Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

T-3815-76
Polaroid Corporation (Demanderesse) c.
Eastman Kodak Company et Kodak Canada Ltée (Défenderesses)
Division de première instance, le juge Mahoney— Ottawa, les 11, 12 et 17 janvier 1977.
Brevets Pratique Action en contrefaçon de brevet Requête aux fins d'annuler l'ordonnance de signification ex
juris de la déclaration La demanderesse s'est-elle acquittée de son obligation d'établir une bonne cause d'action en vertu de
la Règle 307? Règles 307 et 700(2) de la Cour fédérale.
Arrêts suivis: C.A.P.A.C. c. International Good Music Inc. [1963] R.C.S. 136 et American Cyanamid Co. c. Ethicon Inc. (1976) 22 C.P.R. (2°) 75. Arrêt mentionné: Vitkovice Horni a Hutni Tezirstvo c. Korner [1951] A.C. 869.
REQUÊTE. AVOCATS:
Joan Clark, c.r., et Malcolm E. McLeod pour
la demanderesse.
G. Alex Macklin pour les défenderesses.
PROCUREURS:
Ogilvy, Cope, Porteous, Montgomery, Renault, Clarke & Kirkpatrick, Montréal, pour la demanderesse.
Gowling & Henderson, Ottawa, pour les défenderesses.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE MAHONEY: Il s'agit d'une action en contrefaçon de brevet relativement à des pellicules à développement instantané et à des appareils de photos utilisant ce genre de pellicules. La défende- resse, Eastman Kodak Company, ci-après appelée «Eastman Kodak», a déposé un acte de comparu- tion conditionnelle et cherche maintenant à faire annuler l'ordonnance de signification ex juris qui fut rendue à la suite de la demande ex parte présentée par la demanderesse.
En vertu de la Règle 307, une demande visant à obtenir une ordonnance de signification ex juris doit être «appuyée par affidavit ou autre preuve indiquant que ... le demandeur a une bonne cause
d'action». Dans American Cyanamid Co. c. Ethi- con Inc.', mon collègue Addy a décidé que l'effet de cette Règle était le même que celui des autres Règles qu'il a étudiées, y inclus les Règles anglai- ses qu'a examinées la Chambre des Lords dans Vitkovice Horni a Hutni Tezirstvo c. Korner 2 ; ces Règles ont établi le critère adopté par la Cour suprême du Canada dans C.A.P.A.C. c. Interna tional Good Music Inc.' En l'espèce, la demande- resse doit établir qu'elle a contre Eastman Kodak une «cause d'action soutenable» que cette cour a la compétence d'entendre.
La demanderesse a présenté des preuves d'actes accomplis par Eastman Kodak et pour son compte au Canada qui s'adressent particulièrement aux Canadiens et qui, au cours d'une audition sur le fond, pourraient bien être considérés comme des violations d'un brevet canadien, si les biens impli- qués violent effectivement les brevets en cause. Par ailleurs, l'avocat de la défenderesse soutient vigou- reusement que la demanderesse n'a pas prouvé la prétendue contrefaçon. Il est certain que les affida vits déposés pour le compte de la demanderesse ne reprennent ni ne mentionnent les allégations conte- nues dans les paragraphes 11, 12 et 13 de la déclaration qui font valoir, en grand nombre, les particularités des biens des défenderesses qui, pré- tend-on, violent les revendications spécifiques con- tenues dans les brevets de la demanderesse. Une telle façon de procéder aurait été redondante, comme l'a noté le juge Addy dans American Cyanamid.
Toutefois, en annexe à un affidavit 4 déposé en vue d'obtenir le rejet de cette requête, on a produit des exemplaires de nombreuses publications qui, à la lecture, semblent avoir émané d'Eastman Kodak. De l'examen de quelques-unes de ces publications', il ressort que les allégations conte- nues dans les paragraphes 11, 12 et 13 de la déclaration selon lesquelles les biens des défende- resses incorporent des éléments et, dans le cas de pellicules, des procédés décrits et revendiqués dans
' (1976) 22 C.P.R. (2°) 75.
2 [195I] A.C. 869.
' [1963] R.C.S. 136.
° Document 32.
5 Par ex. les pièces D et E: articles de journaux intitulés
respectivement «How Kodak Instant Film Works» et «How
Kodak Instant Cameras Work».
des brevets spécifiques, seraient relativement bien fondées. Conformément à la Règle 700(2), la demanderesse a déposé devant moi lesdits brevets; j'ai le droit de prendre en considération les reven- dications contenues dans ces brevets et le devoir de les présumer valides, peu importe l'existence ou la non-existence d'une preuve testimoniale en ce qui les concerne.
Bien que la Cour doive exercer, avec circonspec- tion, son pouvoir discrétionnaire quand il s'agit de faire comparaître devant elle un non-résident, il n'en demeure pas moins qu'à ce stade-ci d'une action, l'obligation d'un demandeur d'établir «une cause d'action soutenable» ne doit pas équivaloir à une répétition générale du procès. Je m'appuie sur un extrait du jugement rendu par le juge Mart - land, de la Cour suprême, dans l'arrêt C.A.P.A.C. à la page 143:
[TRADUCTION] Je ne me suis pas fait d'opinion et ne désire pas, à ce stade-ci des procédures, en exprimer une quant à savoir si l'appelante—en supposant que soient prouvées les allégations contenues dans la déclaration—a ou non une bonne cause d'action contre les intimés. Mais en me fondant sur lesdites allégations et sur les autres documents déposés devant le savant président, je suis convaincu que l'appelante a une «cause d'action soutenable.
La requête est rejetée avec dépens.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.