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A-435-85
Caesar Gray (requérant)
c.
Yvon Fortier (intimé)
et
Commission de l'emploi et de l'immigration (mise- en- cause)
Cour d'appel, juges Pratte, Ryan et Hugessen— Montréal, 13 juin; Ottawa, 11 juillet 1985.
Immigration Demande tendant à l'annulation du refus de l'arbitre de rouvrir l'enquête conformément à l'art. 35 En vertu de l'art. 35, l'enquête peut être réouverte pour la seule fin de rapporter de nouveaux éléments de preuve susceptibles de justifier la modification ou la révocation d'une décision antérieure Le mot «décision» vise la décision prise en vertu de l'art. 32 relativement à la question de savoir si la personne faisant l'objet de l'enquête est visée à l'art. 14(1) ou à l'art. 27 La «décision» n'est pas l'ordonnance ou l'avis rendu par suite de la décision L'art. 35 n'autorise pas la réouverture d'une enquête afin de recevoir des éléments de preuve se rapportant à l'ordonnance prononcée au terme de l'enquête La demande est rejetée au motif que le requérant cherche à établir le caractère illégal de l'ordonnance d'expulsion Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, chap. 52, art. 14(1), 27, 32, 35, 45(1), 46(2), 71(1) Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, art. 39 Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), chap. 10, art. 28.
Une enquête en matière d'immigration a été ajournée afin de permettre de statuer sur la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par le requérant. Le Minis- tre et la Commission d'appel de l'immigration ont rejeté la revendication. Les procédures fondées sur l'article 28 intentées à l'encontre de la décision de la Commission étaient encore pendantes lorsque l'enquête a repris et qu'une ordonnance d'expulsion a été prononcée contre le requérant. La demande fondée sur l'article 28 a été accueillie et la décision de la Commission a été annulée. Le requérant a alors demandé la réouverture de l'enquête afin que l'ordonnance d'expulsion puisse être révoquée. L'arbitre a refusé de rouvrir l'enquête au motif qu'il n'avait pas le pouvoir de le faire. La présente demande fondée sur l'article 28 vise ce refus de l'arbitre.
En vertu de l'article 35 de la Loi sur l'immigration de 1976, une enquête peut être réouverte afin d'entendre de nouveaux témoignages et de recevoir d'autres éléments de preuve, et l'arbitre peut alors confirmer, modifier ou révoquer la décision antérieure.
Arrêt (le juge Hugessen dissident): la demande devrait être rejetée.
Le juge Pratte (avec l'appui du juge Ryan): L'article 35 de la Loi ne confère pas aux arbitres un pouvoir illimité en matière de réouverture d'enquête et de réexamen de leurs décisions antérieures. En vertu du paragraphe 35(1), une enquête peut être réouverte pour la seule fin de recevoir de nouveaux élé- ments de preuve susceptibles de justifier la modification ou la révocation d'une décision déjà rendue.
Il faut donner au mot «décision» utilisé au paragraphe 35(1) un sens très précis et étroit. La décision susceptible d'être modifiée ou révoquée en vertu de ce paragraphe n'est pas l'ordonnance ou l'avis qui a été rendu au terme de l'enquête. Le mot «décision» vise la décision rendue par l'arbitre en vertu de l'article 32 de la Loi et par laquelle ce dernier conclut qu'une personne est soit visée ou non au paragraphe 14(1), soit admis sible ou non, soit visée ou non à l'article 27. Dès que la décision a été rendue, l'arbitre doit alors prendre la mesure prescrite par l'article 32 et prononcer une ordonnance d'expulsion, une ordonnance d'exclusion ou encore un avis d'interdiction de séjour. L'article 35 n'autorise pas la réouverture d'une enquête afin de recevoir des éléments de preuve se rapportant unique- ment à l'ordonnance prononcée au terme de l'enquête. Il s'en- suit que la présente demande fondée sur l'article 28 doit être rejetée puisque le requérant a sollicité la réouverture de l'en- quête afin d'apporter des éléments de preuve qui établiraient le caractère illégal de l'ordonnance d'expulsion, mais n'influe- raient d'aucune façon sur la validité de la décision sur laquelle reposait cette ordonnance.
Le juge Hugessen (dissident): L'argument du Ministre repo- sant sur la distinction qui existerait dans le texte anglais de la Loi entre la «decision» (décision) et l'«order or notice» (ordon- nance ou avis) qui est rendu par suite de cette décision est inacceptable. Cet argument ne trouve aucun fondement dans le texte français: alors que chacun des paragraphes du texte anglais de l'article 32 débute par les mots «Where an adjudica tor decides», le texte français commence par les mots «L'arbi- tre, après avoir conclu que». Même dans le texte anglais, cet argument oblige à une interprétation intolérablement étroite du libellé, car si la «décision» susceptible de révision se limitait strictement à l'unique conclusion décrite par l'article 32 comme étant une décision, il serait alors inutile de conférer le pouvoir de réviser «any» décision antérieure. Toute conclusion pronon- cée par une personne ayant le pouvoir de le faire constitue une «décision» et il faudrait un langage beaucoup plus explicite que celui utilisé dans la Loi pour en restreindre le sens uniquement à ce qu'on appelle une «décision».
Dans le contexte de la présente espèce, l'arbitre chargé de poursuivre l'enquête du requérant avait l'obligation d'appliquer les dispositions du paragraphe 46(2) de la Loi. Ce paragraphe oblige l'arbitre à «décider» si la personne faisant l'objet de l'enquête est visée aux alinéas 46(2)a) ou b); ce n'est qu'à la suite de cette «décision» qu'il peut prononcer une ordonnance de renvoi ou un avis d'interdiction de séjour. Cette «décision» doit reposer sur la preuve. En l'espèce, on demande à l'arbitre de rouvrir son enquête afin de pouvoir recevoir une preuve établis- sant que le requérant n'est pas une personne visée aux alinéas a) ou b). Une telle preuve se révélera fort probablement péremptoire. Elle amènera normalement l'arbitre à infirmer sa décision antérieure et à annuler l'ordonnance d'expulsion; l'en- quête devra alors être suspendue à nouveau jusqu'à ce que les conditions prévues au paragraphe 46(2) aient été respectées. Dans les circonstances, l'arbitre a non seulement le pouvoir mais également le devoir de rouvrir l'enquête.
AVOCATS:
W. Melvin Weigel pour le requérant.
Suzanne Marcoux-Paquette pour l'intimé et la mise-en-cause.
PROCUREURS:
Weigel, Duong & Kliger, Westmount (Québec), pour le requérant.
Le sous-procureur général du Canada, pour l'intimé et la mise-en-cause.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE PRATTE: La présente demande fondée sur l'article 28 vise la décision rendue par un arbitre, en vertu de la Loi sur l'immigration de 1976 [S.C. 1976-77, chap. 52], de refuser de rou- vrir l'enquête au terme de laquelle il avait pro- noncé une ordonnance d'expulsion contre le requérant.
Ce dernier avait, dans le cours de cette enquête, revendiqué le statut de réfugié au sens de la Con vention. Avant de clore l'enquête, l'arbitre, se con- formant alors à l'article 45 de la Loi sur l'immi- gration de 1976, avait accordé un ajournement afin que l'on statue sur la revendication du requé- rant. Le Ministre a rejeté cette revendication et le requérant a alors demandé à la Commission d'ap- pel de l'immigration de réexaminer sa revendica- tion, mais cette dernière a, conformément au para- graphe 71(1), rejeté cette demande de façon sommaire. Le requérant a attaqué cette décision au moyen d'un recours fondé sur l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale [S.R.C. 1970 (2e Supp.), chap. 10]. Cette demande fondée sur l'article 28 était encore pendante lorsque, le 4 janvier 1985, l'arbitre a repris l'enquête et prononcé une ordon- nance d'expulsion à l'endroit du requérant. Cette demande a été instruite le 15 avril 1985 et, ce jour-là, la Cour a accueilli ladite demande, annulé la décision qu'avait prise la Commission d'appel de l'immigration en vertu du paragraphe 71(1) et renvoyé l'affaire devant la Commission. L'avocat du requérant a alors écrit à l'arbitre qui avait prononcé l'ordonnance d'expulsion afin de lui demander de rouvrir l'enquête pour faire la preuve du jugement de cette Cour annulant la décision de la Commission d'appel de l'immigration et ainsi obtenir l'annulation de l'ordonnance d'expulsion au motif qu'elle avait été prononcée sans compé- tence. L'arbitre a refusé d'accéder à cette requête car, selon lui, il ne disposait pas du pouvoir de rouvrir l'enquête afin d'admettre des éléments de preuve établissant qu'il avait agi sans compétence
en reprenant l'enquête et en prononçant l'ordon- nance d'expulsion.
Ce sont les articles 35 de la Loi sur l'immigra- tion de 1976 et 39 du Règlement sur l'immigra- tion de 1978 [DORS/78-172] qui régissent la réouverture des enquêtes:
35. (1) Sous réserve des règlements, une enquête menée par un arbitre peut être réouverte à tout moment par le même arbitre ou par un autre, à l'effet d'entendre de nouveaux témoignages et de recevoir d'autres preuves, et l'arbitre peut alors confirmer, modifier ou révoquer la décision antérieure.
(2) L'arbitre qui modifie ou révoque une décision en vertu du paragraphe (1), peut infirmer toute ordonnance ou avis et, le cas échéant, doit prendre les mesures appropriées conformé- ment à l'article 32.
(3) Les ordonnances ou avis infirmés en vertu du paragraphe (2), sont réputés n'avoir jamais été rendus.
39. Selon le paragraphe 35(1) de la Loi, l'enquête peut être réouverte par l'arbitre si la personne en cause en fait la demande ou en donne la permission par écrit ou si la décision prise à l'enquête serait modifiée en faveur de la personne en cause.
L'article 35 de la Loi ne confère pas aux arbitres un pouvoir illimité en matière de réexamen de leurs décisions et de réouverture d'enquêtes. Les pouvoirs accordés par cet article sont en effet plus restreints.
Le paragraphe 35(1) donne aux arbitres le pou- voir de rouvrir les enquêtes pour la seule fin de recevoir de nouveaux éléments de preuve suscepti- bles de justifier la modification ou la révocation d'une décision déjà rendue. Par conséquent, un arbitre ne peut rouvrir une enquête dans le seul but de modifier une décision (sans recevoir de nouveaux éléments de preuve) ou de recevoir des éléments de preuve qui ne pourraient conduire à la modification ou à la révocation d'une décision antérieure. Cette conclusion n'est pas sans impor tance puisque le paragraphe 35(2) établit claire- ment qu'il faut donner au mot «décision» du para- graphe 35(1) un sens très précis et étroit.
En vertu du paragraphe 35(2), l'arbitre qui, après avoir rouvert une enquête et reçu de nou- veaux éléments de preuve, modifie ou révoque une décision conformément au paragraphe (1), peut infirmer toute ordonnance ou tout avis et, le cas échéant, doit prendre les mesures appropriées con- formément à l'article 32. Pour bien comprendre
cette disposition, il est nécessaire de se reporter à l'article 32 qui indique clairement qu'au terme d'une enquête, un arbitre doit d'abord prendre certaines décisions et ensuite, une fois ces décisions prises, prononcer des ordonnances ou des avis. Dans le cas d'une enquête tenue à la suite du rapport prévu à l'article 20, l'arbitre doit d'abord déterminer si la personne faisant l'objet de l'en- quête est visée au paragraphe 14(1) et, dans le cas contraire, décider si elle est admissible au pays; dans le cas d'une enquête tenue à la suite du rapport prévu à l'article 27, l'arbitre doit d'abord déterminer si la personne faisant l'objet de l'en- quête est visée à l'article 27. Dès qu'une de ces décisions a été rendue, l'arbitre doit alors prendre la mesure prescrite par l'article 32 et, dans certai- nes circonstances, il doit prononcer une ordon- nance d'expulsion ou une ordonnance d'exclusion ou encore émettre un avis d'interdiction de séjour. Voilà les ordonnances et avis qui, suivant le para- graphe 35(2), peuvent être infirmés par l'arbitre qui modifie ou révoque une décision conformément au paragraphe 35(1). La décision susceptible d'être modifiée ou révoquée en vertu du paragra- phe 35(1) n'est pas l'ordonnance ou l'avis qui a été rendu au terme de l'enquête. Le mot «décision» utilisé dans ce paragraphe vise clairement la déci- sion d'un arbitre concluant qu'une personne est soit visée ou non au paragraphe 14(1), soit admis sible ou non, soit visée ou non à l'article 27. Par conséquent, l'article 35 n'autorise pas la réouver- ture d'une enquête afin de recevoir des éléments de preuve se rapportant uniquement à l'ordonnance prononcée au terme de l'enquête en question. Il s'ensuit que la présente demande fondée sur l'arti- cle 28 doit être rejetée puisque le requérant a sollicité la réouverture de l'enquête afin d'apporter des éléments de preuve qui établiraient le caractère illégal de l'ordonnance d'expulsion mais n'influe- raient d'aucune façon sur la validité de la décision sur laquelle reposait cette ordonnance.
Je rejetterais la demande.
LE JUGE RYAN: Je souscris aux présents motifs.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE HUGESSEN (dissident): Le requérant a fait l'objet d'une enquête en vertu de la Loi sur
l'immigration de 1976 au cours de laquelle il a revendiqué le statut de réfugié. Comme l'exige le paragraphe 45(1), l'enquête a été suspendue durant l'examen de cette revendication du statut de réfugié. Après le rejet de sa revendication par le Ministre, le requérant a présenté une demande de réexamen à la Commission d'appel de l'immigra- tion qui l'a rejetée de façon sommaire conformé- ment au paragraphe 71(1). Le requérant a ensuite demandé à cette Cour, en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, d'annuler la décision de la Commission d'appel de l'immigration. Toute- fois, pendant que ces procédures étaient en ins tance, il y a eu reprise de l'enquête en vertu de la Loi sur l'immigration de 1976 et une ordonnance d'expulsion a été prononcée contre le requérant. Cette Cour a, par la suite, accueilli la demande fondée sur l'article 28, annulé la décision de la Commission d'appel de l'immigration et renvoyé l'affaire devant cette dernière pour qu'elle instruise de façon appropriée la demande de réexamen de la revendication du statut de réfugié du requérant. En attendant la tenue d'une audience par la Com mission d'appel de l'immigration, le requérant a demandé à l'arbitre qui avait présidé l'enquête tenue en vertu de la Loi sur l'immigration de 1976 de rouvrir l'enquête en question afin de lui permet- tre de faire la preuve que la décision de la Com mission d'appel de l'immigration avait été infirmée et que l'ordonnance d'expulsion prononcée précé- demment devait par conséquent être révoquée. L'arbitre a refusé de rouvrir l'enquête pour ces fins, soutenant qu'il n'avait pas le pouvoir de le faire. Le requérant demande maintenant à cette Cour, en vertu de l'article 28, d'annuler ce refus.
C'est à l'article 35 de la Loi sur l'immigration de 1976 qu'on trouve le pouvoir d'un arbitre de rouvrir une enquête et de réviser ses décisions antérieures:
35. (1) Sous réserve des règlements, une enquête menée par un arbitre peut être réouverte à tout moment par le même arbitre ou par un autre, à l'effet d'entendre de nouveaux témoignages et de recevoir d'autres preuves, et l'arbitre peut alors confirmer, modifier ou révoquer la décision antérieure.
(2) L'arbitre qui modifie ou révoque une décision en vertu du paragraphe (1), peut infirmer toute ordonnance ou avis et, le cas échéant, doit prendre les mesures appropriées conformé- ment à l'article 32.
(3) Les ordonnances ou avis infirmés en vertu du paragraphe (2), sont réputés n'avoir jamais été rendus.
C'est sur une interprétation extrêmement étroite et légaliste de l'article en question que l'avocate du Ministre appuie l'argument qu'elle invoque au sou- tien du refus de l'arbitre d'accorder la réouverture d'enquête en l'espèce. Son argument, si j'ai bien compris, repose sur la distinction qui existerait dans le texte anglais de la Loi entre la «decision» (décision) et l'«order or notice» (ordonnance ou avis) qui est rendu par suite de cette décision. La «décision» se limite à la conclusion que l'arbitre est appelé à prononcer conformément aux premiers mots de chacun des paragraphes de l'article 32: «Where an adjudicator decides*». L'arbitre n'a le pouvoir de rouvrir l'enquête et de recevoir de nouveaux éléments de preuve que si cette preuve est susceptible d'amener une modification de la «décision» et non si elle vise uniquement l'«ordon- nance ou avis» ou quelque autre question sur laquelle l'arbitre est appelé à statuer durant son enquête.
Cette interprétation entraîne des résultats éton- nants. Elle confère à un arbitre un pouvoir illimité de modifier la «décision» principale tout en lui refusant le pouvoir d'apporter quelque modifica tion que ce soit à l'ordonnance ou avis en décou- lant. Prenons un exemple simple: suivant cette interprétation, un arbitre ayant prononcé une ordonnance d'expulsion n'aurait pas le pouvoir de recevoir de nouveaux éléments de preuve ayant pour but de le convaincre de révoquer cette ordon- nance d'expulsion pour lui substituer un avis d'in- terdiction de séjour. Cette interprétation aurait même pour effet de refuser à un arbitre le pouvoir de changer tout bonnement la date inscrite sur un avis d'interdiction de séjour.
Néanmoins, même en faisant abstraction de ces résultats, je considère cet argument inacceptable. Comme je l'ai souligné précédemment, il ne trouve aucun fondement dans le texte français. D'ailleurs, même dans le texte anglais, il oblige à une inter- prétation intolérablement étroite du libellé, car si la «décision» susceptible de révision se limitait strictement à l'unique conclusion décrite par
* Cet argument ne trouve aucun appui dans le texte français; chacun des paragraphes de l'article 32 débute par les mots: «L'arbitre, après avoir conclu que».
l'article 32 comme étant une décision, il serait alors inutile de conférer le pouvoir de réviser «any» décision antérieure. J'aurais cru que, dans le lan- gage courant, la décision d'ordonner l'expulsion ou l'interdiction de séjour constituait une «décision» de l'arbitre, au moins tout autant que n'importe quelle autre des choses qu'il est appelé à faire. À mon avis, toute conclusion prononcée par une per- sonne ayant le pouvoir de le faire constitue une «décision» et il faudrait un langage beaucoup plus explicite que celui utilisé dans la Loi pour en restreindre le sens uniquement à ce qu'on appelle une «décision».
Dans le contexte de la présente espèce, l'arbitre chargé de poursuivre l'enquête du requérant avait l'obligation d'appliquer les dispositions du para- graphe 46(2):
46....
(2) L'arbitre chargé de poursuivre l'enquête en vertu du paragraphe (1), doit, comme si la revendication du statut de réfugié n'avait pas été formulée, prononcer le renvoi ou l'inter- diction de séjour de la personne
a) à qui le Ministre n'a pas reconnu le statut de réfugié au sens de la Convention, si le délai pour demander le réexamen de sa revendication prévu au paragraphe 70(1) est expiré; ou
b) à qui la Commission n'a pas reconnu le statut de réfugié au sens de la Convention.
Ce texte, suivant mon interprétation, oblige l'ar- bitre à se faire une idée, c'est-à-dire à «décider» si la personne faisant l'objet de l'enquête est visée à l'alinéa a) ou b); ce n'est qu'à la suite de cette «décision» qu'il peut prononcer une ordonnance de renvoi ou un avis d'interdiction de séjour. Au surplus, il s'agit d'une «décision» qui, selon moi, devrait normalement reposer sur la preuve. En l'espèce, on demande à l'arbitre de rouvrir son enquête afin de pouvoir recevoir une preuve éta- blissant que, contrairement à ce que l'on croyait précédemment, le requérant n'est pas une personne visée à l'alinéa a) ou b). La nature des choses fait en sorte qu'une telle preuve se révélera fort proba- blement péremptoire. Elle amènera normalement l'arbitre à infirmer sa décision antérieure et à annuler l'ordonnance d'expulsion; l'enquête devra alors être suspendue à nouveau jusqu'à ce que les
conditions prévues au paragraphe 46(2) aient été respectées. Dans les circonstances, je suis d'avis que l'arbitre a non seulement le pouvoir mais également le devoir de rouvrir l'enquête.
J'accueillerais la demande, j'annulerais la déci- sion attaquée et je renverrais l'affaire devant l'ar- bitre pour réexamen en tenant pour acquis qu'il a le devoir de rouvrir une enquête afin de recevoir un élément de preuve établissant qu'à la reprise de l'enquête, la personne en cause n'était pas une personne visée à l'alinéa a) ou b) du paragraphe 46(2).
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