litige était énorme, les frais considérables et le temps qu'il fallait y consacrer complètement disproportionné à l'avantage finalement obtenu, les gens en étaient lassés et dégoûtés-En l'espèce, étant donné que la Cour d'appel a statué que les demanderesses avaient droit «à leur choix, à des dommages-intérêts ou à une comptabilisation des profits» et que la défenderesse n'a pas contesté le choix des demanderesses, la seule solution consistait à procéder à la restitution-Les dommages-intérêts et la restitution des bénéfices visent tous les deux à indemniser le demandeur lésé, mais les principes fondamentaux qui sous- tendent les deux réparations sont fort différents-Lorsque des dommages-intérêts sont sollicités, il incombe au demandeur d'établir la perte subie et le montant de cette perte-Dans les cas de restitution des bénéfices, il incombe au défendeur d'établir le montant des bénéfices que son acte illicite lui a permis de réaliser-La restitution des bénéfices pourrait servir à dissuader le défendeur d'examiner sa conduite illicite, mais la punition n'a rien à voir avec l'octroi de cette réparation-En tant que réparation en equity, la restitution des bénéfices vise entièrement à réparer un préjudice, et non à infliger une punition-Dans Ruff v. Swan (1921), 20 O.W.N. 158 (H.L.), la Cour a fait remarquer que l'objet de l'enquête était d'indemniser le demandeur, et non de punir les défendeurs-Si les demanderesses voulaient que [traduction] «Valmet soit punie», comme l'a déclaré le vice-président directeur de Beloit, la réparation appropriée était l'octroi de dommages-intérêts punitifs-Compte tenu de la preuve, il est peu probable qu'il eût été fait droit à pareille demande-Malgré les différences importantes sous-tendant les deux réparations, les mêmes principes s'appliquent à l'égard de la question de la répartition-La répartition devient une question litigieuse lorsque le défendeur allègue que seules certaines de ses activités violent les droits du demandeur, et que les dommages-intérêts ou les bénéfices devraient se limiter à ces activités-Il incombe au défendeur de prouver que la répartition devrait être effectuée et dans quelle mesure-Les circonstances individuelles peuvent faire de la répartition des bénéfices la seule solution équitable-Critère permettant de déterminer si la répartition doit être fondée sur la possibilité de vendre, dans son ensemble, le produit contenant l'invention brevetée-Il incombe à la Cour de déterminer si la demande du marché, en ce qui concerne le produit du défendeur, découle du brevet contrefait ou si elle découle de caractéristiques additionnelles du produit-L'enquête vise la [traduction] «valeur de la pièce brevetée par rapport à la machine complète»-Il s'agit d'une question de fait-Il incombe à la défenderesse de présenter suffisamment d'éléments de preuve pour convaincre la Cour que la demande du consommateur pour son produit découle de caractéristiques autres que celles du brevet contrefait des demanderesses-Compte tenu de la preuve, aucun des bénéfices réalisés par la défenderesse par suite de la vente de quatre machines à papier ne découlait de la contrefaçon illicite du brevet des demanderesses-Il existait maintes raisons pour lesquelles la soumission de la défenderesse en vue de la vente de ces machines avait été retenue (conception supérieure, meilleure construction, matériaux de meilleure qualité, meilleur service à l'égard des garanties, livraison rapide), mais aucune ne se rapportait à la presse de contrefaçon-Les demanderesses doivent être indemnisées de la contrefaçon par la défenderesse, mais il est inéquitable de leur accorder tous les bénéfices que les défenderesses ont réalisés par suite de la vente des quatre machines-Elles ont uniquement droit aux bénéfices découlant de la vente des presses violant le brevet-La Cour accorde aux demanderesses les bénéfices que la défenderesse a réalisés à l'égard des presses, des commandes de changement de quatre presses, des frais d'installation et de mise en marche concernant les presses; l'intérêt gagné par la défenderesse sur le fonds de roulement positif jusqu'au moment du paiement intégral de chaque contrat; l'intérêt simple, à 5 % l'an, sur les montants dus.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.