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T-5250-80
British American Bank Note Company Limited (appelante)
c.
Bank of America National Trust and Saving Asso ciation, B A Cheque Corporation et B.A. Financial Services Limited' (intimées)
Division de première instance, juge Cattanach— Ottawa, 19 mai, 2, 3, 4 juin 1982; 2 mars 1983.
Marques de commerce Appel d'une décision du regis- traire refusant l'enregistrement d'une marque de commerce utilisée en rapport avec des services d'imprimerie très spéciali- sés Le registraire a décidé que la marque n'était pas distinctive et créait de la confusion étant donné que les inti- mées avaient employé antérieurement des marques de com merce ou des noms commerciaux semblables Les activités au Canada de la première intimée consistent principalement à commercialiser des chèques de voyage La marque de l'ap- pelante crée-t-elle de la confusion avec une marque ou un nom employés ou révélés antérieurement au Canada par les inti-
mées? C'est au requérant de l'enregistrement de la marque qu'il incombe en tout temps de prouver qu'il y a droit et qu'il est peu probable que la marque crée de la confusion L'opposant alléguant l'emploi antérieur doit prouver que sa réputation est établie dans le commerce sous une appellation avec laquelle la marque pourrait créer de la confusion Le fardeau de la preuve qui incombe â l'opposant peut être déplacé Un commerçant ne peut s'approprier comme nom commercial des mots généraux décrivant l'activité poursuivie par son entreprise Les mots généraux indiquent les objets de l'entreprise mais sont rendus distinctifs par l'emploi d'un signe caractéristique L'appelante a renoncé à tous les mots apparaissant dans la marque ce qui laisse seulement les lettres
Il n'en demeure pas moins que c'est comme un tout qu'il faut examiner la marque de commerce quant à la possibilité de confusion L'opposition présentée par la deuxième et la troisième intimées est rejetée parce que la date du premier emploi de la marque par l'appelante est antérieure au début des opérations au Canada de la deuxième intimée et de la constitution de la troisième L'art. 29 ne requiert qu'une simple déclaration au sujet de la date du premier emploi La marque de commerce de l'appelante pourrait-elle mener à la conclusion que les services offerts par celle-ci sont fournis par la même personne que celle qui produit les chèques de voyage sur lesquels la marque de la première intimée paraît?
Une marque ne comportant que des lettres est une 'marque faible» L'étendue de sa protection devrait être plus limitée Une différence assez minime suffira à éviter la confusion Les risques de confusion probable avec la marque de la première intimée diminuent du fait qu'elle est utilisée avec une autre marque Les chèques de voyage s'adressent aux gens qui voyagent tandis que l'appelante fournit ses services d'im- primerie très spécialisés à des groupes qui la connaissent
' L'orthographe adoptée ci-dessus dans le nom commercial des intimées est celle qui revient le plus souvent; toutefois, il faut noter qu'elle varie dans les pièces produites.
Appel accueilli Une marque de commerce ne doit être employée que pour distinguer les services du propriétaire de cette marque même s'il existe une compagnie connexe Rejet du concept de l'«organisation unique» mentionné par le juge Angers dans l'arrêt Good Humor à moins qu'il n'existe une société Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, chap. T-10, art. 2, 6, 16, 29, 37(2)b),c),d),(9) (mod. par S.C. 1976-77, chap. 28, art. 44), 49 Règlement sur les marques de commerce, C.R.C., chap. 1559, annexe II, formule 1.
Contrôle judiciaire Appels prévus par la loi Appel d'une décision du registraire refusant l'enregistrement d'une marque de commerce parce qu'elle n'est pas distinctive et qu'elle crée de la confusion étant donné l'emploi antérieur par les intimées de marques et de noms commerciaux semblables Nonobstant la Loi, la Cour suprême a établi dans l'arrêt Rowntree que la Cour fédérale ne peut renverser la décision rendue par le registraire dans l'exercice de son pouvoir discré- tionnaire que si celui-ci a agi en se fondant sur un principe erroné ou qu'il n'a pas exercé son pouvoir de façon judiciaire En se prononçant sur la probabilité de confusion, le regis- traire tranche une question de fait, il n'exerce pas son pouvoir discrétionnaire La Cour peut donc infirmer sa décision Appel accueilli Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, chap. T-10, art. 2, 6, 16, 37(2)b),c),d).
Appel a été interjeté de la décision du registraire des mar- ques de commerce par laquelle il a rejeté la demande d'enregis- trement de la marque de commerce THE B A BANK NOTE GROUP présentée par l'appelante. L'appelante imprime des documents très spécialisés selon un procédé de gravure sur métal. Elle était l'une des sept compagnies constituant The B A Bank Note Group (le groupe). Pendant de nombreuses années, l'appelante a inscrit sur ses imprimés différentes variantes de son nom corporatif, mais sans emploi constant ni uniforme de ces inscriptions; toutefois, depuis le 1 » ' janvier 1973, elle emploie la marque en question comme marque de commerce en liaison avec ses services d'imprimerie. Les trois intimées se sont opposées à la demande d'enregistrement. La première intimée, Bank of America National Trust and Saving Association (BANTSA) a été constituée aux États-Unis. Elle est le proprié- taire inscrit aux États-Unis d'une marque de commerce com- portant les lettres «BA» sous une forme stylisée; cette marque de commerce paraissait avec d'autres marques sur les chèques de voyage «Bankamerica». La commercialisation de ces chèques de voyage représentait l'essentiel et, peut-être même la totalité, des affaires de BANTSA au Canada même si elle a décrit ses objets comme étant ceux d'une «banque nationale offrant une gamme de services complets». La deuxième intimée, B A Cheque Corporation (BACC), également constituée aux États- Unis, s'occupait de la «commercialisation, de la distribution et du traitement» des chèques de voyages émis par BANTSA, mais elle ne s'est lancée dans ces activités au Canada que bien après le début de l'année 1973. B.A. Financial Services Limited (BAFSL) s'occupait de prêts d'argent. Elle a été constituée au Québec en 1974, et comme BANTSA, elle est une filiale de Bank American Corporation. Le registraire a maintenu l'oppo- sition pour les deux motifs avancés par les intimées savoir, la marque de commerce en cause ne distingue pas véritablement les marchandises ou les services de l'appelante parce que les intimées ont employé antérieurement, au Canada, des marques de commerce et des noms commerciaux semblables mais non enregistrés, et l'appelante n'est pas la personne ayant droit à
l'enregistrement de la marque parce que celle-ci crée de la confusion avec les marques et noms employés antérieurement par les intimées.
Arrêt: l'appel devrait être accueilli.
La principale question consiste à déterminer si la marque de commerce en cause crée de la confusion avec une marque de commerce ou un nom commercial antérieurement employés ou révélés au Canada par les intimées. L'appelante a prétendu que lorsque l'opposition à une demande d'enregistrement est fondée sur l'emploi antérieur d'une marque de commerce ou d'un nom commercial qui pourraient être confondus avec la marque du requérant, il incombe à l'opposant de prouver qu'il a acquis une certaine notoriété liée à une dénomination dans le même domaine d'activité que celui de la marque du requérant. Toute- fois, cette façon de voir simplifie trop les choses. Le requérant a la responsabilité de prouver qu'il a droit à l'enregistrement et, par conséquent, qu'il est peu probable que la marque crée de la confusion. Cette responsabilité ne passe jamais du requérant à une autre personne; il s'agit donc d'une obligation. Par contre, l'opposant qui fonde son objection sur l'emploi antérieur n'a que le fardeau de la preuve: il doit prouver que sa réputation est établie sous une appellation qui pourrait éventuellement être confondue, mais ce fardeau peut être renversé. Le requérant peut réfuter la preuve présentée par l'opposant.
Lorsqu'il choisit un nom commercial, le commerçant ne peut s'approprier pour son usage personnel des mots généraux décri- vant l'activité de son entreprise. Les mots généraux servent à indiquer les buts et objets du commerçant; il faut cependant donner un caractère distinctif au nom commercial en ajoutant un signe caractéristique aux mots généraux.
Le registraire a fait rejeter par l'appelante les mots THE, BANK, NOTE, et GROUP comme faisant partie du domaine public des mots accessibles à tous les commerçants, ce qui laissent seulement les lettres «B» et «A». Il n'en demeure pas moins que c'est comme un tout qu'il faut examiner la marque de commerce pour déterminer si elle peut créer de la confusion avec d'autres marques de commerce.
Étant donné la date à laquelle l'appelante a commencé à employer sa marque de commerce, l'opposition de BACC et de BAFSL ne peut être retenue. BACC n'a commencé ses activités au Canada et BAFSL n'a été constituée qu'après cette date. Par conséquent, elles n'ont pu employer au Canada leurs noms commerciaux «B.A. Financial Services Limited» et «B A Cheque Corporation» avant que l'appelante emploie sa marque pour la première fois. On pourrait également affirmer que BACC et BAFSL n'ont ni employé ni fait connaître de marque de commerce comportant les lettres «B avant cette date. Le membre du comité d'opposition qui a procédé à l'audition a soulevé la question de savoir si l'appelante avait satisfait aux exigences de l'article 29 en ce qui concerne la date du premier emploi; néammoins, l'article 29 oblige seulement le requérant à produire une simple déclaration à ce sujet et aucun affidavit prouvant l'exactitude des renseignements fournis n'est néces- saire; l'appelante en l'espèce a fourni la déclaration requise.
En ce qui concerne l'opposition de BANTSA, le litige se ramène dans ce cas à déterminer si la marque de commerce de l'appelante, employée à l'égard de services d'imprimerie très spécialisés, peut mener à la conclusion que ces services sont fournis par la même personne que celle qui produit les chèques de voyage portant les lettres «BA».
Une marque de commerce comportant seulement des lettres de l'alphabet non accompagnées de signes particuliers est dépourvue de caractère distinctif propre. C'est une «marque faible» et la protection à lui donner ne devrait pas être aussi étendue que celle d'une marque exclusive. Une différence assez minime dans cette marque faible suffira pour éviter la confu sion et on peut s'attendre à plus de discernement de la part du public face à une telle marque.
Les lettres «BA» sont imprimées en jaune plus foncé dans le papier jaune pâle des chèques de voyage de BANTSA et forment un fond discret. Elles paraissent également mais en très petits caractères sur les bords et dans les coins des chèques. D'autres mots sont en évidence: «Bankamerica Travelers Cheque» sur certains chèques et «Bank of America» sur des chèques émis antérieurement. Bien que l'inscription addition- nelle «B of A Travelers Cheque» paraisse sur certains chèques, elle est écrite en caractères beaucoup plus petits que ceux des mots en évidence. L'emploi des caractères «BA» est donc subor- donné à celui de la marque de commerce «Bankamerica», et une telle subordination d'une marque à une autre qui apparaît simultanément fait perdre de l'importance à la marque «BA».
En outre, le paragraphe 6(5) de la Loi oblige la Cour à tenir compte du genre de services auxquels s'appliquent les marques de commerce pouvant créer de la confusion. Ainsi, les chèques de voyage commercialisés par BANTSA s'adressent au large groupe des gens qui voyagent. Par ailleurs, l'appelante fournit des services d'imprimerie très spécialisés à certains groupes de techniciens et de professionnels qui savent précisément avec qui ils font affaire.
Par conséquent, la confusion à laquelle BAFSL s'oppose n'existe pas.
Le pouvoir que la Cour possède d'infirmer une décision du registraire pourrait être mis en doute si la décision de la Cour portait sur un point relevant du pouvoir discrétionnaire du registraire. Bien que la Loi dispose que la Cour peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi, la Cour suprême du Canada a établi dans l'arrêt Rowntree que la Cour ne peut substituer son opinion à celle du registraire que lorsque celui-ci a exercé son pouvoir discrétionnaire en se fondant sur un principe erroné ou qu'il ne l'a pas exercé de façon judiciaire. Toutefois, lorsque le registraire se prononce sur la possibilité de confusion, il tranche une question de fait mais n'exerce pas un pouvoir discrétionnaire. La Cour est donc habilitée à renverser
sa décision sur ce point. -
L'appelante doit prendre des précautions pour empêcher que sa marque de commerce perde ses caractéristiques distinctives. Une marque de commerce ne doit être employée que pour distinguer les services de son propriétaire. Il est possible que les six autres compagnies faisant partie du groupe deviennent des usagers inscrits de la marque de commerce de l'appelante ou qu'elles soient liées par contrat avec l'appelante pour solliciter en son nom des contrats d'impression et les effectuer; toutefois, en dehors de telles possibilités, l'emploi d'une marque de com merce pour les services d'une compagnie autre que celle de son propriétaire constitue une infraction, même si l'usager est une filiale du propriétaire de la marque ou une compagnie connexe. Il n'y a pas lieu d'appliquer le concept de l'«organisation unique», mentionné par le juge Angers dans l'arrêt Good Humor à moins que les sept compagnies du groupe fassent
partie d'une société; cependant, dans un tel cas, c'est la société qui aurait présenté la demande d'enregistrement et non pas simplement l'appelante.
JURISPRUDENCE
DÉCISION APPLIQUÉE:
Silhouette Products Limited v. Prodon Industries Ltd., [1965] 2 R.C.É. 500.
DÉCISION ÉCARTÉE:
Good Humor Corporation of America v. Good Humor Food Products Limited et al., [1937] R.C.E. 61. DISTINCTION FAITE AVEC:
Rowntree Company Limited v. Paulin Chambers Com pany Limited, [1968] R.C.S. 134.
DÉCISIONS EXAMINÉES:
Re W & G du Cros Ltd.'s Application (1913), 30 R.P.C. 660 (H.L.); Benson & Hedges (Canada) Limited v. St. Regis Tobacco Corporation, [1969] R.C.S. 192. DÉCISIONS CITÉES:
Office Cleaning Services, Ld. v. Westminster Window and General Cleaners, Ld. (1946), 63 R.P.C. 39 (H.L.) confirmant (1944), 61 R.P.C. 133 (C.A.); Eno v. Dunn (1890), 15 App. Cas. 252 (H.L.).
AVOCATS:
P. D. Blanchard pour l'appelante. R. D. Gould pour les intimées.
PROCUREURS:
Gowling & Henderson, Ottawa, pour l'appe-
lante.
Smart & Biggar, Ottawa, pour les intimées.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE CATTANACH: La Cour est saisie d'un appel d'une décision du registraire des marques de commerce, datée du 18 septembre 1980. Celui-ci agissant par l'intermédiaire d'un membre d'un comité d'opposition, comme le paragraphe 37(9) de la Loi sur les marques de commerce [S.R.C. 1970, chap. T-10, mod. par S.C. 1976-77, chap. 28, art. 44] l'autorise à le faire, a rejeté la demande d'enregistrement de la marque de com merce THE B A BANK NOTE GROUP présentée par l'appelante.
En rendant cette décision, le registraire a main- tenu l'opposition des trois intimées pour le double motif suivant:
(1) la marque de commerce pour laquelle une demande était présentée ne distinguait pas vérita- blement les services de l'appelante;
(2) la requérante (l'appelante en l'espèce) n'était pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce.
Le registraire a, en fait, invoqué les motifs d'opposition exposés aux alinéas 37(2)c) et d) de la Loi sur les marques de commerce tout en laissant entendre que l'alinéa 37(2)b) pourrait également s'appliquer.
Les motifs de l'opposition à la demande d'enre- gistrement, devant le registraire et dans le présent appel, sont les suivants: (1) la marque de com merce ne distingue pas véritablement les marchan- dises ou les services de l'appelante parce qu'une ou plusieurs intimées emploient au Canada des mar- ques de commerce non enregistrées et des noms commerciaux faisant figurer les lettres «B» et «A», dans cet ordre, et (2) l'appelante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement en raison de cet emploi antérieur par l'une ou l'autre des intimées.
Le fondement du second motif d'opposition invoqué se trouve à l'article 16 de la Loi.
En vertu des alinéas 16(1)a) et c), le requérant qui a produit une demande en vue de l'enregistre- ment d'une marque de commerce que le requérant lui-même ou son prédécesseur en titre a employée ou fait connaître au Canada en liaison avec des marchandises ou des services, a droit d'en obtenir l'enregistrement à l'égard de ces marchandises ou services, à moins que, à la date il l'a en premier lieu employée ou révélée, elle ne créât de la confu sion avec
(1) une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne, ou
(2) un nom commercial qui avait été antérieure- ment employé au Canada par une autre personne.
Il faut examiner ce second motif en tenant compte de la définition de l'expression «créant de la confusion» à l'article 2 de la Loi sur les marques de commerce:
2....
«créant de la confusion», lorsqu'elle est employée comme quali- ficatif d'une marque de commerce ou d'un nom commercial, désigne une marque de commerce ou un nom commercial dont l'emploi créerait de la confusion en la manière et les circonstances décrites à l'article 6;
La définition de l'expression «créant de la confu sion» renvoie à l'article 6, que je cite intégrale- ment:
6. (1) Aux fins de la présente loi, une marque de commerce ou un nom commercial crée de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial si l'emploi de la marque de commerce ou du nom commercial en premier lieu mentionné cause de la confusion avec la marque de com merce ou le nom commercial en dernier lieu mentionné, de la manière et dans les circonstances décrites au présent article.
(2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises en liaison avec ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services en liaison avec lesdites marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces mar- chandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.
(3) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial, lorsque l'emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les mar- chandises liées à cette marque et les marchandises liées à l'entreprise poursuivie sous ce nom commercial sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services en liaison avec une telle marque et les services en liaison avec l'entreprise poursuivie sous un tel nom sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.
(4) L'emploi d'un nom commercial crée de la confusion avec une marque de commerce, lorsque l'emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les mar- chandises liées à l'entreprise poursuivie sous ce nom commer cial et les marchandises liées à une telle marque sont fabri- quées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services en liaison avec l'entreprise poursuivie sous ce nom et les services en liaison avec une semblable marque sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.
(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, la cour ou le registraire, selon le cas, doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris
a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;
b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;
c) le genre des marchandises, services ou entreprises;
d) la nature du commerce; et
e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.
Les paragraphes 6(2) et 6(3) sont applicables en ce sens que selon ces deux paragraphes, la confu sion est créée entre une marque de commerce et
une autre, et entre une marque de commerce et un nom commercial si, dans le cas de deux marques de commerce et dans celui d'une marque de com merce et d'un nom commercial, leur emploi
dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises [liées à ces marques dans le cas de marques de commerce, et dans le cas d'un nom commercial, les marchandi- ses liées à l'entreprise poursuivie sous ce nom commercial] sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services [en liaison avec ces marques de commerce dans le cas de marques de commerce, et dans le cas d'un nom commercial, les services en liaison avec l'entreprise poursuivie sous ce nom commercial] sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégo- rie générale.
Je reviens maintenant au premier moyen invo- qué par les intimées pour s'opposer à la demande de l'appelante, selon lequel la marque de com merce que l'appelante cherche à faire enregistrer n'est pas «distinctive», parce que les intimées ont employé et fait connaître au Canada des marques de commerce non enregistrées et des noms com- merciaux. Il y a lieu d'examiner ce moyen en tenant compte de l'alinéa 37(2)d), mentionné plus haut, qui dit ceci:
37....
(2) Cette opposition peut être fondée sur l'un quelconque des motifs suivants:
d) la marque de commerce n'est pas distinctive.
L'alinéa 37(2)d) doit s'interpréter en fonction de la définition donnée à l'article 2 de la Loi:
«distinctive», par rapport à une marque de commerce, désigne une marque de commerce qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d'autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi;
L'appelante est une société par actions consti- tuée par une loi de 1866, un an avant la Confédé- ration en 1867, sous le nom de British American Bank Note Company. Son siège social est situé à Montréal (Québec), et elle s'occupe depuis le début de l'impression de documents à partir de gravure sur métal.
Ce nom a été choisi parce que les graveurs étaient citoyens des États-Unis d'Amérique, com- munément appelés Américains même à cette
époque, tandis que les imprimeurs étaient d'origine britannique.
En 1909, la compagnie appelante a choisi d'être régie par la loi antérieure à la Loi sur les corpora tions canadiennes [S.R.C. 1970, chap. C-32] comme si elle avait été constituée sous son régime, et en conséquence, son nom commercial est devenu British American Bank Note Company Limited. Le seul changement était l'addition du mot final «Limited» en toutes lettres, l'emploi de ce mot ou de son abréviation «Ltd.» étant obligatoire en vertu de la loi alors en vigueur.
Lorsqu'il s'agit de noms commerciaux, comme pour les marques de commerce, le commerçant ne peut avoir le monopole de l'usage de mots géné- raux décrivant l'activité poursuivie par sa compa- gnie. Lorsque cela se produit, la protection offerte pour ce nom commercial est minime. Les mots généraux décrivant l'activité doivent être rendus distinctifs par l'emploi d'un signe caractéristique (voir Office Cleaning Services, Ld. v. Westminster Window and General Cleaners, Ld. (1946), 63 R.P.C. 39 [H.L.]).
Toutefois, l'emploi de mots généraux décrivant une activité en corrélation avec un préfixe distinc- tif sert à indiquer les buts et objets pour lesquels la compagnie ainsi désignée a été constituée.
De même, les marchandises et services liés à la marque de commerce THE B A BANK NOTE GROUP, qui sont décrits dans la demande d'enre- gistrement datée du 10 février 1977, modifiée le 7 décembre 1977 et modifiée à nouveau le 14 février 1978, servent à indiquer le genre d'activité pour- suivie par l'appelante. Les services y sont décrits comme suit:
[TRADUCTION] Services d'imprimerie, c'est-à-dire, l'impression de monnaie, de certificats d'actions, d'obligations, de timbres, de billets de loterie, de débentures, de rapports annuels, de prospectus, de contrats de fiducie, de formules de procuration et de formules bancaires.
Le nom commercial et les services fournis par l'appelante renseignent clairement sur l'activité qu'elle poursuit, c'est-à-dire, l'impression de docu ments très spécialisés par une méthode de gravure sur métal permettant d'assurer à la fois la durabi- lité et la protection des documents ainsi imprimés, toutes les précautions étant prises pour en empê-
cher la contrefaçon, grâce en particulier à l'usage de papier de très grande qualité et de dessins compliqués, etc.
Lorsque la demande d'enregistrement de la marque de commerce THE B A BANK NOTE GROUP a été présentée, le registraire a fait rejeter les mots THE, BANK, NOTE et GROUP comme faisant partie du domaine public des mots accessibles à tous les commerçants, seules les lettres B et A de la marque n'entrant pas dans cette catégorie.
Même si tous les mots de la marque de com merce dont l'enregistrement a été demandé ont été rejetés, il n'en demeure pas moins que c'est comme un tout qu'il faut examiner la marque de com merce THE B A BANK NOTE GROUP afin de déter- miner si elle peut créer de la confusion avec d'au- tres marques de commerce.
Dans sa demande d'enregistrement du 10 février 1977, l'appelante a déclaré que la marque [TRA- DUCTION] «avait été employée en liaison avec les services énumérés à la présente», c'est-à-dire des services d'imprimerie, tout particulièrement l'im- pression de monnaie, de certificats d'actions, d'obligations, de timbres, de débentures, etc., depuis le ler janvier 1973.
La question de la date du premier emploi de la marque ne fait pas partie des points en litige dans les plaidoiries; toutefois, le membre du comité d'opposition, qui procédait à l'audition, a soulevé cette question dans ses motifs et a déclaré: [TRA- DUCTION] «le témoignage de la requérante [l'appe- lante en l'espèce] soulève la question de savoir si elle a en fait respecté les dispositions de l'article 29 en ce qui concerne la date du premier emploi».
En vertu de l'article 29, le requérant qui sollicite l'enregistrement d'une marque de commerce doit produire une demande, dont le contenu est précisé dans cet article, selon la formule (Formule 1) prévue dans le Règlement sur les marques de commerce [C.R.C., chap 1559, annexe II]. La seule chose requise est une déclaration portant que la marque de commerce [TRADUCTION] «a été employée» en liaison avec les services fournis depuis une date qui doit être précisée. Il n'est pas nécessaire de prouver l'exactitude de ces renseigne- ments à l'aide d'un affidavit.
Il en résulte que le requérant, s'il le demande, a droit à l'enregistrement de la marque de commerce dès lors que rien n'y fait obstacle.
En l'espèce, c'est l'opposition présentée en vertu des articles 16 et 37 précités qui, évidemment, empêche l'enregistrement de la marque de commerce.
Dans le présent litige, la question capitale est, selon moi, de savoir si la marque de commerce, THE B A BANK NOTE GROUP, dont on demande l'enregistrement crée de la confusion avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par les intimées, ou avec un nom commercial employé au Canada par celles-ci.
L'appelante a déposé un affidavit qui fait preuve de la diversité des moyens employés, depuis ses débuts, pour rendre identifiable la provenance des documents très spécialisés qu'elle imprime.
Les lettres «B ont été utilisées sur des timbres d'accise imprimés en 1934 pour le gouvernement fédéral et des épreuves terminales portent les let- tres «B A B N».
Les mots et lettres «B A Bank Note Co.» et «B A Bank Note» sont imprimés sur les coupons d'inté- rêts attachés aux obligations émises par le gouver- nement sur lesquelles sont imprimés le nom com mercial de l'appelante, «British American Bank Note Company Limited», et la légende, «Printed in Canada B A Bank Note Ottawa».
Sont également employés des expressions comme «Engraved B A Bank Note Co.», «BABN Co. Ltd.» et «B A Bank Note Group».
Tout cela montre tout au plus qu'au cours des années, le nom commercial de l'appelante a connu de nombreuses variantes destinées d'une certaine manière à rendre identifiable la provenance de ses imprimés, sous une forme abrégée, sans qu'il existe toutefois d'usage constant d'une forme ou d'une autre sauf pour l'emploi des lettres «B A», «BABN» et des mots «Bank Note» joints aux lettres «B A».
La première intimée, Bank of America National Trust and Savings Association, a été constituée le 30 novembre 1930 en vertu des lois des États-Unis d'Amérique se rapportant aux banques nationales; son siège social est situé à San Francisco, Califor-
nie, et elle est une filiale en propriété exclusive de Bank American Corporation.
Les buts et objets de cette intimée sont décrits comme étant ceux d'une [TRADUCTION] «banque nationale offrant une gamme de services complets» (quoi que cela puisse bien vouloir dire) dans l'Etat de la Californie, et des [TRADUCTION] «services spécialisés» dont, particulièrement au Canada, la commercialisation de chèques de voyage. À part cela, ses activités se résument à offrir au Canada des services bancaires qui sont, par la force des choses, très spécialisés et limités.
La deuxième intimée, B.A. Financial Services Limited, est une société par actions constituée en vertu des lois de la province de Québec par des lettres patentes datées du 30 octobre 1974. Ayant été constituée au Québec, elle doit y avoir son siège social mais peut avoir aussi des établissements d'affaires dans les autres provinces. Lorsque l'inti- mée déclare sous serment dans son affidavit que son «principal établissement d'affaires» est situé au 11 rue King ouest à Toronto (Ontario), elle inter- prète mal ces termes et applique des concepts étrangers à des compagnies canadiennes.
Quels que soient les buts et objets que cette compagnie a été autorisée à poursuivre, il y a ce que contient implicitement son nom commercial, c'est-à-dire la fourniture de «services financiers».
Elle consent des crédits et des prêts aux entre- prises qui en ont besoin contre paiement d'un intérêt.
Cette compagnie est également une filiale en propriété exclusive de Bank American Corporation qui lui fournit tous les fonds prêtés à court ou à long terme.
La troisième intimée, B A Cheque Corporation, a été incorporée le 27 octobre 1972 en vertu des lois du Delaware, un des états des États-Unis d'Amérique. Celle-ci s'occupait de [TRADUCTION] «commercialisation, distribution et traitement de chèques de voyage», c'est-à-dire de chèques émis par la première intimée.
Cette compagnie n'a commencé à [TRADUC- TION] «commercialiser, distribuer et traiter» les chèques de voyage BANKAMERICA au Canada que bien après le début de l'année 1973.
Il n'y a pas de doute que les activités poursuivies par B.A. Financial Services Limited et par B A Cheque Corporation sont très différentes de celles poursuivies par l'appelante.
Malgré cela, si on accepte, comme je le fais, que l'appelante a employé pour la première fois la marque de commerce THE B A BANK NOTE GROUP le 1" janvier 1973, il en résulte que les intimées ont employé les noms commerciaux «B.A. Financial Services Limited» et «B A Cheque Corporation» ou les lettres «B dans un contexte autre que leurs noms commerciaux bien après que l'appelante eût employé la marque de commerce dont elle a demandé l'enregistrement.
Ces deux intimées n'ont donc pas employé ces noms commerciaux ou les lettres «B dans une marque de commerce ni fait connaître de marque de commerce avant que l'appelante emploie sa marque de commerce.
Par conséquent, cet emploi étant postérieur à celui de l'appelante, il ne peut être invoqué pour empêcher l'enregistrement de la marque de com merce de l'appelante pour la raison qu'elle contre- viendrait à l'article 16 de la Loi sur les marques de commerce.
Il ne reste plus que la dernière opposante à la demande d'enregistrement de la marque de com merce THE B A BANK NOTE GROUP, la Bank of America National Trust and Savings Association, qui dirige aux États-Unis des banques «offrant une gamme de services complets». Peut-être fait-elle au Canada quelques opérations bancaires internatio- nales mais il ressort nettement de la preuve que ses activités au Canada consistent à distribuer des chèques de voyage, sous forme de coupures de 10 $, 20 $, 50 $, 100 $, 500 $ et 1 000 $, par l'in- termédiaire de succursales de banques à charte partout au Canada.
Cette intimée est le propriétaire inscrit des mar- ques de commerce canadiennes BANK OF AMERICA et BANKAMERICARD.
Dans les motifs de sa décision qui est mainte- nant en appel, le registraire des marques de com-
merce a déclaré, en ce qui concerne ces dernières marques de commerce, qu'il rejetait l'opposition:
[TRADUCTION] ... parce que rien n'indique dans la preuve qu'il existe une possibilité de confusion entre la marque de commerce dont l'enregistrement a été demandé et les enregis- trements que possèdent les opposantes.
Je suis parfaitement d'accord avec cette conclu sion du registraire dont il n'est d'ailleurs pas inter- jeté appel.
La Bank of America National Trust and Savings Association est également le propriétaire inscrit d'une marque de commerce aux Etats-Unis comportant les lettres «B sous une forme styli sée. Elle ne semble pas être le propriétaire inscrit de la marque de commerce «B of mais elle utilise toutefois ce symbole sur ses chèques de voyage.
Des copies des chèques de voyage BANKAME- RICA distribués sur le marché canadien par l'inti- mée ont été déposées en preuve.
Au recto de ces documents, les mots «BANKA- MERICA TRAVELERS CHEQUES» sont bien en évidence.
Ce sont les mots BANK OF AMERICA qui sont en évidence sur des chèques émis antérieurement, dont certains sont encore en circulation. On trouve également sur ces chèques les mots «B of A TRA VELERS CHEQUE» écrits en caractères beau- coup plus petits.
Les lettres «BA» sont imprimées en jaune plus foncé dans le papier jaune pâle des chèques de voyage, formant un fond discret qui me semble être de la nature des filigranes.
Le dessin formé par les lettres «BA» paraît en très petits caractères sur les bords et dans les coins.
Évidemment, le même symbole est imprimé dans le papier qui sert à l'impression des docu ments bancaires essentiels à l'exploitation d'une banque offrant des services complets, comme par exemple les lettres de crédit.
L'avocat de l'appelante soutient que lorsque l'opposant à la demande d'enregistrement d'une marque de commerce fonde son opposition sur
l'emploi antérieur d'une marque de commerce ou d'un nom commercial qui pourraient être confon- dus avec la marque dont l'enregistrement est demandé, il incombe à l'opposant de prouver qu'il a acquis une certaine notoriété liée à cette dénomi- nation dans le domaine d'activité en cause.
À mon avis, cette déclaration simplifie trop les choses.
C'est au requérant de l'enregistrement d'une marque de commerce qu'il appartient de prouver qu'il y a droit et cette obligation qui incombe en tout temps à ce dernier (voir Eno v. Dunn (1890), 15 App. Cas. 252 [H.L.]) comprend également celle de prouver qu'il est peu probable que la marque crée de la confusion.
Cependant, avant de pouvoir fonder une objec tion en vertu de l'article 16 sur l'emploi antérieur, l'opposant doit prouver que sa réputation est éta- blie dans le commerce sous une appellation avec laquelle il pourrait y avoir de la confusion. À mon avis, on ne peut parler, dans ce cas, d'obligation mais de fardeau de la preuve. Une obligation ne passe jamais d'une personne à une autre mais le fardeau de la preuve peut être renversé. Le requé- rant peut réfuter la preuve présentée par
l'opposant. -
À mon avis, en dehors de toutes ces subtilités, le point le plus important de cet appel est de détermi- ner si la marque de commerce, THE B A BANK NOTE GROUP, dont l'appelante demande l'enregis- trement pour l'employer à l'égard de services d'im- primerie très spécialisés, pourrait mener à la con clusion que ces services sont fournis par la même personne que celle qui produit les chèques de voyage sur lesquels paraissent les lettres «BA».
Il ressort de la décision de Lord Shaw dans Re W & G du Cros Ltd.'s Application (1913), 30 R.P.C. 660 [H.L.], qu'une marque de commerce consistant seulement en des lettres de l'alphabet non accompagnées de signes particuliers est une marque de commerce dépourvue de caractère dis- tinctif propre. En conséquence, une marque de commerce de ce genre est qualifiée de «marque faible».
En résumé, lorsqu'un commerçant s'approprie des lettres de l'alphabet et essaie d'empêcher les autres d'en faire autant, l'étendue de la protection
à lui donner devrait être plus limitée que lorsqu'il s'agit d'une marque de commerce exclusive; une différence assez minime suffit pour éviter la confu sion et, dans des cas de ce genre, on peut s'attendre à plus de discernement de la part du public (voir les remarques au sujet des noms commerciaux dans Office Cleaning Services, Ld. v. Westminster Window and General Cleaners, Ld. (1944), 61 R.P.C. 133 [C.A.] à la page 135).
La marque de commerce de l'appelante est THE B A BANK NOTE GROUP alors que la première intimée nommée dans l'intitulé de la cause emploie les lettres «BA», le symbole formé par ces lettres, et plus rarement la mention «B of A». Tous les mots utilisés dans la marque de commerce de l'appelante ont été rejetés sauf les lettres B A toutefois, cela ne diminue en rien le fait qu'il faut examiner cette marque de commerce comme un tout.
De plus, les lettres «BA» que la première intimée nommée emploie sous une forme stylisée sur des chèques de voyage, qui représentent l'essentiel de ses affaires au Canada, paraissent avec la marque de commerce BANKAMERICA mise bien en évi- dence. Ces lettres «BA» sont utilisées comme arrière-plan et revêtent par conséquent une impor tance négligeable.
Le juge Noël a fait observer dans Silhouette Products Limited v. Prodon Industries Ltd., [1965] 2 R.C.É. 500, qu'une marque de commerce perd de son importance lorsqu'elle est utilisée simultanément avec une autre marque, l'une étant subordonnée à l'autre. L'emploi de «BA» est sûre- ment subordonné à celui de la marque de com merce BANKAMERICA.
J'ai reproduit au début des présents motifs le paragraphe 6(5) de la Loi sur les marques de commerce qui contient les éléments dont il faut tenir compte pour déterminer si une marque de commerce crée de la confusion avec une autre. Les plus importants parmi ceux-ci sont le genre de services et la nature des entreprises ou du com merce en cause.
Il faut tenir compte de la catégorie de services à laquelle la marque de commerce s'applique.
Dans cette optique, on constate que les chèques de voyage commercialisés par la première intimée
s'adressent aux gens qui voyagent et qu'ils sont très faciles à obtenir. Ils sont destinés aux person- nes qui souhaitent transporter leur argent d'une manière qui leur assure toute sécurité.
Par ailleurs, l'appelante fournit des services d'imprimerie très spécialisés: monnaie pour les gouvernements étrangers, obligations, débentures, certificats d'actions et valeurs de placement. Ses services sont fournis à des experts et des profes- sionnels comme ceux qui émettent des actions et des obligations. Il en résulte que ces gens savent précisément avec qui ils font affaire et que le risque de confusion est très peu probable.
C'est pour ces motifs que je ne puis partager l'opinion du membre du comité d'opposition qui a conclu que la marque de commerce dont l'appe- lante a demandé l'enregistrement crée de la confu sion avec les initiales BA telles que les emploie la première intimée.
J'arrive à cette conclusion en me fondant sur l'arrêt Benson & Hedges (Canada) Limited v. St. Regis Tobacco Corporation, [1969] R.C.S. 192, de la Cour suprême du Canada, décision qui s'ap- puie sur la fonction exécutée par le registraire dans l'affaire sous examen.
Même si la Loi sur les marques de commerce dispose qu'en appel, la Cour peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi, le juge Ritchie a déclaré dans Rowntree Company Limi ted v. Paulin Chambers Company Limited, [[1968] R.C.S. 134], que cela ne signifie pas que la Cour a le droit de substituer son opinion à celle du registraire, à moins de prouver qu'il a agi en se fondant sur un principe erroné ou qu'il n'a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.
Cependant, lorsque le registraire rend une déci- sion sur la probabilité de confusion, il tranche une question de fait; il se prononce alors sur une question mais n'exerce pas un pouvoir discrétion- naire.
Mon désaccord avec la décision du registraire naît de la décision rendue sur les faits et non de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire.
Dans ces circonstances, les juges de la Cour suprême ont déclaré de façon unanime que la cour d'appel peut substituer sa décision à celle du registraire.
Au cours de l'appel, une question a été soulevée incidemment sans avoir été pleinement expliquée, ni débattue.
Il est écrit dans une brochure annexée à un affidavit que THE B A BANK NOTE GROUP consiste en sept entités constituées doit voici la liste:
1. British American Bank Note Company Limited (l'appelante en l'espèce et la requérante de l'enre- gistrement de la marque de commerce),
2. Atlantic Banknote Limited,
3. Yvon Boulanger Limited,
4. The Franklin Press Limited,
5. Winnipeg Banknote Company Limited,
6. Alberta Security Printing, et
7. Security Printing Corporation Ltd.
À mon avis, une marque de commerce ne doit être employée que pour distinguer les services du propriétaire de cette marque de commerce et c'est une infraction que de l'employer pour les services d'une compagnie connexe, même lorsqu'il s'agit de la filiale du propriétaire inscrit de la marque de commerce.
Si l'appelante devient le propriétaire de la marque de commerce, il est possible que les six autres compagnies puissent en devenir les usagers inscrits en vertu de l'article 49 de la Loi sur les marques de commerce si elles remplissent les con ditions requises.
Il se peut également que les six autres compa- gnies soient liées par contrat avec l'appelante pour solliciter en son nom des contrats d'impression et peut-être même pour fournir en sous-traitance les services d'imprimerie dont elle ne peut elle-même s'occuper.
Je n'accepte pas le concept d'une [TRADUC- TION] «organisation unique» tel que l'a conçu le juge Angers dans l'arrêt Good Humor [Good Humor Corporation of America v. Good Humor
Food Products Limited et al.] [1937] R.C.É. 61, à la page 74, à moins que les sept compagnies du groupe fassent partie d'une société, auquel cas la société serait la requérante dans la demande d'en- registrement et non pas l'appelante.
Je mentionne ce point en passant afin d'attirer l'attention de l'appelante sur les précautions qui doivent être prises pour empêcher que la marque de commerce ne perde les caractéristiques distinc- tives qui sont essentielles à sa validité, question sur laquelle je ne suis pas appelé à me prononcer.
Par ces motifs, l'appel est accueilli et l'appelante a droit aux dépens.
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