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A-399-16

2018 CAF 30

Sa Majesté la Reine (appelante)

c.

Oxford Properties Group Inc. (intimée)

Répertorié : Canada c. Oxford Properties Group Inc.

Cour d’appel fédérale, juge en chef Noël et juges Dawson et Rennie J.C.A.—Toronto, 11 décembre 2017; Ottawa, 1er février 2018.

Impôt sur le revenu — Cotisation et nouvelle cotisation — Appel interjeté à l’encontre d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt (C.C.I.), qui a accueilli l’appel interjeté par l’intimée à l’encontre de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (ministre) à l’égard de son année d’imposition 2006 — La nouvelle cotisation avait été établie sur le fondement de la règle générale anti-évitement (RGAÉ) prévue à l’art. 245 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi) — La prédécesseure de l’intimée avait accepté une proposition par laquelle une partie importante de ses actions ordinaires seraient achetées — Elle s’est départie de biens qui avaient un prix de base rajusté (PBR) et une fraction non amortie du coût en capital (FNACC) faibles en faveur de sociétés en commandite de premier palier — Les commanditaires des sociétés de personnes ont fusionné, ce qui a mené à la création de l’intimée — L’intimée a majoré le PBR des participations qu’elle détenait dans les sociétés de personnes en vertu de l’art. 88(1) de la Loi — Ces dernières ont transféré les biens immobiliers aux sociétés de personnes de second palier sous le régime de l’art. 97(2) de la Loi; les biens immobiliers ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles — La vente n’a généré qu’un faible gain en capital imposable, voire aucun — L’art. 100(1) de la Loi ne s’appliquait pas — Par conséquent, l’impôt sur la récupération latente et les gains accumulés a été évité — Le ministre est arrivé à la conclusion que le résultat était abusif; l’intimée a contourné l’application de l’art. 100(1) — La C.C.I. a conclu qu’il n’y avait eu aucun abus de l’art. 97(2); les modifications apportées à l’art. 88 étaient pertinentes dans le contexte de l’interprétation de l’objet et de l’esprit des dispositions relatives à la majoration; l’objet des art. 88 et 98 avant les modifications n’était pas d’empêcher la majoration « indirecte »; l’art. 88(1)d)(ii.1) constituait un changement dans le droit et non une clarification du droit; le recours aux majorations par l’intimée n’a pas contrecarré l’objet ou l’esprit de ces dispositions — Il s’agissait de savoir si l’élimination du gain en capital au moyen de majorations et l’évitement de la récupération ont contrecarré l’art. 100(1) et d’autres dispositions — Il n’y a rien qui exige que la limite de trois ans prévue à l’art. 69(11) soit appliquée à l’art. 97(2) — L’objet et l’esprit des art. 97(2) et 97(4) de la Loi consistent à assurer le suivi des attributs fiscaux des biens amortissables afin de veiller à ce que la récupération et les gains reportés soient imposés ultérieurement — La récupération latente n’était pas censée être non imposable — L’application de l’art. 69(11) n’est pas limitée aux sociétés de personnes — Son application est beaucoup plus large — Il s’applique à toute série d’opérations amorcée par une disposition pour un produit inférieur à la juste valeur marchande — Le fait que les gains et la récupération reportés ne seront jamais imposés contrecarre l’objet et l’esprit de l’art. 97(2) — Les majorations en l’espèce ont contrecarré l’objet et l’esprit des art. 88(1)c) et d) et de l’art. 98(3) de la Loi — Elles ont permis à l’intimée de contourner l’application de l’art. 100(1) — La question de savoir si le nouvel art. 88(1)d)(ii.1) est de droit nouveau dans le contexte de la RGAÉ doit être examinée en tenant compte du sens des dispositions antérieures — La modification n’est pas de droit nouveau — L’effet pratique est simple: il ne sera plus nécessaire d’invoquer la RGAÉ pour éviter le résultat obtenu en l’espèce — Il incombait à la C.C.I. d’analyser l’objet et l’esprit de l’art. 100(1) — Le législateur voulait prévoir le paiement de l’impôt sur la récupération latente, qui autrement demeurerait impayé lors de la vente subséquente des biens amortissables — Le résultat obtenu en l’espèce a contrecarré l’objet et l’esprit de l’art. 100(1), parce que l’impôt sur la récupération latente à l’égard des biens amortissables détenus par les sociétés de second palier ne sera jamais payé — L’art. 100(1) a été contourné grâce à l’élimination du gain en capital — Il a été rendu inopérant par le recours à des majorations — La raison pour laquelle la majoration exclut les biens amortissables aux termes des art. 88(1)c)(iii) et 98(3)e) a été contrecarrée — La Couronne s’est acquittée de son fardeau de décrire l’objet et l’esprit des dispositions invoquées par l’intimée — Il n’a pas été démontré qu’un abus de l’art. 100(1)b) a résulté du fait que l’augmentation de la valeur des biens amortissables n’était pas reflétée dans le gain en capital réalisé lors de la vente des participations dans les sociétés de personnes — Il n’y a eu aucun abus de l’art. 97(2), dans la mesure où cette disposition a été invoquée pour reporter l’impôt à payer sur cette partie de l’augmentation de la valeur des biens amortissables — C’est pour prévenir la réalisation subséquente d’un gain en capital alors qu’il n’y a eu aucun gain économique que les dispositions relatives à la majoration ont été adoptées — La seule façon pour le ministre de refuser de reconnaître cette majoration serait d’insister sur une interprétation des dispositions en cause qui est axée sur le sens des mots, plus particulièrement sur l’exclusion non limitative des biens amortissables — Cependant, lorsque la RGAÉ est invoquée, il faut appliquer la même méthode d’interprétation à la question de savoir s’il y a eu abus et à celle de savoir quels rajustements corrélatifs sont nécessaires pour corriger la situation — Le ministre ne pouvait donc pas établir une nouvelle cotisation à l’égard de l’intimée au motif que le résultat obtenu par cette utilisation des dispositions relatives à la majoration donnait lieu à un abus — La nouvelle cotisation a été renvoyée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation — Appel accueilli en partie.

Il s’agissait d’un appel interjeté à l’encontre d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt (C.C.I.), qui a accueilli l’appel interjeté par l’intimée à l’encontre de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (ministre) à l’égard de son année d’imposition 2006. La nouvelle cotisation avait été établie sur le fondement de la règle générale anti-évitement (RGAÉ) prévue à l’article 245 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi).

La prédécesseure de l’intimée, la prédécesseure d’Oxford, avait accepté une proposition par laquelle BPC Properties Inc. achèterait une partie importante de ses actions ordinaires. La prédécesseure d’Oxford a entrepris de se départir de biens qui avaient une juste valeur marchande élevée, ainsi qu’un prix de base rajusté (PBR) et une fraction non amortie du coût en capital (FNACC) faibles. Une série de sociétés en commandite de premier palier a été créée, de sorte que les biens ont été transférés à ces sociétés de personnes. Aux termes de l’article 97 de la Loi, les biens détenus par les sociétés de personnes ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles. Les commanditaires des sociétés de personnes ont fusionné, ce qui a mené à la création de l’intimée. Cette dernière est devenue admissible à une majoration au titre du paragraphe 88(1) de la Loi. Elle a ainsi pu augmenter, ou majorer, le PBR des participations qu’elle détenait dans les sociétés de personnes. Des sociétés de personnes de second palier ont été créées. En 2004, les sociétés de personnes de premier palier ont transféré en franchise d’impôt les biens immobiliers aux sociétés de personnes de second palier sous le régime du paragraphe 97(2) de la Loi. Par conséquent, les sociétés de personnes de second palier avaient une juste valeur marchande élevée, et leurs participations dans les sociétés de personnes avaient un PBR faible. Les biens immobiliers ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles. L’intimée a acquis des participations dans les sociétés de personnes de second palier. Elle s’est prévalue d’une deuxième majoration et a augmenté le PBR de ces participations. Par conséquent, les participations que l’intimée détenait dans les sociétés de personnes de second palier avaient une juste valeur marchande et un PBR élevés, tandis que les biens immobiliers ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles. La vente des participations de l’intimée dans les sociétés de personnes n’a généré qu’un faible gain en capital imposable, voire aucun. Même si les participations ont été vendues à des entités exonérées d’impôt, le paragraphe 100(1) de la Loi, qui concerne la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt dans des circonstances où les actifs sous-jacents comprennent des biens, ne s’appliquait pas. Par conséquent, l’impôt sur la récupération latente et les gains accumulés inhérents aux biens immobiliers sous-jacents, qui avait été reporté grâce aux roulements, a été évité complètement.

Le ministre est arrivé à la conclusion que, bien que la série d’opérations ait été conforme à la loi, elle menait à un résultat abusif. Plus particulièrement, les roulements et les majorations ont servi à augmenter le PBR des participations dans les sociétés de personnes de premier et de second paliers, ce qui a permis à l’intimée de contourner l’application du paragraphe 100(1). La nouvelle cotisation a refusé l’ensemble des majorations et a appliqué le paragraphe 100(1) au gain en capital en résultant, ce qui a entraîné une diminution du PBR des participations dans les sociétés de personnes et une augmentation de 148 187 560 $ du gain en capital réalisé par l’intimée lors de la vente des participations aux entités exonérées d’impôt.

La C.C.I. a conclu que, puisque la période de détention de trois ans prévue au paragraphe 69(11) de la Loi avait été respectée en l’espèce, il n’y avait eu aucun abus du paragraphe 97(2). La C.C.I. a également jugé que les modifications apportées à l’article 88 en 2012 étaient pertinentes dans le contexte de l’interprétation de l’objet et de l’esprit des dispositions relatives à la majoration. Elle a ensuite conclu que l’objet des articles 88 et 98, tels qu’ils étaient libellés avant ces modifications, n’était pas d’empêcher la majoration « indirecte », de préserver la récupération ou de rejeter une majoration en fonction de la nature des actifs détenus par les sociétés de personnes. Elle a par la suite conclu que l’ajout du sous-alinéa 88(1)d)(ii.1), qui aurait empêché le résultat obtenu par l’intimée, constituait un changement dans le droit et non une clarification du droit. Ainsi, le recours aux majorations par l’intimée n’a pas contrecarré l’objet ou l’esprit des dispositions invoquées. La C.C.I. a conclu en outre qu’étant donné que le PBR des participations dans les sociétés de personnes et le gain résultant de leur disposition avaient été correctement calculés compte tenu des majorations, il n’y avait eu aucun abus du paragraphe 100(1).

L’appelante a fait valoir que la C.C.I. a circonscrit l’effet des dispositions pertinentes à leur libellé, au lieu de leur donner un sens qui concorde avec leur objet et leur esprit, et que l’interprétation étroite qui en résulte ne pouvait être confirmée, puisqu’elle était fondée sur une évaluation erronée de l’incidence des modifications apportées à la Loi après la série d’opérations en question.

Il s’agissait de savoir si l’élimination du gain en capital sur la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt au moyen de majorations et l’évitement consécutif de la récupération au titre du paragraphe 100(1) ont contrecarré cette disposition et les autres dispositions invoquées pour obtenir ce résultat.

Arrêt : l’appel doit être accueilli en partie.

La conclusion de la C.C.I. selon laquelle « la certitude, la prévisibilité et l’équité en droit fiscal » exigent que la limite de trois ans prévue au paragraphe 69(11) soit appliquée au paragraphe 97(2) n’était pas justifiée. L’objet et l’esprit des paragraphes 97(2) et 97(4) de la Loi consistent à assurer le suivi des attributs fiscaux des biens amortissables afin de veiller à ce que la récupération et les gains reportés soient imposés ultérieurement. Ce traitement ne s’applique pas dans toutes les situations où intervient une entité exonérée d’impôt. Le législateur n’a pas prévu toutes les situations où l’interposition d’une entité exonérée d’impôt peut entraîner une perte de revenus. Par contre, compte tenu du paragraphe 100(1), on voit que la récupération latente découlant de la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt n’était pas censée être non imposable. La C.C.I. n’a pas interprété le paragraphe 97(2) de cette façon. Elle a mis l’accent sur la période de détention de trois ans prévue au paragraphe 69(11) de la Loi et conclu que le paragraphe 97(2) n’est pas contrecarré lorsque la récupération reportée n’est pas imposée, pour autant que la période de détention soit respectée. Toutefois, le paragraphe 69(11) ne saurait s’appliquer en l’espèce, parce que, même s’il était par ailleurs applicable, la période de détention de trois ans a été respectée. L’application du paragraphe 69(11) n’est pas limitée aux sociétés de personnes. On ne saurait donc affirmer que le paragraphe 69(11) visait au départ l’utilisation de roulements prévus par le paragraphe 97(2). Son application est beaucoup plus large. Il s’applique à toute série d’opérations amorcée par une disposition pour un produit inférieur à la juste valeur marchande, peu importe s’il y a eu un roulement aux termes du paragraphe 97(2) ou de toute autre disposition. Le paragraphe 97(2) vise à reporter l’impôt; il ne vise pas à imposer qui que ce soit. Étant donné que la seule raison pour laquelle le législateur souhaiterait préserver les attributs fiscaux des biens transférés à une société de personnes par suite d’un roulement est de pouvoir imposer ultérieurement les gains reportés et la récupération latente, le fait que les gains et la récupération reportés ne seront jamais imposés contrecarre l’objet et l’esprit du paragraphe 97(2).

Les majorations ont contrecarré l’objet et l’esprit des alinéas 88(1)c) et d) et du paragraphe 98(3) de la Loi, dans la mesure où elles ont permis à l’intimée d’éviter la récupération latente à l’égard des biens amortissables détenus par les sociétés de personnes. Les deux majorations étaient essentielles pour permettre à l’intimée de contourner l’application du paragraphe 100(1). La majoration appliquée à un bien amortissable à l’égard duquel l’amortissement a déjà été réclamé augmentera la FNACC et réduira la récupération latente, qui est assujettie à un taux d’inclusion de 100 p. 100. Cependant, le même raisonnement ne s’applique pas aux gains réalisés lors de la disposition de biens amortissables, qui, comme tous les autres gains en capital, sont assujettis à un taux d’inclusion de 50 p. 100. Compte tenu de la raison d’être des dispositions relatives à la majoration, une majoration qui augmente le coût en capital plutôt que la FNACC de biens amortissables ne poserait pas problème. La question de savoir si le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) est de droit nouveau dans le contexte de la RGAÉ doit être examinée en tenant compte du sens des dispositions antérieures, interprétées en fonction de leur raison d’être. Lorsque la loi antérieure est interprétée en fonction de son objet et de son esprit, comme il se doit, la modification n’est pas de droit nouveau. L’effet pratique est simple: il ne sera plus nécessaire d’invoquer la RGAÉ pour éviter le résultat obtenu en l’espèce. La position du ministre, en l’espèce, reposait fermement sur l’objet et l’esprit des alinéas 88(1)c) et d) et du paragraphe 98(3).

La C.C.I. a donné au paragraphe 100(1) le sens qui correspond à son libellé. Il incombait à la C.C.I. d’analyser l’objet et l’esprit du paragraphe 100(1). Cette disposition inclut dans le revenu la totalité du gain découlant de la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt, dans la mesure où le gain est attribuable à des biens amortissables. Le juge de la C.C.I. devait se pencher sur la question de savoir pourquoi cette disposition prévoit une telle inclusion. La réponse est la suivante: le législateur voulait prévoir le paiement de l’impôt sur la récupération latente, qui autrement demeurerait impayé lors de la vente subséquente des biens amortissables. Pour cette raison, force est de conclure que le résultat obtenu en l’espèce a contrecarré l’objet et l’esprit du paragraphe 100(1), parce que l’impôt sur la récupération latente à l’égard des biens amortissables détenus par les sociétés de second palier au moment de la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt ne sera jamais payé. Le résultat global est le suivant: le paragraphe 100(1) a été contourné grâce à l’élimination du gain en capital qui aurait normalement résulté de la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt. L’intimée a réussi à rendre l’alinéa 100(1)b) inopérant en ayant recours à des majorations pour annuler le gain en capital et en créant une dichotomie entre le coût fiscal des participations dans les sociétés de personnes et celui des biens sous-jacents. Ainsi, la raison pour laquelle les dispositions relatives à la majoration excluent les biens amortissables, aux termes du sous-alinéa 88(1)c)(iii) et de l’alinéa 98(3)e), a été contrecarrée. La Couronne s’est acquittée de son fardeau de décrire l’objet et l’esprit des dispositions invoquées par l’intimée pour atteindre ce résultat et de démontrer qu’ils ont été contrecarrés.

Il n’a pas été démontré qu’un abus de l’alinéa 100(1)b) ou de toute autre disposition pertinente avait résulté du fait que l’augmentation de la valeur des biens amortissables, du coût en capital à la juste valeur marchande, n’était pas reflétée dans le gain en capital réalisé lors de la vente des participations dans les sociétés de personnes. Il n’y a eu aucun abus du paragraphe 97(2), dans la mesure où cette disposition a été invoquée pour reporter l’impôt à payer sur cette partie de l’augmentation de la valeur des biens amortissables. Ne pas reconnaître les coûts qui ont réellement été engagés, mais qui disparaîtraient lors de la fusion verticale ou de la dissolution d’une société de personnes, va à l’encontre de l’intégrité du régime des gains en capital parce qu’il permettrait la réalisation subséquente d’un gain en capital alors qu’il n’y a eu aucun gain économique. C’est pour prévenir ce résultat que les dispositions relatives à la majoration ont été adoptées. La seule façon pour le ministre de refuser de reconnaître cette majoration serait d’insister sur une interprétation des dispositions en cause qui est axée sur le sens des mots, plus particulièrement sur l’exclusion non limitative des biens amortissables. Cependant, la Couronne ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Lorsque la RGAÉ est invoquée, il faut appliquer la même méthode d’interprétation à la question de savoir s’il y a eu abus et à celle de savoir quels rajustements corrélatifs sont nécessaires pour corriger la situation. Le ministre ne pouvait donc pas établir une nouvelle cotisation à l’égard de l’intimée au motif que le résultat global obtenu par cette utilisation circonscrite des dispositions relatives à la majoration donnait lieu à un abus.

La nouvelle cotisation a été renvoyée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation, en tenant pour acquis que l’application du paragraphe 100(1) a donné lieu à un gain en capital imposable de 116 591 744 $ et non de 148 187 562 $.

LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS

Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1, art. 13(21) « bien amortissable », 54 « immobilisations », 69(11), 85(1), 88, 96(1)a), 97, 98, 100(1), 245.

Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, art. 45(2),(3).

Règlement de l’impôt sur le revenu, C.R.C., ch. 945, art. 6204(1)b).

JURISPRUDENCE CITÉE

décisions appliquées :

Copthorne Holdings Ltd. c. Canada, 2011 CSC 63, [2011] 3 R.C.S. 721; Hypothèques Trustco Canada c. Canada, 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601.

décisions examinées:

Univar Holdco Canada ULC c. Canada, 2017 CAF 207; Banque Continentale du Canada c. Canada, [1994] A.C.I. no 585 (QL), conf. par [1996] A.C.F. no 765 (QL) (C.A.).

décisions citées:

Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235; Water’s Edge Village Estates (Phase II) Ltd. c. Canada (C.A.), 2002 CAF 291, [2003] 2 C.F. 25; Montminy c. Canada, 2017 CAF 156.

DOCTRINE CITÉE

Ministère des Finances Canada. Le plan d’action économique de 2012, 29 mars 2012.

Krishna, Vern. The Fundamentals of Canadian Income Tax, 9e éd. Toronto : Thomson/Carswell, 2006.

APPEL interjeté à l’encontre d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt (2016 CCI 204), qui a accueilli l’appel interjeté par l’intimée à l’encontre de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national à l’égard de son année d’imposition 2006 sur le fondement de la règle générale anti-évitement prévue à l’article 245 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Appel accueilli en partie.

ONT COMPARU

Robert Carvalho et Perry Derksen pour l’appelante.

Al Meghji, Jack Silverson et Pooja Mihailovich pour l’intimée.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

La sous-procureur générale du Canada pour l’appelante.

Osler, Hoskin & Harcourt LLP, Toronto, pour l’intimée.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

[1]        Le juge en chef Noël : La Cour est saisie de l’appel interjeté par Sa Majesté la Reine (la Couronne ou l’appelante) à l’encontre d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt par laquelle le juge D’Arcy (le juge de la Cour de l’impôt) a accueilli l’appel interjeté par Oxford Properties Group Inc. (Oxford ou l’intimée) à l’encontre de la nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (le ministre) à l’égard de son année d’imposition 2006. La nouvelle cotisation avait été établie sur le fondement de la règle générale anti-évitement (RGAÉ) prévue à l’article 245 de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1 (la Loi).

[2]        Le juge de la Cour de l’impôt a conclu que la série d’opérations effectuées par Oxford (le transfert en franchise d’impôt de trois biens immobiliers par l’entremise d’une structure de sociétés de personnes à paliers multiples, l’augmentation du prix de base rajusté des participations dans les sociétés de personnes et la vente de ces participations à des entités exonérées d’impôt de façon à ce qu’aucun impôt ne soit payé sur la récupération latente et les gains accumulés à l’égard des biens détenus par les sociétés de personnes) ne constituait pas un évitement fiscal abusif.

[3]        La Couronne prétend en appel que le juge de la Cour de l’impôt, lorsqu’il a tiré cette conclusion, a mal interprété les dispositions de la Loi qui ont été invoquées au soutien de ce traitement fiscal avantageux. La Couronne nous invite à interpréter ces dispositions en fonction de leur objet et de leur esprit, comme la RGAÉ l’exige, et à tirer la conclusion inverse.

[4]        Pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que la bonne interprétation des dispositions en cause étaye la thèse de la Couronne et que la conclusion du juge de la Cour de l’impôt selon laquelle il n’y a eu aucun abus ne saurait être maintenue. Cependant, je souscris également à l’argument subsidiaire de l’intimée, selon lequel les rajustements corrélatifs effectués par le ministre au titre du paragraphe 245(5) ne sont pas raisonnables, car ils surpassent l’abus dans l’application des dispositions en cause. Je propose par conséquent d’accueillir l’appel en partie seulement et de renvoyer la nouvelle cotisation au ministre pour réexamen et nouvelle cotisation à la lumière des présents motifs.

[5]        Les dispositions de la Loi qui sont pertinentes dans le contexte de l’analyse qui suit sont reproduites en annexe.

LES FAITS

[6]        La série d’opérations en cause est complexe et s’est déroulée sur une période d’environ cinq ans. Elle est énoncée en détail dans l’exposé conjoint des faits, reproduit à l’annexe A du jugement porté en appel (Oxford Properties Group Inc. c. La Reine, 2016 CCI 204 [motifs]). Voici un aperçu des opérations effectuées qui met l’accent sur les dispositions législatives invoquées pour obtenir l’avantage fiscal.

[7]        La prédécesseure de l’intimée (la prédécesseure d’Oxford) était une société canadienne cotée en bourse et l’une des sociétés immobilières les plus importantes en Amérique du Nord. En 2001, BPC Properties Inc. a présenté une proposition en vue de l’achat d’une partie importante des actions ordinaires de la prédécesseure d’Oxford. Les parties ont convenu que, avant la prise de contrôle, la prédécesseure d’Oxford entreprendrait une réorganisation et se départirait de certains biens immobiliers. Les biens en question, à savoir le complexe Atria, le centre Richmond-Adelaide et le centre Eaton de Calgary (collectivement, les biens immobiliers), avaient une juste valeur marchande élevée, ainsi qu’un prix de base rajusté (PBR) et une fraction non amortie du coût en capital (FNACC) faibles.

[8]        Conformément à cette entente, une première série de sociétés en commandite a été créée, à savoir OPGI Office LP et MRC Office LP (collectivement, les sociétés de personnes de premier palier). Au moyen d’un roulement prévu au paragraphe 97(2), le centre Richmond-Adelaide et le centre Eaton de Calgary ont été transférés à OPGI Office LP, tandis que le complexe Atria a été transféré à MRC Office LP. Les choix faits correspondaient au PBR et à la FNACC des biens. Ainsi, les sociétés de personnes avaient une juste valeur marchande élevée, mais les participations des associés dans les sociétés de personnes avaient un PBR faible. Aux termes de l’article 97, les biens détenus par les sociétés de personnes ont conservé leurs attributs fiscaux, c’est-à-dire leur PBR et leur FNACC faibles.

[9]        D’autres remaniements ont mené à la fusion d’OPGI Amalco et de MRC Amalco, les commanditaires des sociétés de personnes de premier palier. Cette nouvelle entité a par la suite été fusionnée avec son actionnaire unique, ce qui a mené à la création de l’intimée, Oxford. Après la fusion, Oxford détenait les participations dans les sociétés de personnes de premier palier que détenaient auparavant OPGI Amalco et MRC Amalco.

[10]      Puisqu’Oxford avait été créée par la voie d’une fusion verticale, elle est devenue admissible à une majoration au titre du paragraphe 88(1), qui permet à une société mère de majorer le coût aux fins de l’impôt des immobilisations non amortissables détenues par sa filiale au moment de la fusion. Oxford a ainsi pu augmenter, ou majorer, le PBR des participations qu’elle détenait dans les sociétés de personnes de premier palier et que détenaient auparavant OPGI Amalco et MRC Amalco. Par conséquent, les sociétés de personnes de premier palier avaient maintenant une juste valeur marchande élevée et les participations détenues par les associés avaient un PBR élevé, tandis que les biens détenus par les sociétés de personnes ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles.

[11]      La prochaine étape dans la série d’opérations a été la création de sociétés de personnes de second palier, dont les sociétés de personnes de premier palier sont devenues les associées : MRC Office LP est devenue une associée de la société en commandite Atria LP, tandis qu’OPGI Office LP est devenue une associée des sociétés en commandite RAC LP et Calgary Eaton Centre LP (CEC LP). Oxford était donc une associée des sociétés de personnes de premier palier, qui, elles, détenaient des participations dans trois nouvelles sociétés de personnes (Atria LP, RAC LP et CEC LP sont collectivement appelées les sociétés de personnes de second palier).

[12]      Le 1er février 2004, les sociétés de personnes de premier palier ont transféré en franchise d’impôt les biens immobiliers aux sociétés de personnes de second palier sous le régime du paragraphe 97(2). En échange de la dette et de participations additionnelles dans les sociétés de personnes, MRC Office LP a transféré le complexe Atria à Atria LP, et OPGI Office LP a transféré le centre Richmond-Adelaide à RAC LP et son intérêt dans le centre Eaton de Calgary à CEC LP. Les choix effectués correspondaient encore une fois au coût aux fins de l’impôt des biens transférés, c’est-à-dire le PBR et la FNACC, sous réserve d’une légère variation liée aux terrains sur lesquels se situent le centre Eaton de Calgary et le complexe Atria. Par conséquent, les sociétés de personnes de second palier avaient une juste valeur marchande élevée, et leurs participations dans les sociétés de personnes avaient un PBR faible. Comme lors des premiers transferts en franchise d’impôt, les biens immobiliers ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles.

[13]      Les sociétés de personnes de premier palier ont ensuite été dissoutes. Les biens des sociétés de personnes de premier palier, y compris les participations qu’elles détenaient dans les sociétés de personnes de second palier, ont été distribués à leurs associés. Oxford a ainsi acquis des participations dans les sociétés de personnes de second palier. En outre, un choix a été effectué au titre du paragraphe 98(3), ce qui a permis à Oxford de se prévaloir d’une deuxième majoration et d’augmenter le PBR des participations qu’elle détenait dans les sociétés de personnes de second palier. Par conséquent, les participations qu’Oxford détenait dans les sociétés de personnes de second palier avaient une juste valeur marchande et un PBR élevés, tandis que les biens immobiliers ont conservé leur PBR et leur FNACC faibles. Telle était la situation lorsqu’Oxford a cédé ses participations dans les sociétés de personnes de second palier aux entités exonérées d’impôt, entre septembre 2005 et juillet 2006.

[14]      Étant donné le PBR élevé des participations dans les sociétés de personnes vendues par Oxford, la vente n’a généré qu’un faible gain en capital imposable, voire aucun, et a même entraîné, dans un cas, une perte en capital. Ainsi, même si les participations ont été vendues à des entités exonérées d’impôt, le paragraphe 100(1) ne s’appliquait pas. Par conséquent, l’impôt sur la récupération latente et les gains accumulés inhérents aux biens immobiliers sous-jacents, qui avait été reporté grâce aux roulements, a été évité complètement.

-           La nouvelle cotisation

[15]      Le ministre a examiné plusieurs thèses à l’égard de la cotisation avant de décider, en fin de compte, de se fonder sur la RGAÉ (dossier d’appel, vol. 3, page 342). Le ministre est arrivé à la conclusion que, bien que la série d’opérations ait été conforme à la loi, elle menait à un résultat abusif. Plus particulièrement, les roulements et les majorations ont servi à augmenter le PBR des participations dans les sociétés de personnes de premier et de second paliers, ce qui a permis à Oxford de contourner l’application du paragraphe 100(1).

[16]      La nouvelle cotisation refuse l’ensemble des majorations et applique le paragraphe 100(1) au gain en capital en résultant. Il en résulte un gain en capital imposable de 148 187 562 $. Il est admis que ce gain en capital imposable représente une récupération de 116 591 744 $ et un gain en capital imposable de 32 203 408 $, dont une partie (21 285 500 $) est attribuable aux biens amortissables et une autre partie (10 917 908 $) est attribuable aux biens non amortissables (résumé des sommes pertinentes à inclure dans le revenu en fonction d’autres méthodes de calcul du revenu; conséquences de la RGAÉ; dossier d’appel, vol. 2, pages 206, 422, 426 et 430).

LA DÉCISION DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

[17]      Après avoir rejeté la prétention d’Oxford selon laquelle l’avantage fiscal qu’elle avait obtenu n’était pas le résultat d’une série d’opérations d’évitement (motifs, paragraphe 76), le juge de la Cour de l’impôt a consacré le reste de son analyse à la question de l’abus, en mettant l’accent sur chacune des mesures prises par Oxford pour contourner l’application du paragraphe 100(1).

[18]      En ce qui a trait aux roulements, le juge de la Cour de l’impôt a conclu que le paragraphe 97(2) permet « de réduire au minimum » l’impôt à payer lors du transfert d’un bien à une société de personnes et que le paragraphe 97(4) préserve la récupération lorsque le bien ainsi transféré est un bien amortissable (motifs, paragraphes 107 et 111). Le juge de la Cour de l’impôt a également conclu que, lorsqu’une entité exonérée d’impôt achète une participation dans une société de personnes, le paragraphe 97(2) doit être examiné à la lumière de l’alinéa 69(11)b) (motifs, paragraphe 121). Puisque la période de détention de trois ans prévue au paragraphe 69(11) a été respectée en l’espèce, le juge de la Cour de l’impôt a conclu qu’il n’y avait eu aucun abus du paragraphe 97(2). Il a également conclu que, bien que le paragraphe 97(2) vise à préserver le coût fiscal et la récupération éventuelle à l’égard des biens immobiliers, le fait que peu ou pas d’impôt a été payé sur la vente des participations dans les sociétés de personnes ne contrevient pas au paragraphe 97(2), car cette disposition n’a pas pour objet d’imposer les associés, lorsqu’ils disposent de leur participation dans une société de personnes, sur les gains accumulés et la récupération latente à l’égard des biens détenus par la société de personnes (motifs, paragraphes 181, 186 et 188).

[19]      En ce qui concerne l’objet et l’esprit des dispositions relatives à la majoration, le juge de la Cour de l’impôt a statué que le paragraphe 88(1) empêche la double imposition en permettant à la société mère de transférer le PBR de ses actions dans la filiale, PBR qui disparaîtrait autrement, à d’autres immobilisations non amortissables, tout en préservant les attributs fiscaux des biens amortissables (motifs, paragraphes 143 à 145). Le paragraphe 98(3) a un objet et un effet similaires, mais il vise à préserver le PBR d’une participation dans une société de personnes appelée à disparaître (motifs, paragraphes 160 à 167).

[20]      Le juge de la Cour de l’impôt a également jugé que les modifications apportées à l’article 88 en 2012 étaient pertinentes dans le contexte de l’interprétation de l’objet et de l’esprit des dispositions relatives à la majoration (motifs, paragraphe 153). Il a conclu que l’objet des articles 88 et 98, tels qu’ils étaient libellés avant ces modifications, n’était pas d’empêcher la majoration « indirecte », de préserver la récupération ou de rejeter une majoration en fonction de la nature des actifs détenus par les sociétés de personnes (motifs, paragraphe 205). Il a par la suite conclu que l’ajout du sous-alinéa 88(1)d)(ii.1), qui aurait empêché le résultat obtenu par Oxford, constitue un changement dans le droit et non une clarification du droit (motifs, paragraphe 211). Ainsi, le recours aux majorations par Oxford n’a pas contrecarré l’objet ou l’esprit des dispositions invoquées.

[21]      Le juge de la Cour de l’impôt s’est ensuite penché sur le paragraphe 100(1). Il a fait remarquer que l’objet de cette disposition était clair : imposer, à un taux de 50 p. 100, la partie du gain en capital réalisé lors de la vente d’une participation dans une société de personnes qui est attribuable à une augmentation de la valeur de biens non amortissables, et imposer, à un taux de 100 p. 100, toute partie du gain qui est attribuable à des biens amortissables (motifs, paragraphes 172 et 173). Le fait d’imposer à un taux de 100 p. 100 la partie du gain qui est attribuable à une augmentation de la valeur de biens amortissables permet de veiller à ce que la « récupération de l’amortissement » soit imposée au même taux que si les biens avaient été vendus directement à une entité exonérée d’impôt (motifs, paragraphe 174).

[22]      Cependant, l’application du paragraphe 100(1) est fondée sur le gain calculé par ailleurs sous le régime de la Loi (motifs, paragraphe 217). Étant donné que le PBR des participations dans les sociétés de personnes et le gain résultant de leur disposition ont été correctement calculés compte tenu des majorations, il n’y a eu aucun abus du paragraphe 100(1). De plus, si le législateur avait voulu que le paragraphe 100(1) opère de la même façon que le sous-alinéa 88(1)d)(ii.1), il aurait utilisé un libellé semblable (motifs, paragraphe 216).

[23]      Ayant conclu qu’aucun abus n’avait été établi, le juge de la Cour de l’impôt a accueilli l’appel interjeté par l’intimée en précisant que celle-ci avait procédé à un exercice légitime de réduction de l’impôt (motifs, paragraphe 219).

LA POSITION DES PARTIES

-           La Couronne

[24]      L’appelante prétend qu’Oxford a eu recours au paragraphe 97(2), à l’alinéa 88(1)d) et au paragraphe 98(3) dans le but d’éviter la récupération qui découlerait normalement de l’application du paragraphe 100(1) (mémoire de l’appelante, paragraphe 43). En concluant à l’absence d’abus, le juge de la Cour de l’impôt a mal analysé les dispositions en question et omis de tenir compte du résultat global obtenu par Oxford (mémoire de l’appelante, paragraphe 36).

[25]      La Couronne soutient que l’analyse du paragraphe 100(1) effectuée par le juge de la Cour de l’impôt s’attachait seulement au libellé (mémoire de l’appelante, paragraphe 51). Le juge de la Cour de l’impôt a également négligé le fait que le paragraphe 100(1) se trouve à la sous-section J, qui porte sur les sociétés de personnes, et qu’il concerne les conséquences fiscales de la vente d’une participation dans une société de personnes (mémoire de l’appelante, paragraphe 51). Il ne s’est pas non plus demandé pourquoi le paragraphe 100(1) modifie le calcul du gain en capital de telle manière (mémoire de l’appelante, paragraphe 52). Selon la Couronne, le paragraphe 100(1) permet de veiller à ce que la récupération soit réalisée et imposée lors de la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt, car autrement elle échapperait complètement à l’imposition (mémoire de l’appelante, paragraphe 56).

[26]      La Couronne fait également valoir que le juge de la Cour de l’impôt a commis deux erreurs dans son analyse du paragraphe 97(2). Premièrement, il a confondu les concepts de report d’impôt et d’évitement fiscal. Bien que le paragraphe 97(2) permette le report d’un gain en capital qui serait par ailleurs imposable, au motif qu’il n’y a eu aucun changement dans la situation économique de l’auteur du transfert, il n’a pas été conçu pour éviter l’imposition du gain reporté (mémoire de l’appelante, paragraphe 63). Deuxièmement, le juge de la Cour de l’impôt a mal compris le paragraphe 69(11), ce qui a brouillé sa compréhension du paragraphe 97(2). Le paragraphe 69(11) ne s’appliquait pas, non pas parce que la période de détention de trois ans a été respectée, mais plutôt parce que les biens immobiliers n’ont pas fait l’objet d’une vente ultérieure. Même si les participations dans les sociétés de personnes constituaient des « biens de remplacement », aucune exemption ne s’appliquait, parce que le vendeur, Oxford, était une société imposable (mémoire de l’appelante, paragraphe 71). La Couronne soutient également que le paragraphe 69(11) vise une situation de fait différente et qu’il a sa propre raison d’être; le juge de la Cour de l’impôt aurait dû axer son analyse sur le paragraphe 100(1) (mémoire de l’appelante, paragraphe 72).

[27]      La Couronne fait également valoir que la majoration prévue à l’article 88 vise à préserver le coût fiscal des immobilisations non amortissables, qui disparaîtrait autrement. La majoration permet de transférer pareils coûts à d’autres immobilisations non amortissables ayant des attributs fiscaux similaires. Les biens amortissables ne sont pas admissibles à la majoration et sont imposés différemment. En outre, le paragraphe 98(3) exclut les biens amortissables, encore une fois parce qu’il s’agit [traduction] « d’actifs de nature différente » (mémoire de l’appelante, paragraphes 73 à 80).

[28]      Rien dans le régime légal en vigueur à l’époque ne donnait à penser que la majoration de la valeur des biens amortissables par l’interposition d’une société de personnes était autorisée. La modification de 2012 confirme donc simplement qu’on ne peut faire indirectement ce qu’il est interdit de faire directement. En effet, les Renseignements supplémentaires budgétaires publiés au moment de l’adoption de la modification indiquent que la mesure précise le droit, et ne vise pas à le modifier (mémoire de l’appelante, paragraphe 85).

[29]      La Couronne fait également valoir que le juge de la Cour de l’impôt a commis une erreur en tenant compte du traitement par le ministre des opérations mettant en jeu les sociétés de personnes Dufferin Mall et René Lévesque afin de déterminer s’il y avait eu abus des alinéas 88(1)c) et d) et du paragraphe 98(3). L’analyse relative à la RGAÉ n’est pas une analyse comparative, et le traitement par le ministre des biens visés par ces opérations n’est pas pertinent. Quoi qu’il en soit, le ministre n’a pas invoqué la RGAÉ dans le contexte des opérations mettant en jeu la société de personnes Dufferin Mall, parce que la participation dans la société a été vendue à une entité imposable de sorte que les impôts reportés seront payés ultérieurement, tandis que le transfert des biens visés par les opérations mettant en jeu les sociétés de personnes René Lévesque ne faisait pas partie de la série d’opérations (mémoire de l’appelante, paragraphes 99 à 103).

[30]      En fin de compte, la série d’opérations en question a permis de contourner l’application du paragraphe 100(1). Il serait donc raisonnable de refuser les majorations pour que le paragraphe 100(1) produise l’effet voulu. Le paragraphe 100(1) [traduction] « impose des conséquences » en ce sens que les gains en capital réalisés à l’égard de biens amortissables sont imposés dans leur entièreté. C’est le prix que le législateur fait payer dans les cas où le contribuable tente d’éviter la récupération (mémoire de l’appelante, paragraphe 106).

-           Oxford

[31]      L’intimée souscrit à la conclusion tirée par le juge de la Cour de l’impôt et adopte essentiellement les motifs qu’il a donnés. Elle ajoute que le juge de la Cour de l’impôt a interprété les dispositions en question de manière téléologique et qu’il a tenu compte du résultat global de la série d’opérations (mémoire de l’intimée, paragraphe 70). Subsidiairement, si la RGAÉ s’applique, Oxford fait valoir que les rajustements fiscaux effectués dans la nouvelle cotisation outrepassent l’abus qu’ils visent à corriger et qu’ils sont par conséquent déraisonnables (mémoire de l’intimée, paragraphe 122).

[32]      Le juge de la Cour de l’impôt a bien compris que le paragraphe 97(2) doit être interprété à la lumière du paragraphe 69(11). Le paragraphe 69(11) montre que le législateur a pris la décision délibérée de permettre que la récupération latente et les gains en capital accumulés ne soient pas imposés dans le contexte d’opérations faisant intervenir un acheteur non assujetti à l’impôt si la période de détention de trois ans est respectée (mémoire de l’intimée, paragraphe 96). Oxford fait valoir que l’alinéa 69(11)b) concerne [traduction] « exclusivement les transferts avec report d’impôt à des sociétés de personnes aux termes du paragraphe 97(2) » et qu’il prévoit les circonstances limitées dans lesquelles il est possible de refuser l’avantage conféré par un transfert en franchise d’impôt (mémoire de l’intimée, paragraphe 56).

[33]      En outre, le juge de la Cour de l’impôt a conclu avec raison que toute règle interdisant la « majoration indirecte » doit être fondée sur une politique générale qui ne repose pas sur la Loi (mémoire de l’intimée, paragraphe 107). Il a également établi à juste titre que les modifications de 2012 modifient cette politique (mémoire de l’intimée, paragraphe 119). Oxford fait valoir que l’article 88 énonce de façon expresse et exhaustive les circonstances dans lesquelles la majoration peut être refusée. Ces règles ne prévoient d’aucune manière le refus de la majoration dans le cas où les biens sont regroupés, puis vendus à une entité exonérée d’impôt (mémoire de l’intimée, paragraphe 51).

[34]      Oxford soutient également, comme le juge de la Cour de l’impôt l’a conclu à bon droit, que le paragraphe 100(1) ne vise pas à imposer les gains accumulés sur les biens détenus par une société de personnes. Le point de départ est le gain réel calculé en fonction des règles habituelles (mémoire de l’intimée, paragraphes 115 et 116).

[35]      Subsidiairement, si la RGAÉ s’applique, Oxford fait valoir que la cotisation établie par la Couronne est punitive, parce que le refus des majorations a une incidence sur le calcul de l’ensemble du gain en capital et non seulement de la récupération (mémoire de l’intimée, paragraphe 124). Le rajustement ne devrait s’appliquer qu’à la récupération latente, ce qui correspond, selon la thèse de la Couronne, au seul revenu qui a été évité. Oxford ajoute que, quoi qu’il en soit, le rajustement devrait être corrigé de façon à ce qu’elle ne soit pas imposée sur 100 p. 100 de la partie du gain en capital attribuable aux biens amortissables (mémoire de l’intimée, paragraphes 121 à 126).

ANALYSE ET DÉCISION

[36]      L’analyse fondée sur la RGAÉ exige que l’on réponde à trois questions : Y a-t-il eu avantage fiscal? Si oui, les opérations ayant généré l’avantage fiscal étaient-elles des opérations d’évitement? Si oui, les opérations d’évitement étaient-elles abusives? (Copthorne Holdings Ltd. c. Canada, 2011 CSC 63, [2011] 3 R.C.S. 721 (Copthorne), au paragraphe 33, citant Hypothèques Trustco Canada c. Canada, 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601 [Trustco], aux paragraphes 18, 21 et 36).

[37]      En l’espèce, l’intimée a reconnu que donnent lieu à un avantage fiscal le report de l’impôt à payer sur les gains accumulés et la récupération au titre du paragraphe 97(2), la majoration du PBR des participations dans les sociétés de personnes de premier et de second paliers sous le régime des paragraphes 88(1) et 98(3) et la réduction de l’impôt payable sur la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt (motifs, paragraphe 58). Pour ce qui est de la deuxième question, le juge de la Cour de l’impôt a conclu que la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt faisait partie d’une série d’opérations comprenant une ou plusieurs opérations d’évitement (motifs, paragraphe 76). L’intimée ne conteste pas cette conclusion en appel.

[38]      La seule question qui est soulevée dans le présent appel repose sur l’analyse relative à l’abus. Plus précisément, l’élimination du gain en capital sur la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt au moyen de majorations et l’évitement consécutif de la récupération au titre du paragraphe 100(1) contrecarrent-ils cette disposition et les autres dispositions invoquées pour obtenir ce résultat?

-      La norme de contrôle

[39]      La question de savoir s’il y a eu abus est une question mixte de fait et de droit, et elle est par conséquent assujettie à la norme de l’erreur manifeste et dominante (Trustco, au paragraphe 44; Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235 (Housen), au paragraphe 37). Cependant, l’analyse relative à l’abus se fait en deux étapes. La première étape consiste à déterminer l’objet et l’esprit des dispositions invoquées au soutien de l’avantage fiscal, et la deuxième étape consiste à décider si l’avantage fiscal obtenu contrecarre les dispositions compte tenu de l’interprétation qui en a été donnée (Trustco, au paragraphe 44). L’objet et l’esprit des dispositions sont cernés grâce à l’interprétation législative (Copthorne, au paragraphe 70). Il s’agit d’une question de droit et d’une partie isolable de l’analyse, par conséquent, la norme de la décision correcte y est applicable (Trustco, au paragraphe 44; Housen, aux paragraphes 8 et 37).

-           L’interprétation quand la RGAÉ est invoquée

[40]      Pour bien situer l’analyse, il est utile d’examiner en premier lieu la démarche en matière d’interprétation législative qu’il convient d’adopter dans le contexte de la RGAÉ.

[41]      La distinction entre une interprétation fondée sur le texte et une interprétation fondée sur l’objet ou l’esprit dans le contexte de la RGAÉ est soigneusement définie par la Cour suprême dans l’arrêt Copthorne [au paragraphe 66] :

La RGAÉ est un mécanisme juridique par lequel le législateur confie aux tribunaux la tâche inhabituelle d’aller au-delà du texte de la disposition invoquée par le contribuable pour en déterminer l’objet ou l’esprit. Il se peut qu’une opération du contribuable respecte à la lettre la disposition en cause sans nécessairement être conforme à l’objet ou à l’esprit de celle-ci.

[42]      La Cour explique en outre ce qui suit [au paragraphe 70] :

L’objet ou l’esprit peuvent être circonscrits grâce à la méthode qu’emploie notre Cour pour toute interprétation législative, à savoir une méthode « textuelle, contextuelle et téléologique unifiée » (Trustco, par. 47; Lipson c. Canada, 2009 CSC 1, [2009] 1 R.C.S. 3, par. 26). Bien que la méthode d’interprétation soit la même dans le cas de la RGAÉ, l’analyse vise en l’espèce à dégager un aspect différent de la loi. Dans un cas classique d’interprétation législative, la cour applique l’analyse textuelle, contextuelle et téléologique pour établir le sens du texte de la loi. Dans le cas de la RGAÉ, l’analyse textuelle, contextuelle et téléologique vise à établir l’objet ou l’esprit d’une disposition. Il est alors possible que le sens des mots employés par le législateur soit suffisamment clair. La raison d’être de la disposition peut ne pas ressortir de la seule signification des mots eux-mêmes. Il ne faut cependant pas confondre la détermination de la raison d’être des dispositions applicables de la Loi avec le jugement de valeur quant à ce qui est bien ou mal non plus qu’avec les conjectures sur ce que devrait être une loi fiscale ou sur l’effet qu’elle devrait avoir. [Non souligné dans l’original.]

L’analyse effectuée à la lumière de la RGAÉ peut ainsi mener à un résultat différent de celui qu’on obtient suivant une analyse classique, textuelle, contextuelle et téléologique axée sur le sens des mots employés dans les dispositions en question.

[43]      La Cour suprême explique que, lorsqu’il invoque la RGAÉ, le ministre admet nécessairement que, selon l’approche classique, l’avantage fiscal a été obtenu à bon droit [au paragraphe 109] :

[…] Lorsque le ministre invoque la RGAÉ, il admet que le texte de la loi n’englobe pas la série d’opérations en cause, mais il fait valoir que sa position, bien qu’elle ne prenne pas appui sur ce texte, est fondée sur sa raison d’être, son objet ou son esprit.

[44]      Bien que la RGAÉ soit fondée sur la prémisse selon laquelle l’interprétation d’une disposition qu’elle commande mène à un résultat différent de celui qu’on obtient au moyen d’une analyse fondée sur le texte, la Cour fait remarquer que ce n’est pas toujours le cas [aux paragraphes 110 et 111] :

Je n’écarte pas la possibilité que, dans certains cas, la raison d’être d’une disposition n’ait pas une plus grande portée que son libellé. En pareils cas, la disposition, compte tenu de son contexte et de son objet, peut étayer la prétention que son texte est déterminant parce qu’il correspond à sa raison d’être et l’explique entièrement.

Or, on ne saurait invoquer l’exclusion implicite en la fondant uniquement sur le texte des dispositions relatives au [capital versé] sans égard à leur raison d’être. Si on y faisait droit, cette thèse neutraliserait toujours l’application de la RGAÉ, car les actes du contribuable seraient toujours permis par le texte de la Loi. Comme le signale la Cour d’appel fédérale dans OSFC, si la Cour doit s’en tenir au seul libellé de la disposition en cause, sans égard à sa raison d’être, la RGAÉ deviendra inévitablement inutile (par. 63). [Non souligné dans l’original.]

[45]      Il ressort clairement de ce qui précède que, dans tous les cas, la RGAÉ exige que la Cour examine la raison d’être des dispositions invoquées pour obtenir l’avantage fiscal. Ce principe est au cœur de la prétention de la Couronne, selon laquelle le juge de la Cour de l’impôt a circonscrit l’effet des dispositions pertinentes à leur libellé, au lieu de leur donner un sens qui concorde avec leur objet et leur esprit. Selon la Couronne, cette interprétation étroite des dispositions pertinentes ne peut être confirmée, puisqu’elle est fondée sur une évaluation erronée de l’incidence des modifications apportées à la Loi en 2012, soit plusieurs années après la série d’opérations en question.

[46]      Je reviendrai à cette question plus loin. Je fais remarquer à cette étape qu’on ne peut présumer que les modifications subséquentes modifient ou confirment l’état antérieur du droit (voir les paragraphes 45(2) et (3) de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21). Récemment, dans l’arrêt Univar Holdco Canada ULC c. Canada, 2017 CAF 207, aux paragraphes 23 à 27, notre Cour illustre que, dans le contexte de la RGAÉ, les dispositions invoquées pour obtenir l’avantage fiscal doivent d’abord être interprétées individuellement. Ce n’est qu’à la suite de cette analyse qu’il sera possible de décider si une modification subséquente portant sur le même sujet confirme ou modifie l’état antérieur du droit.

-           Le contexte législatif

[47]      Avant de procéder à l’analyse, il est utile d’aborder brièvement le traitement fiscal des sociétés de personnes, la distinction entre les immobilisations et les immobilisations amortissables et le contexte ayant présidé à l’adoption du paragraphe 100(1) en 1972.

[48]      La Loi donne à des sociétés de personnes une conception binaire. Bien que le revenu d’une société de personnes soit attribué aux associés, il est calculé « comme si la société de personnes était une personne distincte » (alinéa 96(1)a)). Puisque la société de personnes est distincte des associés à l’étape du calcul du revenu (section B — Calcul du revenu), elle peut, comme une société, détenir des actifs, et le droit des associés sur ces actifs correspond à leur participation dans la société de personnes. La participation dans une société de personnes est distincte des biens détenus par la société de personnes et peut être assujettie à un traitement différent sous le régime de la Loi.

[49]      Les biens amortissables sont, par définition, des immobilisations — alinéa a) de la définition d’« immobilisations » à l’article 54 — et la disposition d’une immobilisation pour un produit supérieur à son PBR — essentiellement le coût en capital dans le cas d’une immobilisation amortissable — donne lieu à un gain en capital, dont la moitié est imposable. À cet égard, le traitement fiscal des immobilisations amortissables et des immobilisations non amortissables est identique.

[50]      Cependant, seules les immobilisations visées par la définition de « bien amortissable » prévue au paragraphe 13(21) — essentiellement les immobilisations qui sont utilisées en vue de tirer un revenu et à l’égard desquelles il est possible de réclamer une allocation du coût en capital (ACC) — peuvent donner lieu à une récupération. En termes simples, la l’ACC permet de déduire la totalité de l’amortissement selon le taux annuel que le règlement autorise, et la récupération donne lieu à l’inclusion dans le revenu de l’excédent de l’ACC réclamé tel qu’il est établi par la différence entre le prix de vente d’un bien amortissable et la FNACC au moment de la vente. Contrairement au gain en capital découlant de la disposition d’un bien amortissable, 100 p. 100 de la récupération doit être incluse dans le revenu puisqu’elle récupère un amortissement déduit à 100 p. 100. (Pour une explication plus détaillée des rouages du système de l’ACC, voir Water’s Edge Village Estates (Phase II) Ltd. c. Canada (C.A.), 2002 CAF 291, [2003] 2 C.F. 25 (Water’s Edge), aux paragraphes 37 à 41).

[51]      Le paragraphe 100(1) a été adopté au moment où le régime des gains en capital a été instauré, en 1972. Cette disposition vise à répondre aux préoccupations relatives à la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt, dans des circonstances où les actifs sous-jacents comprennent des biens dont la disposition peut donner lieu à une inclusion à 100 p. 100, p. ex. des immobilisations amortissables, des avoirs miniers et d’autres autres types de biens assujettis à un taux d’inclusion de 100 p. 100. La participation dans une société de personnes, qui est une immobilisation, est asssujettie au régime des gains en capital au moment de sa vente — sauf si elle est détenue pour négociation — et l’acheteur sera imposé sur la récupération latente, le cas échéant, relative au bien amortissable au moment de la disposition du bien.

[52]      Or, si l’acheteur de la participation dans la société de personnes est une entité exonérée d’impôt, il n’y aura jamais récupération de l’excédent de l’amortissement. Le paragraphe 100(1) permet d’éviter cette perte de revenus fiscaux en prévoyant que l’associé qui dispose d’une participation dans une société de personnes est tenu de payer de l’impôt sur 100 p. 100 de la partie du gain provenant de la vente de sa participation dans une société de personnes qui peut être attribuée aux immobilisations amortissables détenues par la société de personnes, au pro rata de la valeur de ces immobilisations.

[53]      Je passe maintenant à l’analyse de l’objet et de l’esprit des dispositions qui ont été invoquées pour contourner l’application du paragraphe 100(1).

-           Paragraphe 97(2)

[54]      Pour mettre en œuvre la première étape de la série d’opérations, la prédécesseure d’Oxford a eu recours au roulement prévu au paragraphe 97(2) lors du transfert des biens immobiliers aux sociétés de personnes de premier palier. Le paragraphe 97(2) a également été invoqué lorsque ces biens ont été transférés plus tard aux sociétés de personnes de second palier.

[55]      Le paragraphe 97(2) permet le transfert de biens — y compris des immobilisations non amortissables, des immobilisations amortissables et des biens à porter à l’inventaire — à une société de personnes, avec report d’impôt, si les associés en font conjointement le choix. En l’espèce, puisque le PBR a été choisi relativement aux terrains — c.-à-d. les immobilisations non amortissables — et que la FNACC a été choisie relativement aux immeubles érigés sur les terrains — c.-à-d. les immobilisations amortissables — le gain en capital accumulé et la récupération qui auraient autrement découlé du transfert aux termes du paragraphe 97(1) ont été reportés. Cette dernière disposition prévoit que les associés qui font un apport de biens dans une société de personnes sont réputés avoir reçu un produit égal à la juste valeur marchande du bien transféré.

[56]      Ces roulements, y compris celui visé au paragraphe 97(2), reportent les conséquences fiscales des transferts entre certains groupes, comme les actionnaires et les sociétés (paragraphe 85(1)) et les associés et les sociétés de personnes (paragraphe 97(2)). La prémisse est qu’il ne devrait y avoir aucune conséquence fiscale, étant donné qu’il n’y a pas de changement fondamental sur le plan de la propriété — c.-à-d. que, au lieu de détenir le bien transféré, l’auteur du transfert détient une participation dans la société de personnes ou des actions de même valeur (Vern Krishna, The Fundamentals of Canadian Income Tax, 9e éd. (Toronto : Thomson/Carswell, 2006), à la page 1112).

[57]      Le raisonnement qui sous-tend les roulements, comme le révèle le mécanisme utilisé pour leur donner effet — c.-à-d. le fait que le produit de disposition réputé de l’auteur du transfert devient le coût réputé du destinataire du transfert (le PBR ou la FNACC, selon le cas) —, établit clairement que l’impôt ainsi reporté sera payé lors de la disposition ultérieure donnant lieu à un changement dans la situation économique de l’auteur du transfert. Ainsi qu’il a été déclaré dans un passage où l’on fait directement référence au paragraphe 97(2) : « L’impôt n’est pas évité, mais différé » (Banque Continentale du Canada c. Canada, [1994] A.C.I. no 585 (QL) [au paragraphe 95], conf. par [1996] A.C.F. no 765 (QL) (C.A.). Ce constat découle tant du libellé du paragraphe 97(2) que de son objet et de son esprit.

[58]      En effet, le paragraphe 97(4) permet expressément de parvenir à ce résultat relativement à la récupération en prévoyant que, lorsque des biens amortissables sont transférés à une société de personnes pour un produit supérieur au coût en capital entre les mains de l’auteur du transfert, ce coût devient celui de la société de personnes, et la différence est réputée avoir été prise comme amortissement par cette dernière.

[59]      Dans ce contexte, force est de reconnaître que l’objet et l’esprit des paragraphes 97(2) et 97(4) consistent à assurer le suivi des attributs fiscaux des biens amortissables afin de veiller à ce que la récupération et les gains reportés soient imposés ultérieurement.

[60]      L’intimée fait valoir que ce traitement ne s’applique pas dans toutes les situations où intervient une entité exonérée d’impôt. Elle souligne le fait qu’une entité exonérée d’impôt peut être une associée d’une société de personnes. Ainsi, la société de personnes pourrait vendre un bien qui lui a été transféré à son coût fiscal par suite d’un roulement aux termes du paragraphe 97(2), de sorte que la récupération de l’excédent de l’amortissement déduit ne serait pas imposée au moment de la vente ultérieure du bien dans la mesure où elle est attribuée à l’associé non assujetti à l’impôt.

[61]      C’est vrai. Le législateur n’a pas prévu toutes les situations où l’interposition d’une entité exonérée d’impôt peut entraîner une perte de revenus. Par contre, compte tenu du paragraphe 100(1), on voit que la récupération latente découlant de la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt n’était pas censée être non imposable. Ce traitement est conforme à l’objet et à l’esprit du paragraphe 97(2).

[62]      Le juge de la Cour de l’impôt n’a pas interprété le paragraphe 97(2) de cette façon. Il a mis l’accent sur la période de détention de trois ans prévue au paragraphe 69(11) de la Loi et conclu que le paragraphe 97(2) n’est pas contrecarré lorsque la récupération reportée n’est pas imposée, pour autant que la période de détention soit respectée.

[63]      Tous s’entendent pour dire que le paragraphe 69(11) ne saurait s’appliquer en l’espèce, parce que, même s’il était par ailleurs applicable, la période de détention de trois ans a été respectée. Cette disposition, plus particulièrement l’alinéa 69(11)b), vise la première disposition d’un bien pour une somme inférieure à sa juste valeur marchande lorsque des mesures de planification ont été prises pour permettre au contribuable de « profiter » d’une exemption offerte à une personne de l’impôt payable « sur un revenu découlant d’une disposition ultérieure » du bien. Lorsque ces circonstances peuvent être établies, le bien est réputé avoir fait l’objet d’une première disposition à la juste valeur marchande. Cependant, le paragraphe 69(11) cesse de s’appliquer lorsque le bien ainsi transféré est détenu par le destinataire du transfert pendant une période d’au moins trois ans et qu’il peut être établi qu’aucun arrangement en vue de sa disposition ultérieure n’a été pris avant l’écoulement de cette période.

[64]      Voici le raisonnement adopté par le juge de la Cour de l’impôt pour conclure que cette période de détention de trois ans fait aussi partie de l’objet et de l’esprit du paragraphe 97(2) (motifs, paragraphe 193) :

Je suis d’accord avec les avocats de l’appelante pour dire que le législateur est censé connaître la loi et en tenir compte lorsqu’il apporte des modifications. Le législateur était au courant du délai de trois ans lorsqu’il a étendu l’application du paragraphe 69(11) aux entités exonérées d’impôt. Ainsi, lorsqu’il a modifié le paragraphe 69(11), il a pris la décision positive de limiter l’application du paragraphe 69(11) aux transferts aux entités exonérées qui se produisent dans le délai de trois ans. À mon avis, il est raisonnable de conclure que le législateur était d’avis que les transferts après cette période de trois ans ne constituaient pas un abus du paragraphe 97(2). Une telle conclusion doit être tirée, selon les termes de la Cour suprême du Canada, pour maintenir « la certitude, la prévisibilité et l’équité en droit fiscal afin que les contribuables puissent organiser leurs affaires en conséquence » [Trustco, par. 61; note en bas de page omise.]

[65]      Je fais d’abord remarquer que le paragraphe 69(11) se trouve à la sous-section F, « Règles relatives au calcul du revenu », alors que le paragraphe 97(2) se trouve à la sous-section J, « Les sociétés de personnes et leurs associés ». Ce fait démontre que l’application du paragraphe 69(11) n’est pas limitée aux sociétés de personnes. On ne saurait donc affirmer que le paragraphe 69(11) visait au départ l’utilisation de roulements prévus par le paragraphe 97(2) (motifs, paragraphe 189). Son application est beaucoup plus large. Bien qu’il puisse s’appliquer à une série d’opérations amorcée par un roulement aux termes du paragraphe 97(2), le paragraphe 69(11) s’applique à toute série d’opérations amorcée par une disposition pour un produit inférieur à la juste valeur marchande, peu importe s’il y a eu un roulement aux termes du paragraphe 97(2) ou de toute autre disposition. Ainsi, il n’existe aucun « plan plausible et cohérent » qui justifierait d’interpréter le paragraphe 97(2) comme s’il comportait la limite de trois ans prévue au paragraphe 69(11) (Copthorne, au paragraphe 91).

[66]      Je fais également remarquer qu’il n’est pas rare que le législateur assortisse d’une limite temporelle les dispositions anti-évitement dont l’application repose sur une opération qui pourrait être effectuée à l’avenir (comparer l’alinéa 6204(1)b) du Règlement de l’impôt sur le revenu, C.R.C., ch. 945, tel qu’il a été interprété par la Cour dans l’arrêt Montminy c. Canada, 2017 CAF 156, au paragraphe 59; voir aussi la période de détention prévue à l’article 54 dans le contexte d’une perte apparente). L’intention manifeste est de limiter la durée des effets paralysants de ce type de disposition, effets qui seraient autrement perpétuels. Il y a ainsi certitude et finalité. Le paragraphe 97(2) et les autres dispositions en litige dans le présent appel ne soulèvent pas ce genre de préoccupation, car leur application n’est pas assujettie à une condition suspensive.

[67]      En outre, je pourrais comprendre le lien que le juge de la Cour de l’impôt a fait entre la situation en l’espèce et la situation visée par l’alinéa 69(11)b) si l’avantage fiscal avait été obtenu en raison du statut d’exonération des acheteurs. Or, il n’y a aucune preuve à cet égard. Oxford a obtenu un avantage fiscal, parce qu’elle a transféré suite à un roulement trois biens immobiliers à des sociétés de personnes, fait un usage judicieux des majorations et réussi à éviter l’application du paragraphe 100(1). En réalité, l’avantage fiscal a été obtenu en dépit du statut d’exonération des acheteurs, et non en raison de celui-ci.

[68]      La conclusion du juge de la Cour de l’impôt selon laquelle « la certitude, la prévisibilité et l’équité en droit fiscal » [motifs, paragraphe 193] exigent que la limite de trois ans prévue au paragraphe 69(11) soit appliquée au paragraphe 97(2) n’est donc pas justifiée.

[69]      L’extrait suivant pourrait être interprété comme l’énoncé d’autres motifs indépendants permettant de conclure que le résultat obtenu en l’espèce n’a pas contrecarré le paragraphe 97(2) (motifs, paragraphes 186, 187 et 188) :

Je conviens avec [la Couronne] que le paragraphe 97(2) vise également à préserver dans la société de personnes les attributs fiscaux des trois biens immobiliers, y compris leur prix de base rajusté et leur récupération éventuelle. C’est la raison pour laquelle le [roulement] est communément appelé report d’impôt. Toutefois, la disposition vise uniquement à déterminer le montant de l’impôt à payer sur les gains accumulés lorsque les sociétés en commandite de premier palier et les sociétés en commandite de second palier vendent ultérieurement l’actif transféré. Le montant de cet impôt se fonde sur les attributs, y compris le prix de base rajusté, du bien au moment de cette vente.

À mon avis, il ressort d’une analyse textuelle, contextuelle et téléologique du paragraphe 97(2) que ce dernier ne vise pas à assujettir les associés, lorsqu’ils disposent de leur participation dans une société de personnes, à l’impôt sur la récupération éventuelle ou le gain en capital relativement aux biens des sociétés de personnes, y compris les trois biens immobiliers. La Loi traite la vente de la participation dans une société de personnes comme une vente de biens non amortissables. Les éléments d’actif de la société de personnes sont imposés au niveau de la société de personnes sur la base de leurs attributs au moment de la vente.

En résumé, le paragraphe 97(2) n’a pas pour objet d’imposer la vente subséquente d’une participation dans une société de personnes en fonction de la nature des biens qu’elle détient.

[70]      La question analysée dans cet extrait est celle de savoir si la raison d’être du paragraphe 97(2) a été contrecarrée. Comme le juge de la Cour de l’impôt l’a reconnu dans le premier paragraphe, les roulements ont permis de transférer les biens immobiliers aux sociétés de premier palier, puis aux sociétés de deuxième palier, sur la base d’un report d’impôt, tout en préservant les attributs fiscaux de ces biens. La question à laquelle le juge de la Cour de l’impôt devait répondre consistait à savoir si le fait que les gains et la récupération reportés ne seraient jamais imposés contrecarrait le paragraphe 97(2).

[71]      Plutôt que de répondre à la question, le juge de la Cour de l’impôt en a posé une autre — c.-à-d. la question de savoir si « le paragraphe 97(2)[a] pour objet d’imposer la vente subséquente d’une participation dans une société de personnes en fonction de la nature des biens qu’elle détient » (motifs, paragraphe 188).

[72]      Je souligne tout d’abord que le paragraphe 97(2) vise à reporter l’impôt; il ne vise pas à imposer qui que ce soit. De plus, la question de savoir si les associés devraient payer de l’impôt sur les gains et la récupération reportés, au moment de la vente de leur participation dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt, dépend de l’objet et de l’esprit du paragraphe 100(1) et non du paragraphe 97(2).

[73]      La question à laquelle le juge de la Cour de l’impôt devait répondre à cette étape de l’analyse était la suivante : le fait que les gains et la récupération reportés ne seront jamais imposés contrecarre-t-il l’objet et l’esprit du paragraphe 97(2)? Étant donné que la seule raison pour laquelle le législateur souhaiterait préserver les attributs fiscaux des biens transférés à une société de personnes par suite d’un roulement est de pouvoir imposer ultérieurement les gains reportés et la récupération latente, la réponse à cette question doit être affirmative.

-           Les alinéas 88(1)c), 88(1)d) et 98(3)b)

[74]      Les deux majorations étaient essentielles pour permettre à l’intimée de contourner l’application du paragraphe 100(1). Pour atteindre cet objectif, Oxford devait non seulement reporter les gains accumulés et la récupération latente, mais aussi majorer le PBR de ses participations dans les sociétés de personnes jusqu’à un montant approximativement égal à leur juste valeur marchande.

[75]      Les opérations par lesquelles les majorations ont été effectuées sont complexes. Pour les besoins de l’espèce, il suffit de se rappeler que les règles relatives aux fusions verticales ont été appliquées après le roulement des biens aux sociétés de personnes de premier palier, ce qui a permis à l’entité fusionnée de majorer le PBR de sa participation dans les sociétés de premier palier aux termes de l’alinéa 88(1)d).

[76]      Selon l’alinéa 88(1)a), lors d’une fusion verticale, la société mère est réputée avoir acquis les biens de sa filiale au coût aux fins de l’impôt pour la filiale. Toutefois, avant la liquidation, il se peut que le coût aux fins de l’impôt, pour la société mère, des actions dans sa filiale (le PBR des actions) soit supérieur au coût aux fins de l’impôt des biens sous-jacents de la filiale. Au moment de la fusion verticale, ces actions disparaîtront. En l’absence de rajustement, le coût aux fins de l’impôt de ces actions disparaîtrait lui aussi, ce qui pourrait donner lieu à une double imposition si les biens sous-jacents étaient vendus ultérieurement. Cette situation pourrait survenir, parce que le coût réputé des biens sous-jacents dans les mains de la société mère, soit le coût aux fins de l’impôt pour la filiale, ne refléterait aucune augmentation de valeur jusqu’au moment de la liquidation.

[77]      La majoration prévue aux alinéas 88(1)c) et d) permet de corriger cette situation. Il faut d’abord calculer la différence entre le PBR des actions de la société mère et le coût aux fins de l’impôt des biens de la filiale. Le résultat obtenu peut ensuite être ajouté au coût aux fins de l’impôt des immobilisations non amortissables dont la société mère a hérité de sa filiale. Autrement dit, le coût aux fins de l’impôt de ces immobilisations est majoré. La majoration permet essentiellement de préserver le PBR qui disparaîtrait autrement au moment de la fusion verticale et de le transférer à d’autres biens qui sont imposés de la même manière.

[78]      Le sous-alinéa 88(1)c)(iii) interdit à la société mère de majorer le coût des « bien[s] non admissible[s] », qui incluent les biens amortissables. Le problème que la majoration vise à régler est celui de la disparition des actions et de leur coût aux fins de l’impôt (le PBR des actions), ce qu’on parvient à faire en préservant le PBR qui disparaîtrait autrement et en le transférant à un actif qui est imposé en fonction du même taux d’inclusion. Le fait de permettre que des biens imposés en fonction d’un taux d’inclusion de 50 p. 100 augmentent la valeur des biens imposés en fonction d’un taux d’inclusion de 100 p. 100 entraînerait une perte de revenus fiscaux évidente. Voilà pourquoi les biens amortissables et les autres types de bien visés par un taux d’inclusion de 100 p. 100 ne peuvent pas être majorés.

[79]      Le paragraphe 98(3) prévoit un mécanisme semblable. Il s’applique dans le contexte de la dissolution d’une société de personnes et vise à préserver le coût fiscal des participations dans la société de personnes au lieu des actions. Le raisonnement est le même que celui qui sous-tend l’alinéa 88(1)d). Le sous-alinéa 98(3)b)(ii) et l’alinéa 98(3)c) excluent eux aussi les « biens non admissibles », notamment les biens amortissables, pour les mêmes raisons que celles qui ont déjà été énoncées. En outre, le sous-alinéa 88(1)a)(iii) et l’alinéa 98(3)e) prévoient tous deux que la société mère ou les associés sont réputés avoir acquis les biens dont ils ont hérités pour la FNACC de la filiale ou de la société de personnes dissoute, ce qui témoigne d’une intention de continuité dans l’application du régime de l’ACC.

[80]      Compte tenu de la raison d’être des dispositions relatives à la majoration, on comprend pourquoi les biens amortissables sont exclus. La majoration appliquée à un bien amortissable à l’égard duquel l’amortissement a déjà été réclamé augmentera la FNACC et réduira la récupération latente, qui est assujettie à un taux d’inclusion de 100 p. 100. Cependant, le même raisonnement ne s’applique pas aux gains réalisés lors de la disposition de biens amortissables, qui, comme tous les autres gains en capital, sont assujettis à un taux d’inclusion de 50 p. 100. Compte tenu de la raison d’être des dispositions relatives à la majoration, une majoration qui augmente le coût en capital plutôt que la FNACC de biens amortissables ne pose pas problème sur le plan de la politique fiscale. J’y reviendrai dans mon évaluation du résultat global de la série d’opérations.

[81]      Le juge de la Cour de l’impôt a bien compris le traitement distinct qui est réservé aux biens amortissables et aux biens non amortissables et les raisons qui le justifient. Il ressort de son raisonnement (motifs, paragraphes 143 à 146, 167 et 168) que la majoration permet d’augmenter le PBR des immobilisations non amortissables pour compenser la disparition du coût fiscal des immobilisations non amortissables — c.-à-d. les actions — dans le contexte d’une fusion verticale et de la participation dans une société de personnes dans le contexte de la dissolution d’une société de personnes. Le juge de la Cour de l’impôt a expliqué que cette façon de faire élimine le risque de double imposition lors de la vente ultérieure des actifs. Il a aussi fait remarquer que le paragraphe 88(1) vise également à préserver les attributs fiscaux des biens amortissables et la « récupération éventuelle » (motifs, paragraphe 146).

[82]      Si le juge de la Cour de l’impôt s’était arrêté là et était passé à l’analyse relative à l’abus, il n’aurait eu d’autre choix que de conclure que l’objet et l’esprit des dispositions en question avaient été contrecarrés, parce que les majorations ont été appliquées pour augmenter indirectement la FNACC de biens amortissables. En outre, il aurait été obligé de conclure que les attributs fiscaux des biens amortissables sous-jacents avaient été « préservés » en vain.

[83]      Or, le juge de la Cour de l’impôt n’en a pas tenu compte dans sa conclusion. Après avoir fait remarquer que l’alinéa 88(1)d) avait été modifié en 2012 par l’ajout du sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) [mod. par L.C. 2012, ch. 31, art. 18] (motifs, paragraphe 147) et que cette modification était utile pour définir l’objet et l’esprit des dispositions en question (motifs, paragraphe 153), le juge de la Cour de l’impôt a conclu ce qui suit (motifs, paragraphe 205) :Je ne peux pas conclure, à partir d’une analyse textuelle, contextuelle et téléologique, que l’un des objets ou objectifs des alinéas 88(1)c) et d), du paragraphe 98(3) […] est d’établir une règle sur la majoration « indirecte » ou, d’ailleurs, une règle sur la récupération latente qui, telle qu’elle est envisagée par l’intimée, s’appliquait lorsque les participations dans les sociétés de commandite de premier palier et les sociétés de commandite de second palier ont été majorées. Je ne peux pas non plus accepter que l’un des objets ou objectifs de l’alinéa 88(1)c) et du paragraphe 98(3), tel qu’ils étaient libellés au cours des périodes visées, était de réduire ou de refuser la majoration compte tenu de la nature des éléments d’actif détenus par les sociétés de personnes. [Non souligné dans l’original.]

[84]      Après avoir fait remarquer que les règles relatives à la majoration sont complexes et que le législateur a fait preuve de beaucoup de circonspection dans le choix des termes employés pour y donner effet, il a ajouté ce qui suit (motifs, paragraphe 206) :

[…] L’article 88, tel qu’il était rédigé à l’époque, n’exigeait pas de l’appelante qu’elle examine la nature des éléments d’actif des sociétés en commandite de premier palier pour déterminer le montant de la majoration de sa participation dans les sociétés en commandite. [Non souligné dans l’original.]

[85]      L’insistance du juge de la Cour de l’impôt sur les articles pertinents « tels qu’ils étaient libellés » s’explique par la distinction qu’il établit entre la règle telle qu’elle existait au moment où la série d’opérations a été effectuée et la règle telle qu’elle existe depuis l’ajout du sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) et l’adoption des modifications connexes en 2012 (motifs, paragraphes 210 à 212). Plus haut dans ses motifs, le juge de la Cour de l’impôt avait expliqué le fonctionnement des changements et les résultats obtenus (motifs, paragraphes 147 à 153). À son avis, le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) vise précisément la question qui est soulevée en l’espèce, mais seulement de façon prospective. Il a donc conclu ce qui suit (motifs, paragraphe 210) :

Le régime législatif que l’intimée recherche existe dans la version actuelle de l’article 88, notamment à la suite de l’ajout du sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) en 2012. Cependant, à mon avis, la modification reflète l’adoption d’une nouvelle politique par le législateur.

Par souci de clarté, il a ajouté qu’il « ne s’agit pas d’une clarification des anciennes dispositions » (motifs, paragraphe 212).

[86]      La question de savoir si une modification clarifie ou modifie l’état antérieur du droit dépend de l’interprétation de l’état antérieur du droit et de la modification. Comme il a été expliqué, la Loi d’interprétation empêche de tirer une conclusion au sujet de l’effet juridique d’un nouveau texte sur l’état antérieur du droit au seul motif que le législateur l’a adopté. Dans cette perspective, la seule façon d’évaluer les incidences d’une modification sur l’état du droit antérieur consiste à déterminer l’effet juridique de la loi telle qu’elle existait avant la modification, puis à déterminer si la modification modifie ou clarifie cet effet juridique.

[87]      Le juge de la Cour de l’impôt a conclu que le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) était de droit nouveau en le comparant au paragraphe 88(1) tel qu’il était libellé avant la modification. Le juge de la Cour de l’impôt a expliqué que, avant la modification, le paragraphe 88(1) prévoyait que la majoration était fondée sur « la juste valeur marchande de chaque élément d’actif non amortissable de la filiale, y compris la juste valeur marchande d’une participation dans une société de personnes détenue par l’associé », ce qui n’était plus le cas après la modification, « restreignant […] le montant dont la participation peut être majorée pour atteindre le montant de la juste valeur marchande de la société de personnes qui n’est pas attribuable à des biens amortissables » (motifs, paragraphe 211). Bref, la modification est de droit nouveau, car la limite qui est maintenant imposée à l’égard des biens amortissables n’existait pas auparavant.

[88]      Le problème que pose ce raisonnement, c’est qu’il est fondé sur le libellé des dispositions antérieures plutôt que sur leur objet et leur esprit. Comme la Cour suprême l’affirme dans l’arrêt Copthorne, il ressort de la RGAÉ que le sens et l’effet juridique des dispositions de la Loi peuvent varier selon qu’on les interprète suivant la méthode classique, textuelle, contextuelle et téléologique axée sur le sens des mots employés dans la Loi ou en fonction d’une analyse axée sur la raison d’être des dispositions (Copthorne, paragraphe 70). Bien que l’on ne puisse écarter la possibilité que la raison d’être d’une disposition ressorte entièrement des mots, il faut tout de même le démontrer en examinant la raison d’être de la disposition (Copthorne, paragraphes 110 et 111).

[89]      Il ne fait aucun doute que le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) est de droit nouveau si l’on interprète les dispositions antérieures en fonction des mots, comme le juge de la Cour de l’impôt l’a fait. En invoquant la RGAÉ, le ministre a admis — et tous s’entendent pour le dire — que les alinéas 88(1)c) et d) et le paragraphe 98(3) n’imposent aucune limite qui empêcherait les majorations appliquées en l’espèce (comparer Copthorne, au paragraphe 109). Comme le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) impose une telle limite de façon prospective, il est de droit nouveau lorsque la Loi exige que les anciennes dispositions soient interprétées de façon classique en fonction du sens des mots — c.-à-d. lorsque la RGAÉ n’entre pas en jeu.

[90]      La question de savoir si le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) est de droit nouveau dans le contexte de la RGAÉ doit cependant être examinée en tenant compte du sens des dispositions antérieures, interprétées en fonction de leur raison d’être. À cet égard, il ressort de l’analyse menée par le juge de la Cour de l’impôt à l’égard des dispositions telles qu’elles existaient avant la modification (motifs, paragraphes 142 à 146 et 164 à 168) que le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) exprime en termes exprès une raison d’être qui existait déjà. Notamment, les dispositions antérieures établissaient déjà une distinction entre les biens amortissables et les biens non amortissables, et ce, dans l’unique but de tenir compte du traitement fiscal distinct réservé aux deux types de biens sous le régime de la Loi au moment de déterminer lesquels sont admissibles à la majoration et lesquels ne le sont pas. Le recours à des sociétés de personnes à paliers multiples pour contourner le traitement distinct de ces biens contrecarre la raison d’être de la distinction que ces dispositions établissaient déjà.

[91]      Lorsque la loi antérieure est interprétée en fonction de son objet et de son esprit, comme il se doit, on ne peut conclure que la modification n’est pas de droit nouveau. L’effet pratique est simple : il ne sera plus nécessaire d’invoquer la RGAÉ pour éviter le résultat obtenu en l’espèce (comparer Water’s Edge, au paragraphe 47).

[92]      Je tiens à préciser que j’en suis arrivé à cette conclusion sans me fonder sur le document présentant des renseignements supplémentaires sur le budget publié par le ministère des Finances au moment de l’adoption du sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) et des modifications connexes en 2012. La Couronne se fonde sur la distinction qui y est établie entre les modifications qui modifient le droit et celles qui apportent des clarifications, et elle insiste sur l’affirmation selon laquelle les modifications en l’espèce [traduction] « clarifient » l’état du droit antérieur (mémoire de l’appelante, paragraphes 84 et 85; Le plan d’action économique de 2012 [Ministère des Finances Canada], pages 474 à 476; Recueil conjoint de documents, vol. 2, onglet 49).

[93]      Bien que les publications de ce genre, y compris les Notes explicatives, soient considérées comme des moyens extrinsèques admissibles (Copthorne, au paragraphe 69, citant l’arrêt Trustco, au paragraphe 55), je ne crois pas qu’il faille accorder à la publication invoquée par la Couronne quelque poids que ce soit dans le présent appel. En effet, comme il est indiqué à la page 474 du document en question, il a été publié à une époque où les fonctionnaires du ministère des Finances savaient que les structures comme celle qui est en cause en l’espèce étaient contestées par le ministre. Il en découle donc une préoccupation évidente, à savoir la possibilité que la publication soit intéressée, particulièrement dans le contexte de la RGAÉ, où l’objet et l’esprit de la loi telle qu’elle existait avant la modification sont en litige. Ainsi, il faut faire fi de l’opinion exprimée dans cette publication.

[94]      Avant de conclure mon analyse sur les majorations, je dois traiter de la conclusion du juge de la Cour de l’impôt selon laquelle la position du ministre devrait être rejetée au motif qu’elle est fondée sur une politique générale qui n’est pas rattachée à la Loi elle-même (motifs, paragraphe 204). Il est arrivé à cette conclusion en raison du traitement distinct qui a été accordé aux biens visés par les opérations mettant en jeu les sociétés de personnes Dufferin Mall et René Lévesque (motifs, paragraphes 201 à 203).

[95]      Je ne peux partager ce point de vue. Tout d’abord, le fait que le ministre n’a pas jugé bon d’appliquer la RGAÉ pour limiter les majorations appliquées à l’égard de ces biens ne change pas le fait que la position du ministre, en l’espèce, repose fermement sur l’objet et l’esprit des alinéas 88(1)c) et d) et du paragraphe 98(3). Ainsi, le traitement réservé par le ministre à ces autres biens n’est pas pertinent.

[96]      Néanmoins, afin de dissiper toute crainte d’ambivalence de la part du ministre, je fais remarquer que la décision de ne pas appliquer la RGAÉ à l’égard de ces biens s’explique : dans le cas de la société de personnes Dufferin Mall, les biens ont ultimement été vendus à une entité imposable, de sorte que l’impôt sur la récupération latente et les gains accumulés finira par être payé. Pour ce qui est des biens de la société de personnes René Lévesque, la RGAÉ n’a pas été appliquée, parce que les biens n’ont pas fait l’objet d’un apport à la société de personnes dans le contexte de la série d’opérations.

[97]      Par conséquent, je conclus que les majorations contrecarrent l’objet et l’esprit des alinéas 88(1)c) et d) et du paragraphe 98(3), dans la mesure où elles permettent à l’intimée d’éviter la récupération latente à l’égard des biens amortissables détenus par les sociétés de personnes.

-           Le paragraphe 100(1)

[98]      Le calcul particulier prévu au paragraphe 100(1) s’applique au gain en capital réalisé lors de la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt. L’alinéa 100(1)a) prévoit l’application du taux d’inclusion habituel de 50 p. 100 à la partie du gain qui est attribuable à la valeur des immobilisations non amortissables détenues par la société de personnes. Lorsque le gain réalisé lors de la vente d’une participation dans une société de personnes est attribuable à la valeur de biens amortissables, l’alinéa 100(1)b) prévoit un taux d’inclusion de 100 p. 100.

[99]      La conclusion tirée par le juge de la Cour de l’impôt à l’égard de l’objet et de l’esprit de cette disposition est encore une fois fondée sur le nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1). Lorsqu’il a rejeté l’argument de la Couronne selon lequel l’objet du paragraphe 100(1) était d’examiner les sociétés de personnes et de percevoir l’impôt sur la récupération latente qui serait autrement impayé en raison du statut d’exonération de l’acheteur, le juge de la Cour de l’impôt a écrit ce qui suit (motifs, paragraphe 216) :

[…] Une analyse textuelle, contextuelle et téléologique du paragraphe 100(1) n’étaye pas un tel objectif. Si le législateur avait prévu un tel résultat, il aurait rédigé le paragraphe 100(1) de manière à ce que cet examen soit requis, c’est-à-dire d’une manière semblable au nouveau sous-alinéa 88(1)d)(ii.1) des règles sur la majoration.

[100]   Étant donné cette conclusion, le juge de la Cour de l’impôt a donné au paragraphe 100(1) le sens qui correspond à son libellé. Pour reprendre ses propos, « le paragraphe 100(1) a pour objet de commencer par le gain en capital calculé en vertu de la Loi et de déterminer ensuite quelle partie de ce gain représente un gain en capital imposable », et, puisqu’il n’y a eu aucun gain en capital compte tenu des dispositions pertinentes, particulièrement les règles relatives à la majoration, le paragraphe 100(1) n’a pas été contrecarré (motifs, paragraphe 217).

[101]   Il incombait au juge de la Cour de l’impôt d’analyser l’objet et l’esprit du paragraphe 100(1). Bien qu’il prétende l’avoir fait, son analyse repose simplement sur le libellé du paragraphe 100(1). Comme on l’a déjà expliqué, le paragraphe 100(1) inclut dans le revenu la totalité du gain découlant de la vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt, dans la mesure où le gain est attribuable à des biens amortissables. Le juge de la Cour de l’impôt devait se pencher sur la question de savoir pourquoi cette disposition prévoit une telle inclusion. La réponse est la suivante : le législateur voulait prévoir le paiement de l’impôt sur la récupération latente, qui autrement demeurerait impayé lors de la vente subséquente des biens amortissables par un acheteur exonéré d’impôt. C’est la seule réponse possible.

[102]   Compte tenu de ce qui précède, force est de conclure que le résultat obtenu en l’espèce a contrecarré l’objet et l’esprit du paragraphe 100(1), parce que l’impôt sur la récupération latente à l’égard des biens amortissables détenus par les sociétés de second palier au moment de la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt ne sera jamais payé.

[103]   Avant de conclure l’analyse relative au paragraphe 100(1), je tiens à souligner que la nouvelle cotisation établie par le ministre applique, dans la mesure où elle s’appuie sur l’augmentation de la valeur attribuable aux biens amortissables, un taux d’inclusion de 100 p. 100 tant à la portion correspondant à la récupération qu’à celle correspondant au gain en capital. Cela ne concorde pas avec le taux d’inclusion qui s’applique normalement aux gains en capital, mais la Couronne soutient que le ministre était tenu d’appliquer un taux d’inclusion de 100 p. 100 compte tenu de l’objet et de l’esprit du paragraphe 100(1). Plus particulièrement, la Couronne fait valoir que le taux d’inclusion de 100 p. 100 prévu à l’alinéa 100(1)b) s’explique par le fait que le législateur voulait [traduction] « imposer des conséquences » en vue de [traduction] « décourager les tentatives d’éviter la récupération » (mémoire de la Couronne, paragraphe 106).

[104]   À mon avis, cela n’explique pas pourquoi l’alinéa 100(1)b) applique un taux d’inclusion de 100 p. 100 à toutes les augmentations de la valeur attribuables aux biens amortissables. Premièrement, le fait de doubler l’impôt sur les gains en capital attribuables aux biens amortissables ne décourage pas les tentatives d’éviter la récupération. En fait, lorsque la tentative d’évitement est limitée à la récupération, le taux d’inclusion de 100 p. 100 prévu à l’alinéa 100(1)b) correspond au taux d’inclusion normal qui s’applique à la récupération. Si le législateur avait voulu [traduction] « imposer des conséquences » aux contribuables qui essaient d’éviter l’impôt sur la récupération, il aurait rédigé le paragraphe 100(1) différemment. Deuxièmement, il n’y a aucune raison logique pour laquelle le législateur [traduction] « imposerait des conséquences » dans ce cas, mais pas à l’égard des autres types de biens visés par le paragraphe 100(1).

[105]   Il semble plutôt que le paragraphe 100(1), à l’instar des dispositions relatives à la majoration, fut rédigé dans l’optique d’un taux d’inclusion de 100 p. 100 qui s’applique de façon générale aux biens ciblés. Les gains en capital liés aux biens amortissables, qui sont visés par un taux d’inclusion de 50 p. 100, ne semblent pas avoir mérité une attention particulière, peut-être parce que ces biens sont habituellement utilisés en vue de gagner un revenu et donnent rarement lieu à des gains en capital. Quoi qu’il en soit, la volonté de décourager les tentatives d’éviter l’impôt sur la récupération ne fait pas partie de l’explication.

[106]   Cela étant dit, il n’est pas nécessaire de tirer une conclusion définitive à cet égard, parce que, peu importe l’explication qu’on en donne, le fait d’imposer la totalité de la partie du gain en capital attribuable à l’augmentation de la valeur des biens amortissables, comme le ministre l’a fait, n’est pas justifié compte tenu du résultat global obtenu. Je vais maintenant examiner cette question.

-           Le résultat global

[107]   Ayant conclu qu’aucune des étapes de la série d’opérations ne donnait lieu à un abus, le juge de la Cour de l’impôt n’a pas jugé nécessaire d’examiner le résultat global. Rien ne justifie donc la retenue à l’égard de cette partie de l’analyse.

[108]   Le résultat global est le suivant : le paragraphe 100(1) a été contourné grâce à l’élimination du gain en capital qui aurait normalement résulté de la vente des participations dans les sociétés de personnes aux entités exonérées d’impôt. En effet, le coût aux fins de l’impôt des participations dans les sociétés de personnes a été majoré pour qu’il corresponde approximativement à leur juste valeur marchande, établie par le prix que les entités exonérées d’impôt sans lien de dépendance ont payé, ce qui a éliminé tout gain auquel le paragraphe 100(1) aurait pu s’appliquer et reporté de façon permanente les gains accumulés et la récupération latente.

[109]   Plus particulièrement, il n’existe aucun gain « qu’il est raisonnable de considérer comme étant attribuable à l’augmentation de la valeur » des biens non amortissables des sociétés de personnes de second palier aux termes de l’alinéa 100(1)a) au moment où l’opération a été effectuée, et ce, même si le prix de vente des participations dans les sociétés de personnes, tel qu’il a été attribué par entente, révèle que ces biens valaient 21 835 816 $ de plus que le PBR. De même, il n’existait aucun gain qu’il était raisonnable de considérer comme étant attribuable à l’augmentation de la valeur des biens amortissables détenus par les sociétés de personnes de deuxième palier aux termes de l’alinéa 100(1)b), et ce, même si le prix de vente, tel qu’il a été attribué par entente, montre que ces biens avaient fait l’objet d’un amortissement excessif de 116 591 744 $ et qu’ils valaient 42 570 999 $ de plus que leur coût en capital.

[110]   Lors de l’examen du résultat global lié aux biens amortissables sous-jacents, il faut établir une distinction entre le traitement fiscal applicable à la récupération de l’amortissement excessif des biens amortissables que révèle la différence entre le coût en capital et la FNACC des biens, et le traitement fiscal applicable aux gains en capital que révèle la différence entre le coût en capital des biens et leur valeur au moment de la vente. Comme je l’ai déjà mentionné, lorsqu’on dispose d’un bien amortissable à un prix supérieur au coût en capital, la différence entre la FNACC et le coût en capital donne lieu à la récupération, assujettie à un taux d’inclusion de 100 p. 100, tandis que la différence entre le prix de vente et le coût en capital donne lieu à un gain en capital, assujetti à un taux d’inclusion de 50 p. 100.

[111]   À la lumière de ce traitement distinct, le résultat obtenu contrecarre l’alinéa 100(1)b), dans la mesure où il a permis à Oxford d’éviter de payer de l’impôt sur la récupération latente de 116 591 744 $. La vente d’une participation dans une société de personnes à une entité exonérée d’impôt lorsque les biens sous-jacents comprennent des biens qui ont fait l’objet d’un amortissement fiscal excessif sans que cela donne lieu à la récupération qui aurait été assujettie à l’impôt si les biens avaient été vendus directement, est le genre de situation que l’alinéa 100(1)b) vise précisément à empêcher. Comme il a déjà été expliqué, l’alinéa 100(1)b) prévient la perte de revenus qui pourrait survenir en raison du statut d’exonération de l’acheteur en permettant un examen qui fait abstraction de la société de personnes pour s’attacher aux biens détenus par elle et en tenant les associés responsables de l’impôt sur la récupération latente qui ne serait autrement jamais payé.

[112]   Cependant, cette disposition ne peut s’appliquer à moins que la vente de la participation dans une société de personnes ait donné lieu à un gain en capital comparable à l’augmentation de la valeur des biens sous-jacents de la société de personnes. En l’espèce, Oxford a réussi à rendre l’alinéa 100(1)b) inopérant en ayant recours à des majorations pour annuler le gain en capital et en créant une dichotomie entre le coût fiscal des participations dans les sociétés de personnes et celui des biens sous-jacents. Ainsi, la raison pour laquelle les dispositions relatives à la majoration excluent les biens amortissables, aux termes du sous-alinéa 88(1)c)(iii) et de l’alinéa 98(3)e), a été contrecarrée, parce que le coût aux fins de l’impôt des biens amortissables est passé de la FNACC au coût en capital, ce qui a permis d’utiliser le coût de biens assujettis à un taux d’inclusion de 50 p. 100 pour éliminer la récupération, qui est assujettie à un taux d’inclusion de 100 p. 100. De plus, Oxford a abusé des paragraphes 97(2) et 97(4), parce que la FNACC fut réputée continuer entre les mains des sociétés de personnes de premier et de second paliers sans qu’aucune conséquence ne découle de cette fiction, de sorte que le report de la récupération est devenu permanent.

[113]   À mon avis, la Couronne s’est acquittée de son fardeau de décrire l’objet et l’esprit des dispositions invoquées par Oxford pour atteindre ce résultat et de démontrer qu’ils ont été contrecarrés (Trustco, au paragraphe 65).

[114]   À l’inverse, il n’a pas été démontré qu’un abus de l’alinéa 100(1)b) ou de toute autre disposition pertinente avait résulté du fait que l’augmentation de la valeur des biens amortissables, du coût en capital à la juste valeur marchande, n’était pas reflétée dans le gain en capital réalisé lors de la vente des participations dans les sociétés de personnes. Il en est ainsi, parce que, compte tenu de l’objet et de l’esprit des alinéas 88(1)c), 88(1)d) et 98(3)b), cette partie de l’augmentation de la valeur des biens amortissables a été correctement compensée par l’augmentation de leur coût fiscal résultant des majorations.

[115]   Comme je l’ai évoqué plus haut, il n’y a aucun abus de ces dispositions lorsque les coûts qui autrement disparaîtraient sont utilisés pour augmenter le coût de biens qui sont imposés de la même façon que les biens auxquels les coûts transférés se rapportent. C’est ce qui a été démontré à l’égard de la partie des coûts quia été utilisée pour compenser l’augmentation de 42 570 999 $ de la valeur des biens amortissables, à compter de leur coût en capital jusqu’à leur juste valeur marchande. Ce résultat n’entraîne pas d’abus, parce que cette partie du gain en capital qui aurait normalement été visée par le paragraphe 100(1)b) a été annulée d’une manière conforme à l’objet et à l’esprit des dispositions relatives aux majorations.

[116]   Pour la même raison, il n’y a eu aucun abus du paragraphe 97(2), dans la mesure où cette disposition a été invoquée pour reporter l’impôt à payer sur cette partie de l’augmentation de la valeur des biens amortissables. Contrairement à la récupération reportée, le gain en capital reporté n’a pas tout simplement disparu. Il a plutôt été annulé par l’ajout de coûts réels au coût en capital des biens amortissables. Ne pas reconnaître les coûts qui ont réellement été engagés, mais qui disparaîtraient lors de la fusion verticale ou de la dissolution d’une société de personnes, va à l’encontre de l’intégrité du régime des gains en capital parce qu’il permettrait la réalisation subséquente d’un gain en capital alors qu’il n’y a eu aucun gain économique. C’est pour prévenir ce résultat que les dispositions relatives à la majoration ont été adoptées.

[117]   En fin de compte, la seule façon pour le ministre de refuser de reconnaître cette majoration est d’insister sur une interprétation des dispositions en cause qui est axée sur le sens des mots, plus particulièrement sur l’exclusion non limitative des biens amortissables. Cependant, la Couronne ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Lorsque la RGAÉ est invoquée, il faut appliquer la même méthode d’interprétation à la question de savoir s’il y a eu abus et à celle de savoir quels rajustements corrélatifs sont nécessaires pour corriger la situation.

[118]   Je conclus par conséquent que le ministre ne pouvait pas établir une nouvelle cotisation à l’égard d’Oxford au motif que le résultat global obtenu par cette utilisation circonscrite des dispositions relatives à la majoration donnait lieu à un abus.

[119]   Le résultat global à l’égard des biens non amortissables — c.-à-d. les terrains — a été obtenu essentiellement de la même façon, c’est-à-dire en faisant passer la valeur des biens du PBR à la juste valeur marchande, ce qui a permis d’annuler le gain en capital réputé de 10 917 900 $ qui aurait autrement été attribuable à l’augmentation de la valeur du terrain aux termes de l’alinéa 100(1)a).

[120]   Le raisonnement ci-dessus explique pourquoi le résultat ainsi obtenu ne contrecarre pas le paragraphe 100(1) ou les autres dispositions invoquées. La seule différence, c’est que les terrains, puisqu’il s’agit de biens non amortissables, sont admissibles à la majoration, peu importe si les dispositions relatives à la majoration sont interprétées en fonction du sens des mots utilisés ou de leur objet et de leur esprit.

-           Les conséquences raisonnables fondées sur la RGAÉ

[121]   Dans la nouvelle cotisation qu’il a établie, le ministre annule les majorations et applique le paragraphe 100(1) au gain résultant. L’annulation des majorations a entraîné une diminution du PBR des participations dans les sociétés de personnes et une augmentation de 148 187 560 $ du gain en capital réalisé par l’intimée lors de la vente des participations aux entités exonérées d’impôt.

[122]   L’analyse qui précède montre que les montants inclus au titre des alinéas 100(1)a) et 100(1)b) ne constituent pas une conséquence raisonnable dans les circonstances, puisque le fait d’éviter le gain en capital imposable de 10 917 900 $ sous le régime de l’alinéa 100(1)a) n’a donné lieu à aucun abus et que le seul abus de l’alinéa 100(1)b) découle de l’évitement de l’impôt sur la récupération, qui s’élève — les parties en conviennent — à 116 591 744 $.

-           Disposition

[123]   Pour les motifs qui précèdent, j’accueillerais l’appel en partie, j’annulerais la décision du juge de la Cour de l’impôt et, rendant le jugement que le juge de la Cour de l’impôt aurait dû rendre, je renverrais la nouvelle cotisation au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation, en tenant pour acquis que l’application du paragraphe 100(1) donne lieu à un gain en capital imposable de 116 591 744 $ et non de 148 187 562 $. La Couronne devrait avoir droit à ses dépens tant en appel qu’en première instance. Dans les deux cas, les dépens sont supportés par les parties selon un rapport 80/20, l’intimée ayant eu partiellement gain de cause.

La juge Dawson, J.C.A. : Je suis d’accord.

Le juge Rennie, J.C.A. : Je suis d’accord.

ANNEXE

Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1

69 (1) […]

Produit de disposition réputé

(11) Malgré les autres dispositions de la présente loi, le contribuable qui, à un moment donné, dispose d’un bien dans le cadre d’une série d’opérations ou d’événements pour un produit de disposition inférieur à la juste valeur marchande du bien est réputé avoir disposé du bien à ce moment pour un produit de disposition égal à sa juste valeur marchande à ce moment s’il est raisonnable de considérer que l’un des principaux objets de la série consiste :

a) à profiter de l’un des éléments ci-après offert à une personne (sauf une personne qui serait affiliée au contribuable immédiatement avant le début de la série, compte non tenu de la définition de contrôlé au paragraphe 251.1(3)) relativement à une disposition ultérieure du bien ou d’un bien de remplacement, à condition que cette disposition soit effectuée, ou des arrangements en vue de cette disposition pris, avant le jour qui suit de trois ans le moment donné :

(i) une déduction (sauf celle visée au paragraphe 110.6(2.1) au titre d’un gain en capital provenant de la disposition d’une action acquise par le contribuable dans le cadre d’une acquisition à laquelle se sont appliqués les paragraphes 85(3) ou 98(3)) dans le calcul du revenu, du revenu imposable, du revenu imposable gagné au Canada ou de l’impôt payable en vertu de la présente loi,

(ii) un solde de dépenses ou autres montants non déduits;

b) à profiter d’une exemption offerte à une personne de l’impôt payable en vertu de la présente loi sur un revenu découlant d’une disposition ultérieure du bien ou d’un bien de remplacement, à condition que cette disposition soit effectuée, ou des arrangements en vue de cette disposition pris, avant le jour qui suit de trois ans le moment donné.

[…]

Liquidation

88 (1) Lorsqu’une société canadienne imposable (appelée « filiale » au présent paragraphe) a été liquidée après le 6 mai 1974, qu’au moins 90 % des actions émises de chaque catégorie de son capital-actions appartenaient, immédiatement avant la liquidation, à une autre société canadienne imposable (appelée « société mère » au présent paragraphe) et que toutes les actions de la filiale qui n’appartenaient pas à la société mère immédiatement avant la liquidation appartenaient alors à des personnes avec lesquelles la société mère n’avait pas de lien de dépendance, les règles suivantes s’appliquent malgré les autres dispositions de la présente loi, exception faite du paragraphe 69(11) :

a) sous réserve des alinéas a.1) et a.3), tout bien de la filiale, à l’exception d’une participation dans une société de personnes, attribué à la société mère lors de la liquidation est réputé avoir fait l’objet d’une disposition par la filiale pour un produit égal :

(i) à zéro, dans le cas d’un avoir minier canadien, d’un avoir minier étranger ou d’un droit aux produits, au sens du paragraphe 18.1(1), auquel se rapporte une dépense à rattacher, au sens de ce paragraphe,

[…]

(iii) au coût indiqué du bien, pour la filiale, immédiatement avant la liquidation, dans le cas de tout autre bien;

[…]

c) sous réserve de l’alinéa 87(2)e.3), modifié par l’alinéa e.2), et malgré l’alinéa 87(2)e.1), modifié par l’alinéa e.2), le coût, pour la société mère, de chaque bien de la filiale attribué à la société mère lors de la liquidation est réputé être :

(i) le coût du bien pour la société mère, compte non tenu de présent alinéa, si le bien est une participation dans une société de personnes,

(ii) sinon, l’excédent éventuel du montant visé à la division (A) sur le montant visé à la division (B) :

(A) le montant qui, sans le paragraphe 69(11), serait réputé en application de l’alinéa a) être le produit de disposition du bien,

(B) le montant qui, par l’effet de l’article 80, est appliqué en réduction du coût indiqué du bien pour la filiale lors de la liquidation,

plus le montant déterminé selon l’alinéa d) relativement à ce bien, s’il était une immobilisation, autre qu’un bien non admissible, de la filiale au moment où la société mère a acquis pour la dernière fois le contrôle de la filiale et si, par la suite sans interruption jusqu’au moment où il a été attribué à la société mère lors de la liquidation, il appartenait à la filiale; pour l’application du présent alinéa, les biens suivants sont des biens non admissibles :

(iii) les biens amortissables,

[…]

Apport de biens dans une société de personnes

97 (1) Lorsque, après 1971, une société de personnes a acquis des biens auprès d’un contribuable qui, immédiatement après le moment de l’acquisition, faisait partie de la société de personnes, cette dernière est réputée les avoir acquis à un prix égal à leur juste valeur marchande à ce moment et le contribuable est réputé en avoir disposé et en avoir tiré un produit égal à cette juste valeur marchande.

Choix par des associés

(2) Malgré les autres dispositions de la présente loi, sauf le paragraphe 13(21.2), dans le cas où un contribuable dispose de son bien — immobilisation, avoir minier canadien, avoir minier étranger, immobilisation admissible ou bien à porter à l’inventaire — en faveur d’une société de personnes qui est, immédiatement après la disposition, une société de personnes canadienne dont il est un associé, les règles suivantes s’appliquent si le contribuable et les autres associés de la société de personnes en font conjointement le choix sur formulaire prescrit dans le délai mentionné au paragraphe 96(4) :

a) les alinéas 85(1)a) à f) s’appliquent à la disposition comme si la mention :

(i) « pour la société » était remplacée par la mention « pour la société de personnes »,

(ii) « autre que toutes actions du capital-actions de la société ou un droit d’en recevoir » était remplacée par la mention « autre qu’une participation dans la société de personnes »,

(iii) « actionnaire de la société » était remplacée par la mention « associé de la société de personnes »,

(iv) « la société » était remplacée par la mention « tous les autres associés de la société de personnes »,

(v) « à la société » était remplacée par la mention « à la société de personne »;

b) dans le calcul, à un moment donné après la disposition, du prix de base rajusté, pour le contribuable, de sa participation dans la société de personnes, immédiatement après la disposition :

(i) il doit être ajouté l’excédent éventuel du produit que le contribuable a tiré de la disposition des biens sur la juste valeur marchande, au moment de la disposition, de la contrepartie (autre qu’une participation dans la société de personnes) reçue par le contribuable pour les biens,

(ii) il doit être déduit l’excédent éventuel de la juste valeur marchande, au moment de la disposition, de la contrepartie (autre qu’une participation dans la société de personnes) reçue par le contribuable pour les biens dont il a ainsi disposé sur leur juste valeur marchande au moment de la disposition;

c) lorsque les biens dont le contribuable a ainsi disposé en faveur de la société de personnes sont des biens canadiens imposables du contribuable, la participation dans la société de personnes qu’il a reçue en contrepartie est réputée être un bien canadien imposable du contribuable.

[…]

Cas où le coût en capital supporte par l’associé est supérieur au produit de disposition

(4) Lorsque le paragraphe (2) s’appliquait à l’égard de biens amortissables acquis par une société de personnes auprès d’un contribuable qui, immédiatement après avoir disposé de ces biens, était un associé de la société de personnes et que le coût en capital supporté par le contribuable pour les biens dépasse le produit qu’il a tiré de leur disposition, pour l’application des articles 13 et 20 ainsi que des dispositions réglementaires prises en vertu de l’alinéa 20(1)a) :

a) le coût en capital supporté par la société de personnes pour les biens est réputé être celui qui a été supporté par le contribuable pour ces mêmes biens;

b) l’excédent est réputé avoir été admis en déduction en faveur de la société de personnes au titre des biens, en vertu des dispositions réglementaires prises en application de l’alinéa 20(1)a), dans le calcul de son revenu pour des années d’imposition antérieures à l’acquisition de ces biens par la société de personnes.

[…]

98 (1) […]

Règles applicables lorsqu’une société de personnes cesse d’exister

(3) Lorsque, à un moment donné après 1971, une société de personnes canadienne a cessé d’exister et que tous ses biens ont été attribués à des personnes qui étaient des associés de la société de personnes immédiatement avant ce moment de sorte que, immédiatement après ce moment, chacune de ces personnes possède, sur chacun de ces biens, un droit indivis qui, lorsqu’il est exprimé en pourcentage (appelé le « pourcentage » de cette personne au présent paragraphe) de tous les droits indivis sur ces biens, est égal à son droit indivis, lorsqu’il est ainsi exprimé, sur chacun de ces autres biens, les règles suivantes s’appliquent toutes ces personnes ont fait le choix ensemble relativement à ces biens, selon le formulaire prescrit et dans le délai mentionné au paragraphe 96(4) :

a) le produit que reçoit chacune de ces personnes lors de la disposition de sa participation dans la société de personnes est réputé être un montant égal à la plus élevée des sommes suivantes :

(i) le prix de base rajusté, pour elle, immédiatement avant le moment donné, de sa participation dans la société de personnes,

(ii) le montant qu’elle a reçu en argent lorsque la société de personnes a cessé d’exister, augmenté de son pourcentage du total des montants qui constituent chacun le coût indiqué, pour la société de personnes, de chacun de ces biens, immédiatement avant leur attribution;

b) le coût que chacune de ces personnes supporte pour son droit indivis sur chacun de ces biens est réputé égal au total des montants suivants :

(i) le pourcentage, pour cette personne, du coût indiqué du bien pour la société de personnes immédiatement avant son attribution,

(i.1) lorsque le bien est une immobilisation admissible, le pourcentage, pour cette personne, des 4/3 du montant représenté par l’élément F de la formule applicable figurant à la définition de montant cumulatif des immobilisations admissibles au paragraphe 14(5) titre de l’entreprise de la société de personnes immédiatement avant le moment donné,

(ii) lorsque le montant déterminé en vertu du sous-alinéa a)(i) dépasse le montant déterminé en vertu du sous-alinéa a)(ii), le montant déterminé en vertu de l’alinéa c) relativement à son droit indivis sur ces biens;

c) la somme déterminée en vertu du présent alinéa, relativement au droit indivis de chacune de ces personnes sur chacun de ces biens qui étaient des immobilisations (autres que des biens amortissables) de la société de personnes, est la fraction de l’excédent visé au sous-alinéa b)(ii) qui est désignée par elle, relativement aux biens, sauf que :

(i) en aucun cas la somme ainsi désignée relativement à son droit indivis sur un de ces biens ne peut dépasser l’excédent éventuel de son pourcentage de la juste valeur marchande de ce bien, immédiatement après son attribution, sur son pourcentage du coût indiqué de ce bien, supporté par la société de personnes, immédiatement avant son attribution,

(ii) en aucun cas le total des sommes ainsi désignées relativement à ses droits indivis sur toutes ces immobilisations (autres que les biens amortissables) ne peut être supérieur à l’excédent visé au sous-alinéa b)(ii);

e) lorsque le bien ainsi attribué par la société de personnes était un bien amortissable d’une catégorie prescrite de la société de personnes et que le montant que représente le pourcentage, afférent à l’une de ces personnes, de la somme représentant le coût en capital de ce bien supporté par la société de personnes dépasse le montant déterminé en vertu de l’alinéa b) comme étant le coût, supporté par cette personne, de son droit indivis sur le bien, pour l’application des articles 13 et 20 et des dispositions réglementaires prises en vertu de l’alinéa 20(1)a) :

(i) le coût en capital, supporté par elle, de son droit indivis sur le bien est réputé être son pourcentage de la somme représentant le coût en capital du bien supporté par la société de personnes,

(ii) l’excédent est réputé lui avoir été alloué au titre du bien selon les dispositions réglementaires prises en application de l’alinéa 20(1)a), dans le calcul du revenu pour les années d’imposition antérieures à l’acquisition, par elle, de son droit indivis;

[…]

Disposition d’une participation dans une société de personnes

100 (1) Malgré l’alinéa 38a), un gain en capital imposable d’un contribuable, pour une année d’imposition, tiré de la disposition d’une participation dans une société de personnes en faveur d’une personne exonérée d’impôt en vertu de l’article 149 est réputé être formé du total des sommes suivantes :

a) la moitié de la partie de son gain en capital tiré de cette source, pour l’année, qu’il est raisonnable de considérer comme attribuable à l’augmentation de valeur de tout bien de la société de personnes qui est une immobilisation, sauf un bien amortissable;

b) la totalité de la partie restante de ce gain en capital.

[…]

245 (1) […]

Attributs fiscaux à déterminer

(5) Sans préjudice de la portée générale du paragraphe (2) et malgré tout autre texte législatif, dans le cadre de la détermination des attributs fiscaux d’une personne de façon raisonnable dans les circonstances de façon à supprimer l’avantage fiscal qui, sans le présent article, découlerait, directement ou indirectement, d’une opération d’évitement :

a) toute déduction, exemption ou exclusion dans le calcul de tout ou partie du revenu, du revenu imposable, du revenu imposable gagné au Canada ou de l’impôt payable peut être en totalité ou en partie admise ou refusée;

b) tout ou partie de cette déduction, exemption ou exclusion ainsi que tout ou partie d’un revenu, d’une perte ou d’un autre montant peuvent être attribués à une personne;

c) la nature d’un paiement ou d’un autre montant peut être qualifiée autrement;

d) les effets fiscaux qui découleraient par ailleurs de l’application des autres dispositions de la présente loi peuvent ne pas être pris en compte.

Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1 (telle qu’amendée en 2012)

Liquidation

88 (1) […]

[…]

d) […]

[…]

(ii.1) pour le calcul de la somme visée au sous-alinéa (ii) relativement à une participation de la filiale dans une société de personnes, la juste valeur marchande de la participation au moment où la société mère a acquis la dernière fois le contrôle de la filiale est réputée correspondre à la somme obtenue par la formule suivante :

A – B

où :

A représente la juste valeur marchande de la participation à ce moment, déterminée compte non tenu du présent sous-alinéa,

B la partie de l’excédent de la juste valeur marchande de la participation à ce moment, déterminée compte non tenu du présent sous-alinéa, sur son coût indiqué à ce moment qu’il est raisonnable de considérer comme étant attribuable à ce même moment au total des sommes dont chacune représente :

(A) dans le cas d’un bien amortissable que la société de personnes détient soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs autres sociétés de personnes, l’excédent de la juste valeur marchande du bien, déterminée compte non tenu des dettes et autres obligations, sur son coût indiqué,

(B) dans le cas d’un avoir minier canadien ou d’un avoir minier étranger que la société de personnes détient soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs autres sociétés de personnes, la juste valeur marchande de l’avoir, déterminée compte non tenu des dettes et autres obligations,

(C) dans le cas d’un bien qui n’est ni une immobilisation, ni un avoir minier canadien, ni un avoir minier étranger et que la société de personnes détient soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire d’une ou de plusieurs autres sociétés de personnes, l’excédent de la juste valeur marchande du bien, déterminée compte non tenu des dettes et autres obligations, sur son coût indiqué,

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