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Douanes et Accise

Loi sur la taxe d’accise

Appel à l’encontre d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt (C.C.I.) accueillant l’appel de l’intimé contre l’avis de cotisation établi par le ministre du Revenu du Québec en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), c. E-15 (LTA) — La C.C.I. a rejeté la thèse du ministre voulant que, du fait que l’intimé faisait partie d’un groupe impliqué dans la vente de stupéfiants, il était solidairement responsable avec les autres membres du paiement de la taxe sur les produits et services (TPS) percevable sur les ventes de stupéfiants — La C.C.I. a conclu que, dans la mesure où il vise un objet contraire à l’ordre public, le prétendu contrat de société liant les membres du groupe est nul selon l’art. 1413 du Code civil du Québec, RLRQ, ch. CCQ-1991 (C.c.Q.) — Il ne pouvait donc y avoir, selon la C.C.I., de société de personnes aux fins de l’art. 272.1 de la LTA, ce contrat étant réputé n’avoir jamais existé selon l’art. 1422 du C.c.Q. — Il était question de savoir si la C.C.I. a erré en concluant qu’il ne pouvait y avoir en l’espèce de société de personnes aux fins de la LTA vu les art. 1413, 1417 et 1422 du C.c.Q. — La CCI n’a pas erré en interprétant la notion de « société de personnes » mentionnée à l’art. 272.1 de la LTA à la lumière non seulement de l’art. 2186 du C.c.Q., mais également de ses art. 1413, 1417 et 1422 — L’interprétation retenue par la C.C.I. était non seulement conforme à la jurisprudence en la matière, mais également la seule qui soit compatible avec le principe de la complémentarité — La notion de « société de personnes » n’est pas définie à l’art. 272.1(5) de la LTA — Conformément au principe de la complémentarité, il fallait donc faire appel à la définition que la loi provinciale donne à cette notion de droit privé — Même si l’art. 2186 du C.c.Q. énonce trois conditions spécifiques à l’existence d’un contrat de société, cette disposition n’établit pas pour autant de manière exhaustive les conditions que doit remplir un contrat de société pour être valide — Comme tout autre contrat, le contrat de société doit également obéir aux règles générales des obligations — Selon l’art. 1413, « [e]st nul le contrat dont l’objet est prohibé par la loi ou contraire à l’ordre public » — L’inobservance de cette condition de formation du contrat emporte nullité, et cette nullité rétroagit dans le temps, de telle sorte que le contrat se trouve privé de tous les effets qu’il aurait pu produire — En d’autres termes, le contrat dont l’objet est contraire à l’ordre public n’est pas seulement inexécutable, il est juridiquement inexistant — L’argument de l’appelante selon lequel les principes de neutralité et d’équité en matière fiscale viennent contrer l’application en l’espèce des art. 1413, 1417 et 1422 du C.c.Q n’a pas été retenu — Bien que les art. 8.1 et 8.2 de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), c. I-21 prévoient la possibilité pour le législateur fédéral d’écarter le recours au droit provincial (par l’usage des termes « sauf règle de droit s’y opposant »), ce résultat ne peut être atteint de façon implicite — La jurisprudence citée par l’appelante relativement aux principes de neutralité et d’équité fiscale n’appuyait pas sa thèse voulant que l’article 1413 du C.c.Q. se doive d’être écarté — Bien que des expressions aussi larges que « fourniture taxable » et « activité commerciale », que l’on retrouve aux art. 123(1), 165 et 221 de la LTA, doivent s’interpréter en faisant abstraction des considérations de légalité, d’ordre public ou de moralité, ce qui était contesté dans la présente affaire n’était pas la nature taxable de la vente de drogue, mais bien le caractère solidaire de la dette en résultant — C’est pourquoi la prétention de l’appelante voulant que l’interprétation retenue par la C.C.I. en l’espèce risque d’exclure de l’application des lois fiscales toute transaction illégale était dénuée de tout fondement — Pour tous ces motifs, la C.C.I. n’a pas erré en refusant de tenir l’intimé solidairement responsable, en vertu de l’art. 272.1(5) de la LTA, de la dette fiscale résultant des activités commerciales du groupe — Appel rejeté.

Canada c. Raposo (A-154-18, 2019 CAF 208, de Montigny, J.C.A., motifs du jugement en date du 17 juillet 2019, 29 p.)

 

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