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T-5189-73
Paul D. Bowlen (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge en chef adjoint Thurlow—Edmonton, le 22 septembre; Ottawa, le 13 octobre 1977.
Pratique Requêtes en vue d'obtenir des ordonnances de production Les documents ne sont pas en la possession des personnes contre lesquelles l'ordonnance est demandée Ils sont en la possession d'une filiale étrangère possédée en pro- priété exclusive et d'une filiale étrangère contrôlée Règle 464 de la Cour fédérale.
Ces requêtes de la Couronne demandent des ordonnances, en application de la Règle 464(1), enjoignant à des personnes, qui ne sont pas parties à l'action, de produire des documents et d'en permettre l'inspection et la reproduction. Les deux premières requêtes demandent la production de documents qui ne sont pas en la possession des personnes contre lesquelles l'ordonnance est requise. La troisième sollicite une ordonnance exigeant la pro duction de documents en la possession de personnes contre lesquelles l'ordonnance est requise et de documents en la pos session d'une autre personne.
Arrêt: les deux premières requêtes et une partie de la troi- sième sont rejetées. Les documents visés dans la première requête sont en la possession d'une filiale possédée en propriété exclusive par la Banque Royale, compagnie distincte établie sous le régime de la loi des Etats-Unis et exploitée aux États- Unis. Il n'a pas été établi que les documents recherchés appar- tiennent à la Banque Royale, ou que la filiale les garde à titre de fidéicommis ou d'agent. La preuve laisse plutôt entendre que les documents appartiennent à la filiale américaine et à ses clients; on ne peut pas les considérer comme étant en la possession de la Banque Royale au sens de la Règle. La deuxième requête repose sur un fondement encore plus chance- lant que la première, car elle met en question une compagnie étrangère contrôlée par la Banque Royale, mais non possédée par celle-ci en propriété exclusive, et elle échoue pour les mêmes motifs. La troisième requête requiert la production de documents par des personnes qui ne sont pas parties au procès, mais elle ne se limite pas à des documents spécifiques, à des documents dont il est prouvé qu'ils sont en la possession des personnes contre lesquelles l'ordonnance est requise, ni même à des documents dont l'existence a été démontrée. Une ordon- nance sera rendue pour enjoindre la production, par les person- nes nommées, des rapports et documents mentionnés qu'elles ont reçus de Trust Corporation of the Bahamas.
Arrêt appliqué: Reid c. Langlois (1849) 1 Mac. & G. 627, 41 E.R. 1408. Arrêt examiné: Bowlen c. La Reine [1977] 1 C.F. 589. Arrêt examiné: Rhoades c. Occidental Life Insurance Co. of California [1973] 3 W.W.R. 625.
DEMANDE.
AVOCATS:
H. S. Prowse, c.r., pour le demandeur.
M. R. V. Storrow pour la défenderesse.
Colin L. Campbell pour National Westmin-
ster Bank Ltd.
Julian C. C. Chipman, c.r., pour la Banque
Royale du Canada.
Peter J. Royal pour Arvella Regis Bowlen,
Patrick Dennis Bowlen, Mary Elizabeth Jager
née Bowlen, William Alexander Bowlen et
John Michael Bowlen.
PROCUREURS:
Fenerty, Robertson, Prowse, Fraser, Bell & Hatch, Calgary, pour le demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
McCarthy & McCarthy, Toronto, pour Na tional Westminster Bank Ltd.
Ogilvy, Cope, Porteous, Montgomery, Renault, Clarke & Kirkpatrick, Montréal, pour la Banque Royale du Canada.
Milner & Steer, Edmonton, pour Arvella Regis Bowlen, Patrick Dennis Bowlen, Mary Elizabeth Jager née Bowlen, William Alexan- der Bowlen et John Michael Bowlen.
Ce qui suit est la version française des motifs des ordonnances rendus par
LE JUGE EN CHEF ADJOINT THURLOW: Dans la présente action, trois requêtes séparées ont été présentées pour le compte de la Couronne en vue d'obtenir des ordonnances, en application de la Règle 464(1), enjoignant à des personnes, qui ne sont pas parties à l'action, de produire des docu ments et d'en permettre l'inspection et la reproduc tion. L'objet des deux premières requêtes est la production de documents auxquels l'avis de requête se réfère comme étant en la possession, non pas des personnes contre lesquelles l'ordon- nance est requise, mais d'autres personnes. Dans la troisième, la requérante sollicite une ordonnance exigeant la production de documents qui seraient en la possession des personnes contre lesquelles l'ordonnance est requise et de documents possédés par d'autres personnes.
Il s'agit d'une procédure d'appel contre des coti- sations d'impôt sur le revenu pour les années 1963 à 1970. Le principal point litigieux consiste à déterminer si trois opérations, exécutées le 9 mai
1963, dans l'une desquelles le demandeur a trans- féré un portefeuille de placement à une compagnie des Bahamas, appelée Hambeldon Estates Limi ted, pour une contre-partie de $6,891,647.59, sont des trompe-l'oeil, et si le revenu provenant desdits placements continuait d'être, quant au fond et quant aux faits, un revenu du demandeur, pendant les années en question.
La Règle 464 comprend trois paragraphes fai- sant suite au titre: «Communication et examen lorsque le détenteur est un tiers». Elle figure parmi des règles traitant de la communication et de l'examen, mais, malgré ce titre, les dispositions de cette règle n'ont aucune relation avec des ordon- nances relatives à la communication. Elle est limi- tée à la production et à l'examen. Voici le paragra- phe (1) de la Règle:
Règle 464. (1) Lorsqu'un document est en la possession d'une personne qui n'est pas partie à l'action et lorsqu'on pourrait la contraindre à produire ce document à une instruction, la Cour pourra, à la demande d'une partie, après avis à cette personne et aux autres parties à l'action, prescrire la production et l'examen du document, et elle peut donner des instructions pour la préparation d'une copie certifiée qui peut être utilisée à toutes fins à la place de l'original.
Les deux autres paragraphes concernent des documents entre les mains de la Couronne et ne sont pas mis en cause dans les présentes requêtes.
Il faudrait remarquer que la Règle s'applique seulement «Lorsqu'un document est en la posses sion d'une personne qui n'est pas partie à l'action et lorsqu'on pourrait la contraindre à produire ce document à une instruction». On a soutenu que l'emploi du mot «possession» seul montre que la Règle s'applique de façon plus stricte que les Règles 448, 451 et 453 456, en vertu desquelles une partie peut être requise de communiquer des documents qui sont ou ont été «en sa possession, sous sa garde, ou son autorité» et de produire des documents qui sont «en sa possession, sous sa garde ou son autorité». Telle est la différence faite au premier abord, mais, à y réfléchir davantage, je ne crois pas que la différence soit si nette, au moins en ce qui concerne le droit de production. Il n'est, cependant, pas nécessaire de se prononcer sur ce point. La question tourne uniquement autour du sens à attribuer au mot «possession» dans la Règle 464. Aucune affaire n'a été citée en référence,
dans laquelle ledit sens aurait été discuté, et en l'absence de tout avis exprimé sur ce point, je crois que «possession» a le même sens que la «possession légale» à laquelle se réfère lord Cottenham dans Reid c. Langlois' lorsqu'il s'exprime ainsi à la page 636:
[TRADUCTION] En un sens, il [le document] est en sa posses sion; mais lorsqu'on parle de possession aux fins de production, c'est-à-dire du droit et du pouvoir de disposition, on ne vise pas la possession matérielle véritable, mais la possession légale en vertu de laquelle la partie est autorisée à disposer du bien en question.
Le mot inclut évidemment le cas le propriétaire d'un document en a la possession matérielle. A mon avis, il inclut aussi le cas le document n'est pas en la possession matérielle du propriétaire, mais en la possession ou sous la garde d'un agent ou d'un dépositaire, desquels le propriétaire a le droit de le reprendre. Je ne crois pas, cependant, qu'il inclut aussi le cas de quelqu'un qui n'est pas propriétaire du document, mais en a la garde ou la possession, car, à mon sens, la Règle exige qu'un avis de requête soit donné à la personne ayant la possession du document dans le but de fournir à la personne ayant droit audit document la possibilité de s'opposer à sa production, et ce but ne serait pas atteint si un simple gardien sans titre a seul le droit de se faire entendre.
A l'occasion d'une requête antérieure présentée dans cette affaire 2 , le juge suppléant Smith a récemment examiné le but de la Règle 464 ainsi que de la jurisprudence applicable à des règles comparables en Ontario et en Colombie-Britanni- que. Le juge suppléant Smith a fait ressortir que, dans ces provinces, les décisions rendues sur des affaires récentes ont élargi quelque peu les limites étroites apportées à la Règle par des décisions plus anciennes, lesquelles, en général, réduisaient la Règle à la production de documents spécifiques, dans le but de simplifier l'obtention de preuves à utiliser dans un procès, et empêchaient leur utilisa tion comme un moyen d'obtenir communication de la part de personnes qui ne sont pas parties à la procédure.
Appliquant les principes dégagés par la jurispru dence récente, le juge suppléant Smith a ordonné à la Banque Royale du Canada [aux pages 601-602]:
(1849) 1 Mac. & G. 627, 41 E.R. 1408, la page 1411. 2 [1977] 1 C.F. 589.
... par l'intermédiaire de ses agents, de produire tous les grands livres, dossiers, notes de service, lettres, documents et autres dossiers en la possession de la Banque Royale du Canada et d'autoriser les représentants de la défenderesse à examiner Regent Tower Estates Limited, à Hambeldon Estates Limited et à Bowlen Investments Ltd., qu'ils se trouvent, y compris et sans restreindre la généralité de ce qui précède, les 319 documents mentionnés à l'annexe A de l'avis de requête ci-joint, documents qui ont été envoyés, reçus, préparés ou établis par la Banque Royale du Canada, ses agents ou préposés au cours de leurs activités.
Beaucoup des documents en question étaient à New York et y ont été produits grâce à des ententes entre la Couronne et la banque. Mais n'ont pas été produits des documents qui seraient en la possession de The Royal Bank of Canada Trust Corporation présent appelée The Royal Bank and Trust Company), une banque de New York, dont la Banque Royale du Canada possède les actions et qui est constituée et organisée sous la loi de New York et y exerce son entreprise.
La première requête vise à obtenir la production de ces documents. Elle requiert:
[TRADUCTION) A. Une ordonnance enjoignant à la Banque Royale du Canada de se conformer à une ordonnance rendue par l'honorable juge C. Rhodes Smith, en date du 19 août 1976, en produisant, et en permettant aux représentants de la défenderesse d'examiner tous les grands livres, dossiers, rap ports, notes de service, lettres ou documents en la possession de Royal Bank of Canada Trust Corporation, afférents à Regent Tower Estates Limited, à Hambeldon Estates Limited, à Paul Dennis Bowlen et à Bowlen Investments Limited; ou
B. A titre subsidiaire, une ordonnance, rendue en application de la Règle 464 de la Cour enjoignant à la Banque Royale du Canada de produire et permettre aux représentants de la défenderesse d'examiner tous les grands livres, dossiers, rap ports, notes de service, lettres ou documents en la possession de Royal Bank of Canada Trust Corporation, afférents à Regent Tower Estates Limited, à Hambeldon Estates Limited, à Paul Dennis Bowlen et à Bowlen Investments Limited
La défenderesse a tout d'abord soutenu que la production des documents cités en référence est comprise dans l'ordonnance adressée à la Banque Royale. On a cependant admis que lesdits docu ments ne figuraient pas parmi les 319 documents auxquels renvoie l'ordonnance, et je ne crois pas qu'on puisse les considérer comme englobés dans l'expression «en la possession de la Banque Royale du Canada» utilisée dans l'ordonnance. J'ajoute- rais que, si j'étais d'avis que les documents sont en la possession de la Banque Royale, dans le sens de l'ordonnance, je considérerais comme douteuse une
procédure visant à obtenir une deuxième ordon- nance enjoignant à la même personne de produire ces documents.
La défenderesse a surtout allégué que, puisque The Royal Bank and Trust Company est une filiale possédée en propriété exclusive par la Banque Royale et qu'une directive donnée par celle-ci à celle-là serait probablement exécutée, des documents se trouvant en la possession de la com- pagnie devraient être considérés comme étant en la possession de la Banque Royale, suivant le sens de la Règle, et, en conséquence, il faudrait ordonner à la Banque Royale de les produire. L'avocat a admis que cette interprétation du champ d'applica- tion de la Règle est plus large que ce qu'a admis jusqu'ici la jurisprudence. Selon lui, l'ordonnance rendue par le juge suppléant Smith est allée plus loin que la plupart des décisions judiciaires en requérant la production de documents qui ne sont pas matériellement situés au Canada, sans requérir une identification spécifique des documents dont la production est ordonnée, et il a cherché à pousser plus loin le champ d'application de la Règle en l'interprétant comme applicable à des documents en la possession d'une compagnie contrôlée par la personne contre laquelle l'ordonnance est requise.
A mon avis, cet argument n'est pas soutenable. L'avis de requête mentionne les documents recher- chés comme étant en la possession de The Royal Bank and Trust Company. Bien que celle-ci soit une filiale possédée en propriété exclusive par la Banque Royale, elle n'est pas la Banque Royale même, mais une compagnie distincte, établie sous le régime de la loi d'un autre pays dans lequel elle exerce ses activités. Rien ne prouve que les docu ments recherchés appartiennent à la Banque Royale. Il n'a pas été prouvé non plus que The Royal Bank and Trust Company les garde à titre de dépôt pour la Banque Royale ou à titre d'agent de celle-ci. Mieux encore, toute preuve produite sur la nature des documents laisse entendre qu'ils appartiennent à The Royal Bank and Trust Com pany ou à ses clients, plutôt qu'à la Banque Royale. En conséquence, je ne crois pas qu'on puisse les considérer comme étant en la possession de la Banque Royale, au sens de la Règle.
L'avocat a cité Dallas c. Dallas 3 mais il s'agit-là d'une affaire de communication par une partie à la procédure, et le document était en sa possession. A mon avis, cette affaire n'apporte aucune aide en l'espèce.
La requête n'est donc pas justifiée et sera rejetée avec dépens.
Dans la deuxième des trois requêtes, une ordon- nance est requise pour enjoindre à la Banque Royale du Canada et National Westminster Bank Ltd.
[TRADUCTION] ... de produire et permettre aux représentants de la défenderesse d'examiner tous les grands livres, dossiers, lettres, notes de service, rapports ou documents afférents à:
1. Certaines fiducies, à savoir la fiducie Arvella Regis Bowlen, la fiducie Patrick Dennis Bowlen, la fiducie Mary Elizabeth Bowlen, la fiducie John Michael Bowlen et la fiducie William Alexander Bowlen;
2. Regent Tower Estates Limited;
3. Hambeldon Estates Limited; et
4. Bowlen Investments Ltd.
qui sont en la possession de Trust Corporation of the Bahamas
Limited ou de ses agents ou préposés ... .
Au moment de son dépôt, la requête était égale- ment dirigée contre Montreal Trust Company et Imperial Life Assurance Company of Canada, mais on s'est désisté à leur égard car lesdites compagnies ont, par la suite, disposé de certaines actions qu'elles détenaient dans une banque des Bahamas appelée Roywest Banking Corporation Limited. Les deux principaux actionnaires de cette dernière banque sont, d'une part, Royal Bank International Limited, laquelle est une compagnie constituée dans les Bahamas, appartenant, à 100 pour cent de ses parts sociales, à la Banque Royale du Canada, et, d'autre part, National Westminster Bank Limited, les deux possédant entre elles envi- ron les cinq-sixièmes des actions émises. Roywest Banking Corporation Limited possède 99.99 pour cent des actions émises de Trust Corporation of the Bahamas, laquelle est une compagnie consti- tuée dans les Bahamas pour y exercer des opéra- tions d'une société fiduciaire. On a affirmé que cette compagnie contrôle le portefeuille de place ment vendu par le demandeur Bowlen à Hambel- don Estates Limited, dans l'une des opérations contestées, qu'elle a des documents pertinents au point litigieux dans la présente action, et que,
3 (1960) 24 D.L.R. (2 e ) 746.
comme la Banque Royale et la National Westmin- ster Bank sont en réalité les propriétaires de Trust Corporation of the Bahamas, elles ont effective- ment en leur possession tous les documents qui sont en la possession de facto de la société fidu- ciaire, et qu'on devrait leur enjoindre de produire lesdits documents.
L'avocat a facilement admis que pareille ordon- nance n'a jamais été rendue jusqu'ici, mais a sou- tenu qu'il serait raisonnable qu'on enjoigne à la Banque Royale et à la National Westminster Bank de produire des documents détenus par une com- pagnie qu'elles contrôlent. Une ordonnance de ce genre rendue contre un actionnaire majoritaire ou contre plusieurs actionnaires qui, ensemble, détien- nent la majorité des actions d'une compagnie est suffisamment grosse de conséquences pour faire douter du caractère raisonnable que veut lui attri- buer l'avocat. A mon avis, la deuxième requête repose sur un fondement encore plus chancelant que la première et elle échoue pour les mêmes motifs. Je n'ai donc pas à examiner ou commenter l'objection soulevée par l'avocat de National West- minster Bank Limited, à savoir que sa cliente n'est pas présente au Canada.
La requête sera rejetée avec dépens.
La troisième requête sollicite une ordonnance: [TRADUCTION] A. Enjoignant à Arvella Regis Bowlen, Patrick Dennis Bowlen, Mary Elizabeth Jager née Bowlen, William Alexander Bowlen et John Michael Bowlen de pro- duire et permettre aux représentants de la défenderesse d'ins- pecter tous les grands livres, dossiers, rapports, notes de service, lettres ou documents afférents à Regent Tower Estates Lim ited, à Hambeldon Estates Limited et à Trust Corporation of the Bahamas, qui sont en leur possession, ou en la possession de Trust Corporation of the Bahamas Limited, de ses agents ou préposés; et
B. Enjoignant la préparation de copies conformes des docu ments susmentionnés.
L'affidavit déposé à l'appui de ladite requête révèle que les personnes y désignées sont les béné- ficiaires de fiducies dont Trust Corporation of the Bahamas Limited est le fiduciaire, que, dans chaque cas, les biens affectés à la fiducie consis tent en actions de Regent Tower Estates Limited, laquelle est une compagnie constituée aux Baha- mas et est bénéficiaire d'une fiducie dont Trust Corporation of the Bahamas est le fiduciaire et en actions de Hambeldon Estates Limited qui possède le portefeuille de placement que lui a vendu le
demandeur dans les opérations du 9 mai 1963. Voici le dernier paragraphe de l'affidavit:
[TRADUCTION] QUE je suis d'avis que des documents qui peuvent être pertinents à la présente action sont en la posses sion, sous la garde ou l'autorité d'Arvella Regis Bowlen, de Patrick Dennis Bowlen, de Mary Elizabeth Jager née Bowlen, de William Alexander Bowlen, de John Michael Bowlen, de Trust Corporation of the Bahamas, de Regent Tower Estates Limited, de Hambeldon Estates Limited, et (ou) de leurs agents ou préposés.
Il est à remarquer que, dans l'avis de requête, les noms des personnes et de Trust Corporation of the Bahamas sont mis ensemble et que la requête demande la production des «grands livres, dossiers, rapports, notes de service, lettres ou documents» en la possession de l'une quelconque d'entre elles. La requête ne spécifie pas quelles sortes de documents seraient en la possession des personnes et lesquelles en la possession de la compagnie.
Dans la mesure elle demande que soit rendue une ordonnance requérant les personnes nommées de produire «les grands livres, dossiers, rapports, notes de service, lettres ou documents» en la pos session de Trust Corporation of the Bahamas, la requête, à mon avis, échoue, sauf en ce qui con- cerne des documents qui, le cas échéant, peuvent être sous la garde matérielle ou en la possession de la compagnie mais appartiennent aux personnes nommées, pour le simple motif que les personnes ne peuvent pas être requises, sous le régime' de la Règle 464, de produire des documents qui ne sont pas en leur possession.
En ce qui concerne les documents en la posses sion des personnes nommées, dans le sens de la Règle 464, leur avocat reconnaît qu'elles ont reçu des rapports envoyés par le fiduciaire, i.e. Trust Corporation of the Bahamas, et qu'elles ne s'oppo- sent pas à une ordonnance leur enjoignant de produire lesdits rapports ainsi que tous autres documents qu'elles ont reçus de Trust Corporation of the Bahamas relativement à leurs relations avec Regent Tower Estates Limited et Hambeldon Estates Limited. Cependant, à part ces rapports et documents, il n'est pas évident, sur le fondement des éléments dont je dispose, qu'elles aient en leur possession des «grands livres, dossiers, rapports, notes de service, lettres ou documents» afférents aux trois compagnies énumérées dans l'avis de requête.
Dans Rhoades c. Occidental Life Insurance Company of California 4 le juge d'appel McFar- lane a ainsi précisé [aux pages 628-629] les restric tions à apporter au champ d'application des ordon- nances rendues sous le régime d'une règle correspondante de la Colombie-Britannique:
[TRADUCTION] J'admets que, lorsque le tribunal ou le juge examinent une requête sous le régime de la Règle, ils ne devraient pas permettre d'utiliser celle-ci dans le seul but d'obtenir communication par une personne qui n'est pas partie au procès. Ce serait une «recherche à l'aveuglette» c'est-à-dire une tentative visant à déterminer si cette personne est ou non en possession d'un document dont la production pourrait être demandée à l'audience et à déterminer dans ce cas la nature du document. Si une telle recherche à l'aveuglette est interdite, c'est parce que le Règle envisage une demande relative à un document déterminé et une ordonnance concernant la produc tion et l'examen de ce document. Par conséquent, il faut montrer à la Cour ou au juge que le tiers à l'action est en possession d'un tel document avant de pouvoir décerner une ordonnance visant la production du document. Je ne pense pas cependant que la précision de la description du document demandé doit être telle qu'on puisse l'identifier parmi d'autres documents.
A mon avis, la présente requête a pour but la communication de documents par des personnes qui ne sont pas parties au procès. Elle ne se limite pas à des documents spécifiques, ni à ceux dont il est prouvé qu'ils sont en la possession des person- nes contre lesquelles l'ordonnance est sollicitée, ni même à des documents dont l'existence a été démontrée.
En résumé, une ordonnance sera rendue pour enjoindre la production, par les personnes nom- mées, des rapports et documents susmentionnés qu'elles ont reçus de Trust Corporation of the Bahamas. Sous tous les autres rapports, la requête sera rejetée. Les personnes nommées auront droit aux dépens de la requête. Entre les parties à l'action, les dépens de la requête suivront l'issue de la cause.
[1973] 3 W.W.R. 625.
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