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[2018] 4 R.C.F. F-11

Douanes et Accise

Loi sur la taxe d’accise

Action de la demanderesse visant à recouvrer de l’argent que la défenderesse a reçu de l’un de ses clients pour le paiement d’un prêt garanti par une hypothèque — Le client, propriétaire d’une entreprise, a perçu la TPS, mais il ne l’a pas versée — La défenderesse a accordé au client une marge de crédit hypothécaire ainsi qu’un prêt hypothécaire garantis par sa maison — La défenderesse n’était pas au fait des dettes de TPS du client — Le client a par la suite vendu sa maison et a entièrement remboursé la dette en souffrance de la marge de crédit hypothécaire et du prêt hypothécaire — La défenderesse n’a pas exécuté sa garantie contre le client, et les garanties enregistrées sur la maison de ce dernier ont fait l’objet d’une mainlevée — L’Agence du revenu du Canada (ARC) a soumis à la défenderesse une demande de remboursement de la somme de 67 854 $ en se fondant sur le mécanisme de fiducie réputée de l’art. 222 de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), ch. E-15 (LTA) relativement à l’omission du client de verser la TPS — La défenderesse a refusé de payer le montant — Il s’agissait principalement de savoir si l’art. 222 imposait à la défenderesse l’obligation de rembourser le montant qu’elle avait reçu du client, si la défenderesse peut soutenir, dans sa défense, qu’elle est acquéreur de bonne foi et à titre onéreux de l’argent reçu du client, et si la défenderesse n’était plus un créancier garanti au moment où l’obligation de rembourser a été déclenchée — La défenderesse avait l’obligation statutaire de verser cet argent à la demanderesse — Les montants versés à la défenderesse par le client étaient un « produit » de la vente de son bien, qui faisait l’objet de la fiducie réputée — L’art. 222 de la LTA et l’art. 227 de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1 (LIR) sont semblables; ils établissent tous deux une fiducie réputée et définissent quels biens y sont assujettis — Ils créent tous deux une obligation (« obligation statutaire ») de verser le produit du bien détenu en fiducie au receveur général — Le terme « produit » est généralement compris dans un sens plus large ne se restreignant pas aux ventes forcées ou à l’exécution d’une garantie — Le passage « le produit découlant de ces biens est payé au receveur général » à l’art. 222(3) de la LTA englobe le produit découlant de la vente volontaire des biens du débiteur fiscal — Après une telle vente, un débiteur fiscal a l’obligation de verser le produit de la vente au receveur général — Si le débiteur fiscal omet de le faire et paie plutôt un créancier garanti, alors ce créancier a l’obligation de verser l’argent à la demanderesse — L’argent obtenu par le client en contrepartie du transfert de sa maison à un tiers constituait le « produit » du bien qui faisait l’objet de la fiducie réputée — Le client avait l’obligation de payer sa dette fiscale avec cet argent — La défense fondée sur la notion d’acquéreur de bonne foi et à titre onéreux ne peut pas être invoquée par un créancier garanti dans le contexte de la fiducie réputée de la LTA et de la LIR — La Cour suprême a écarté cette possibilité dans l’arrêt First Vancouver Finance c. M.R.N., 2002 CSC 49, [2002] 2 R.C.S. 720 — La Cour suprême n’a pas créé dans cette affaire une version statutaire de la défense de l’acquéreur de bonne foi et à titre onéreux qui était entièrement indépendante de son pendant en equity — Il n’y a rien dans l’arrêt First Vancouver qui laisserait supposer que la Cour suprême s’appuyait sur quelque chose d’autre que le moyen de défense en equity — La défense de l’acquéreur de bonne foi et à titre onéreux n’est pas limitée aux « acquéreurs » qui obtiennent un bien par l’intermédiaire d’un contrat de vente — Les modifications de 1998 et de 2000 aux dispositions sur les fiducies réputées de la LIR et de la LTA reposent sur la prémisse qu’un créancier garanti ne peut pas invoquer la défense fondée sur la notion d’acquéreur de bonne foi et à titre onéreux lorsqu’il exécute sa garantie ou reçoit un paiement de son débiteur — Si le recours à cette défense était possible, les créanciers garantis seraient presque toujours en mesure de l’invoquer pour contrecarrer le mécanisme de la fiducie réputée — La plupart du temps, les créanciers ne sont pas au fait de l’existence d’une dette fiscale lorsqu’ils reçoivent un paiement — Le fait que le client a payé de façon volontaire sa dette à la défenderesse, plutôt que la défenderesse ait exécuté sa garantie, n’était pas pertinent — Les commentaires de la Cour suprême dans l’arrêt First Vancouver concernant les événements déterminants s’appliquent à la fiducie réputée et à l’obligation statutaire imposée aux tiers qui reçoivent le « produit » du bien détenu en fiducie — L’obligation statutaire est inextricablement liée à la fiducie réputée — Rien dans le libellé de l’art. 222 de la LTA n’appuie une telle distinction — La perte de la défenderesse dans la présente affaire était le résultat de la mise en œuvre de règles établissant les priorités parmi des créanciers, et non pas le résultat de la tentative d’un créancier d’exproprier un autre créancier — Demande accueillie.

Canada c. Banque Toronto-Dominion (T-1834-15, 2018 CF 538, juge Grammond, jugement en date du 25 mai 2018, 27 p.)

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