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T-2365-77
Stephen Chitty, Dorothia Atwater, Wayne Kerr, Sharron Lang, David Coulson, Ulla Sorrenson, Peter Hay et la Ligue canadienne de la radiodiffu- sion (Demandeurs)
c.
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommu- nications canadiennes (Défendeur)
Division de première instance, le juge Dubé— Toronto, le 17 octobre; Ottawa, le 25 octobre 1977.
Pratique Demande pour joindre en qualité de partie défenderesse Droits légitimes touchés par la décision Opposition parce que cela peut retarder la décision Les demandeurs suggèrent que les requérantes soient désignées comme parties intervenantes Aucune règle ne peut obliger les requérantes à devenir parties intervenantes Demande accueillie Règle 1716 de la Cour fédérale.
Il s'agit d'une demande en vue d'obtenir une ordonnance pour joindre les deux requérantes en qualité de parties défende- resses à l'action. Les parties à l'action se sont entendues pour présenter un mémoire spécial des points à décider. Les requé- rantes soutiennent que le redressement déclaratoire recherché porterait sérieusement atteinte à leurs droits légitimes. Cepen- dant, les demandeurs s'opposent à l'adjonction des requérantes comme parties défenderesses parce que cette adjonction retar- derait l'affaire qui est sur le point d'être jugée, et plutôt, suggèrent que les requérantes soient désignées comme parties intervenantes dans l'exposé des points.
Arrêt: la demande est accueillie. Les réponses aux questions mentionnées pourraient rapidement fondre en présence des intérêts réels des requérantes. Il serait manifestement injuste de permettre la contestation des droits des requérantes, et possible- ment les diminuer en l'absence des titulaires de licences. La proposition des demandeurs de joindre les requérantes comme parties intervenantes, qui peut être une économie de temps, ne peut pas être imposée aux requérantes qui ne souhaitent pas d'être jointes comme parties intervenantes et d'être liées par une décision à laquelle elles n'auraient pas été jointes comme parties à part entière. En outre, il n'existe pas de Règle qui obligerait les requérantes de devenir parties intervenantes contre leur volonté.
Arrêt appliqué: Ciba Corp. and American Cyanamid Co. c. Decorite IGAV (Canada) Ltd. (1971) 2 C.P.R. (29 124. Arrêt appliqué: Canamerican Auto Lease & Rental Ltd. c. La Reine T-4780-76.
DEMANDE. AVOCATS:
A. Roman pour les demandeurs. J. Johnson pour les défendeurs. R. Blair pour les requérantes.
PROCUREURS:
Andrew J. Roman, Centre pour la promotion de l'intérêt public, Ottawa, pour les deman- deurs.
John M. Johnson, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, pour les défendeurs.
Minden, Gross, Grafstein & Greenstein, Toronto, pour les requérantes.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE DUBÉ: Il s'agit d'une demande en vue d'obtenir une ordonnance pour joindre Western Cable Limited et M.S.A. Cablevision Limited en qualité de parties défenderesses à la présente action.
L'action a été intentée par des membres d'une association communautaire en vue d'obtenir une déclaration portant que la Loi sur la radiodiffu- sion' ne permet pas au CRTC de prendre une décision «au sujet de demandes pour le transfert du contrôle» portant sur des licences de télévision par câble. Les parties à l'action se sont entendues pour exposer dans un mémoire spécial des points à décider conformément à la Règle 475. Les six points présenté à la Cour se lisent comme suit:
[TRADUCTION] 1. Les demandeurs remplissent-ils les condi tions pour intenter la présente action?
2. La Loi sur la radiodiffusion donne-t-elle au CRTC le pou- voir d'inclure dans la licence une condition voulant que ale transfert du contrôle effectif du titulaire de la licence doit être autorisé par le Conseil»?
3. S'il est répondu par l'affirmative à la question précédente, la condition a-t-elle été valablement imposée ou établie?
4. Dans le cas de titulaires de licence qui sont constitués par corporation, la Loi sur la radiodiffusion confère-t-elle le pou- voir au CRTC d'autoriser ou de permettre le transfert du contrôle effectif de ces titulaires de licence au moyen du transfert de leurs actions?
5. S'il est répondu par la négative à la question précédente, l'audition par le CRTC d'une demande de transfert, au moyen de la vente d'actions, du contrôle effectif d'une corporation titulaire d'une licence de radiodiffusion, a-t-elle pour effet, dans le contexte de la Loi sur la radiodiffusion, de provoquer en droit l'abandon et la révocation de la licence actuelle?
6. Les mesures prises par le CRTC en l'espèce ont-elles porté atteinte d'une manière illégale aux droits des demandeurs ou à l'un d'entre eux?
' S.R.C. 1970, c. B-11.
Dans son affidavit à l'appui de cette demande, le président des deux compagnies requérantes résume lesdites allégations, lesquelles ne sont pas mises en doute:
«Western> exploite un réseau de télévision par câble à New Westminster et Surrey (C.-B.), et «M.S.A.» exploite un autre réseau à Abbotsford et Matsqui (C.-B.), les deux réseaux sont exploités conformément à une licence accordée par le CRTC. M.S.A. est une filiale exclusive de Western.
Le 19 octobre 1976, les deux requérantes ont déposé une requête en vue d'obtenir l'autorisation de transférer le contrôle des deux compagnies à Maclean-Hunter. Les demandeurs sont intervenus et ont fait opposition à la requête. Après audition, le CRTC a repoussé la requête.
L'auteur de l'affidavit soutient que le redresse- ment déclaratoire recherché par les demandeurs, s'il était accordé, porterait sérieusement atteinte aux droits légitimes des requérantes, car il aurait pour résultat de rouvrir la question et de soumettre leurs licences à la contestation des demandeurs et d'autres personnes, même si les licences n'étaient pas expirées.
Le paragraphe final de la déclaration, laquelle s'étend davantage sur le sujet que dans les points présentés devant la Cour, est libellé comme suit:
[TRADUCTION] 12. En conséquence les demandeurs récla- ment:
a) une déclaration portant que la Loi sur la radiodiffusion ne permet pas au CRTC d'entendre et de prendre une décision quant aux »demandes pour le transfert du contrôle» concer- nant des licences de télévision par câble au moyen de requê- tes pour le transfert du contrôle des compagnies titulaires des licences;
b) une déclaration portant que si le Conseil n'a aucune juridiction pour entendre la question, elle devrait être consi- dérée comme une requête pour la révocation d'une licence jointe à une requête pour une nouvelle licence dans le même territoire;
c) une déclaration portant que nonobstant le refus d'accor- der une licence à Maclean-Hunter, la requête pour la révoca- tion se trouve encore devant le Conseil et Lower Fraser Valley Committee for Community-Based Cablevision Ser vices a, autant que toute autre personne, le droit de formuler une requête et d'être entendu par le CRTC concernant les licences pour les territoires de New Westminster/Surrey, et Abbotsford/ Clea rbrook;
d) à titre subsidiaire à l'alinéa c) précédent, une déclaration portant que si et lorsque l'actuel titulaire de la licence ne désire plus exploiter son entreprise de câble, le Lower Fraser
Valley Committee for Community-Based Cablevision Servi ces a, autant que toute autre personne, le droit d'introduire une requête et d'être entendu par le CRTC au sujet des licences pour les territoires de New Westminster/Surrey, et Abbotsford/Clearbrook;
e) tout autre redressement qui semble juste à la présente cour.
Le CRTC ne s'oppose pas à cette requête. Les demandeurs consentiraient à ce que les requéran- tes se joignent comme parties intervenantes dans l'exposé des points, mais s'opposent à leur adjonc- tion comme parties défenderesses, surtout parce que cette adjonction retarderait indûment une affaire qui est sur le point d'être jugée.
La Règle 1716 de la Cour fédérale prévoit que la Cour peut à tout stade joindre une personne comme partie (défenderesse) si cela est nécessaire pour s'assurer qu'il sera effectivement statué sur toutes les questions en litige. Cependant, une per- sonne cherchant à être partie à l'instance doit prouver que certains de ses droits reconnus par la loi pourraient être touchés par l'issue de l'affaire.
Citant la Règle 1716, mon collègue Walsh a déclaré dans Ciba Corp. and American Cyanamid Co. c. Decorite IGAV (Canada) Ltd. 2 :
Généralement, l'adjonction de parties est autorisée surtout lorsque la partie que l'on veut s'adjoindre comme demanderesse y consent [Règles de la Cour fédérale C.P. 1971-20, DORS 71-68] voir Règles 1715 et 1716, et, plus particulièrement, la Règle 1716(2)b) que voici:
1716. (2) La Cour peut, à tout stade d'une action, aux conditions qu'elle estime justes, et soit de sa propre initiative, soit sur demande,
b) ordonner que soit constituée partie une personne qui aurait être constituée partie ou dont la présence devant la Cour est nécessaire pour assurer qu'on pourra valable- ment et complètement juger toutes les questions en litige dans l'action et statuer sur elles;
toutefois, nul ne doit être constitué codemandeur sans son consentement notifié par écrit ou de telle autre manière que la Cour peut juger adéquate dans les circonstances.
et il est de fait souhaitable que quiconque dont les droits pourraient être affectés par le jugement soit constitué partie à l'instance (voir International Minerals and Chemical Corpora tion c. Potash Company of America et autres, 43 C.P.R. 157, 47 D.L.R. (2d) 324, [1965] R.C.S. 3).
Dans la décision International Minerals le juge Cartwright discute deux interprétations différentes concernant la jonction de parties. L'interprétation
2 (1971) 2 C.P.R. (2e) 124.
large est [TRADUCTION] «que la règle donne un pouvoir étendu à la Cour pour joindre toute partie qui a une réclamation en relation avec l'objet de l'action». «L'interprétation étroite» est que le pou- voir est [TRADUCTION] «enserré par des restric tions». L'interprétation étroite limite les pouvoirs à trois catégories d'affaire y compris [TRADUCTION] «dans le cas les droits de propriété de l'interve- nant sont directement atteints par les procédures».
De nouveau, les points présentés à la Cour dans l'exposé sont moins directs que le redressement recherché dans la déclaration. Le paragraphe 12 de la déclaration traite de licences particulières de télévision par câble, lesquelles se trouvent être des licences détenues par les requérantes. Les points présentés devant la Cour sont plus théoriques et peuvent s'appliquer à des situations identiques pouvant se présenter ailleurs, mais il ne faut pas s'attendre à ce que la Cour se limite à des faits hypothétiques et s'amuse tout simplement avec des concepts irréels. Les réponses à ces questions pour- raient rapidement fondre en présence des intérêts réels des requérantes.
Évidemment,, les titulaires de licences de radio- diffusion ont des droits et si cette affirmation avait besoin d'être confirmée elle l'a été en 1971 dans la décision de la Cour suprême dans Confederation Broadcasting (Ottawa) Ltd. c. Canadian Radio - Television Commission'. Il serait manifestement injuste de permettre la contestation de ces droits, et possiblement les diminuer en l'absence des titu- laires de licences.
La proposition des demandeurs de joindre les requérantes comme parties intervenantes, qui peut être une économie de temps, ne peut pas être imposée aux requérantes. Comme l'a déclaré mon collègue Addy dans Canamerican Auto Lease & Rental Limited c. La Reine 4 , les Règles de la Cour fédérale, sauf dans les dispositions traitant de juri- diction d'amirauté, ne prévoient pas spécifique- ment cette procédure. Cependant le savant juge a autorisé cette procédure, dans les circonstances de cette affaire le requérant l'avait demandé et avait convenu d'être lié par les conclusions de l'action principale, «pour éviter une multiplicité
3 [1971] R.C.S. 906.
4 du greffe T-4780-76, rendu public le 25 avril 1977. [Motifs de l'ordonnance non communiqués—Ed.]
des procédures et des conclusions contradictoires sur les mêmes faits.»
Les requérantes dans la présente requête ne souhaitent pas d'être jointes comme parties inter- venantes et d'être liées par une décision à laquelle elles n'auraient pas été jointes comme parties à part entière. Même si j'en avais l'intention, et je ne l'ai pas, je ne vois pas en vertu de quelle règle je serais obligé de demander aux requérantes de devenir parties intervenantes contre leur volonté.
Je suis donc d'avis qu'il est nécessaire, afin d'assurer que l'action soit effectivement et complè- tement jugée, que les deux requérantes soient join- tes comme parties défenderesses dans cette action.
ORDONNANCE
IL EST PAR LES PRÉSENTES ORDONNÉ que Western Cable Limited et M.S.A. Cablevision Limited soient jointes comme parties défenderesses dans cette action. Dépens à suivre l'issue de la cause.
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