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T-3100-80
Canadian Javelin Limited (Requérante) c.
R. S. MacLellan, c.r., et la Commission sur les pratiques restrictives du commerce (Intimés)
Division de première instance, le juge Mahoney— Ottawa, 14 et 20 octobre 1980.
Brefs de prérogative Demande de brefs de prohibition et de certiorari qui annuleraient les ordonnances signées par l'intimé membre de la Commission et nommant un autre membre et une personne qui ne siégeait pas à celle-ci en remplacement du signataire Un bref de mandamus qui ordonnerait une nouvelle comparution des témoins a été égale- ment demandé La requérante a fait valoir que l'intimé MacLellan, qui avait été régulièrement désigné, avait illégale- ment délégué ses pouvoirs Il fallait déterminer si des voies de recours étaient ouvertes Demande rejetée Loi sur les corporations canadiennes, S.R.C. 1970, c. C-32, modifiée par S.R.C. 1970 (P' Supp.), c. 10, art. 114(10).
L'intimé R. S. MacLellan a été désigné par le vice-président de la Commission intimée, L.-A. Couture, comme la personne devant qui devait comparaître le président de la requérante en vertu du paragraphe 114(10) de la Loi sur les corporations canadiennes. L'intimé a par la suite signé une ordonnance autorisant Couture à agir à sa place, et une autre ordonnance nommant H. H. Griffin, qui ne siégeait pas à la Commission, comme la personne devant qui devait comparaître le président de la requérante. Celle-ci fait valoir que MacLellan, qui avait été régulièrement désigné, a illégalement délégué ses pouvoirs à Couture et à Griffin. Elle demande un bref de prohibition et un bref de certiorari annulant ces deux ordonnances et les témoi- gnages recueillis devant Couture et Griffin; elle sollicite égale- ment un bref de mandamus ordonnant une nouvelle comparu- tion des témoins qui ont comparu devant ces derniers dans ces circonstances.
Arrêt: la demande est rejetée. La requérante cherche à se prévaloir d'un recours qui est inconnu en droit canadien et elle n'a pas, en tout état de cause, qualité pour agir. Le droit de contester les ordonnances de délégation appartient à ceux qui sont sommés de comparaître et de témoigner, c'est-à-dire aux témoins, et non à la requérante. Quant au recours, même dans l'hypothèse les témoignages auraient été illégalement recueillis, question que je ne trancherai pas, rien en droit canadien ne permet à un tribunal de rendre une ordonnance de suppression de témoignages au cours d'un examen.
REQUÊTES. AVOCATS:
M. L. Phelan et P. S. Bonner pour la requérante.
D. Scott, c.r. et J. B. Carr -Harris pour les intimés.
PROCUREURS:
Herridge, Tolmie, Ottawa, pour la requé-
rante.
Scott & Aylen, Ottawa, pour les intimés.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE MAHONEY: Les affairés et la gestion de la requérante, ci-après appelée «Canadian Jave lin», font l'objet d'un examen en vertu de l'article 114 de la Loi sur les corporations canadiennes'. Pendant plusieurs semaines, des dépositions ont été recueillies en vertu du paragraphe 114(10). Ce paragraphe est ainsi rédigé:
114... .
(10) Sur demande ex parte de l'inspecteur, ou de sa propre initiative, un membre de la Commission peut ordonner que toute personne résidant ou présente au Canada soit entendue sous serment ou produise tous livres, pièces, documents ou registres à lui-même ou à toute autre personne nommée à cette fin par ordre de ce membre, et le membre ou l'autre personne nommée par lui peut rendre toutes ordonnances qui lui sem- blent nécessaires pour assurer la comparution de ce témoin et son interrogatoire ainsi que la production par lui de tous livres, pièces, documents ou registres; et il peut exercer, en vue de la mise en oeuvre de ces ordonnances ou de la sanction prévue pour y avoir contrevenu, tous les pouvoirs qu'une cour supé- rieure, au Canada, exerce pour la mise en oeuvre des subpoenas aux témoins ou la sanction prévue pour y avoir contrevenu.
Canadian Javelin se plaint de deux situations rela tives aux dépositions de la plupart de ces témoins. Ces situations se sont, dit-on, notamment présen- tées à propos de Raymond Balestreri, président de Canadian Javelin.
Le 21 mars 1980, par des ordonnances signées par L.-A. Couture, vice-président de la Commis sion intimée, ci-après appelée «la Commission», Balestreri et d'autres ont été sommés de comparaî- tre devant R. S. MacLellan, intimé à l'instance et membre de la Commission, au jour, à l'heure et au lieu indiqués et [TRADUCTION] «tous les jours qui suivront si on le leur demande». Le 9 avril, MacLellan a, à l'intention de Couture, signé une ordonnance qui, après avoir fait état des ordonnan- ces du 21 mars, énonçait ce qui suit:
[TRADUCTION] Je vous nomme maintenant, en application de l'article 114(10) de ladite Loi, comme la personne devant qui comparaîtront les personnes suivantes: MM. ... Balestreri ... conformément aux ordonnances du 21 mars 1980, mais en remplacement du soussigné.
' S.R.C. 1970, c. C-32, modifiée par S.R.C. 1970 (le' Supp.), c. 10.
Le 18 avril, MacLellan a signé une autre ordon- nance, adressée à H. H. Griffin, qui n'est pas membre de la Commission, par laquelle il a, dans les mêmes termes, désigné ce dernier comme la personne devant qui Balestreri devait comparaître conformément à l'ordonnance du 21 mars. La première situation serait donc celle-ci: MacLellan, à l'évidence, a été régulièrement désigné comme la personne devant qui devait comparaître Balestreri, mais selon Canadian Javelin, il a illégalement délégué ses pouvoirs à Couture, un membre de la Commission, et à Griffin, qui n'y siège pas.
Je ne parviens pas à distinguer la deuxième situation soulevée par Canadian Javelin de celle concernant la délégation par MacLellan à Couture décrite ci-dessus; je suppose qu'elle n'a pas remar- qué que la délégation par Couture à Griffin, datée du 20 mai 1980, se rapportait à une nouvelle ordonnance du 15 mai, par laquelle Balestreri a été sommé de comparaître devant Couture, et non à l'ordonnance initiale du 21 mars lui enjoignant de comparaître devant MacLellan. Compte tenu des éléments de preuve, il m'est impossible de conclure que la deuxième situation, celle un membre de la Commission aurait délégué les pouvoirs apparte- nant à un autre membre, a effectivement eu lieu.
Canadian Javelin demande un bref de prohibi tion et un bref de certiorari annulant les ordonnan- ces qui ont substitué Couture et Griffin à MacLel- lan et Couture et annulant les témoignages recueillis devant Couture et Griffin; elle sollicite également un bref de mandamus enjoignant à la Commission de provoquer une nouvelle comparu- tion des témoins qui ont comparu devant Couture et Griffin dans ces circonstances.
Je trouve inutile de déterminer si les prétendues ordonnances de délégation sont valides ou non. A cette question, la Commission pourra obtenir une réponse si jamais elle a à faire exécuter une ordon- nance de comparution à l'encontre d'un témoin qui la conteste. La demande sera rejetée parce que Canadian Javelin cherche à se prévaloir d'un recours qui est inconnu en droit canadien et qu'elle n'a pas, en tout état de cause, qualité pour agir.
Sur ce dernier point, le droit de contester les ordonnances de délégation appartient à ceux qui sont sommés de comparaître et de témoigner, c'est-à-dire aux témoins, et non à Canadian Jave-
lin. Quant au recours, même dans l'hypothèse les témoignages auraient été illégalement recueil- lis, question que je ne trancherai pas, rien en droit canadien ne permet à un tribunal de rendre une ordonnance de suppression de témoignages au cours d'un examen.
JUGEMENT
La demande est rejetée avec dépens.
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